[Jacques Cheminat – Le Monde Informatique – 10/09/2013]
Si la NSA dépense des milliards de dollars pour casser les technologies de cryptage, des experts en sécurité estiment que, correctement mis en oeuvre, le chiffrement est encore le meilleur moyen pour garantir la confidentialité sur le web.
Le journal The Guardian et d’autres médias ont publié la semaine dernière des documents issus de l’informateur Edward Snowden montrant que la NSA travaille à casser les technologies de chiffrement par différents moyens : backdoor, attaques par force brute, interceptions légales et partenariats avec des acteurs IT. A la lecture de ces documents, il semble que l’agence de renseignement et son homologue britannique GHCQ soit capable de venir à bout de nombreux algorithmes de chiffrement utilisés pour sécuriser les communications en ligne, les services bancaires et les secrets industriels.
Steve Weis, directeur technique chez PrivateCore et titulaire d’un doctorat en cryptographie du MIT a expliqué que malgré les activités de la NSA, les mathématiques utilisées pour le chiffrement sont très difficiles à casser. Il suggère que l’agence a réussi à briser des technologies dépassées ou peu fiables. Ainsi, dans les documents publiés, il y en a un qui suggère que la NSA aurait implanté un backdoor dans une norme de chiffrement approuvée par le NIST et nommée Dual EC DRBG. Cette dernière a pour vocation de générer des nombres aléatoires. « Elle date de 6 ans et a rarement été utilisée depuis que deux ingénieurs de Microsoft ont découvert le backdoor de la NSA », explique Steve Weis. Il s’interroge sur le fait que les experts de la NSA disposent de la capacité de fracturer des technologies de cryptage plus robustes. « Jusqu’à présent, je n’ai pas constaté que l’algorithme AES (Advanced Encryption Standard) a été cassé », confie le spécialiste.
Une mise en oeuvre correcte et une saine gestion des clés
De son côté Dave Anderson, directeur de Voltage Security, société spécialisée dans le chiffrement, indique « s’il est appliqué correctement, le cryptage assure une sécurité inviolable » et d’ajouter qu’« il s’agit normalement d’une sécurité qui prendrait des millions d’années à des supercalculateurs à casser ». Il émet cependant des limites, « si la mise en oeuvre a été négligée et que le processus de gestion des clés n’est pas bon, alors le niveau de sécurité peut être mis en défaut en quelques heures par un pirate avec un PC moyen de gamme ». (suite…)