Julien Coupat



[Rémi Noyon – Rue89 – 02/02/2015] En plus de son efficacité douteuse, le site gouvernemental Stop-djihadisme se prête à tous les détournements. On y trouve notamment une plaquette qui renseigne sur « les premiers signes » de l’embrigadement d’un proche dans le salafisme djihadiste. Parmi ces « signes » évoqués sous forme de pictogrammes (à gauche ci-dessus) :

  • « Ils se méfient des anciens amis, qu’ils considèrent maintenant comme des “impurs” » ;
  • « Ils rejettent des membres de leur famille » ;
  • « Ils abandonnent l’école ou la formation professionnelle car l’enseignement dispensé fait parti du complot », etc.

Vient ensuite le numéro vert mis à disposition des « familles » qui « sont souvent démunies pour identifier les signes qui peuvent laisser présager un embrigadement, puis un départ ». radicalisation

La plaquette de La Quadrature

Sur Twitter, Clément Sénéchal, « l’homme qui tweetait pour Mélenchon », se moque gentiment :

« Passé la journée au téléphone avec le ministère de l’Intérieur : j’avais des doutes sur à peu près tous mes potes. »

Certains vont plus loin. Jérémie Zimmermann, l’un des co-fondateurs de La Quadrature du Net, qui défend un Internet libre et ouvert, vient de relayer une plaquette intitulée : « Dérive autoritaire. Les premiers signes qui doivent alerter » (à droite ci-dessus). attentifs_ensemble Reprenant les codes du site Stop-djihadisme, cette infographie liste les risques :

  • « Restriction de la liberté d’expression » ;
  • « Interdiction de manifestations pacifiques » ;
  • « Banalisation de messages racistes » ;
  • « Généralisation et extension de la surveillance des citoyens » ;
  • « Prévalence d’intérêts économiques sur l’intérêt général » ;
  • « Partenariats avec des régimes violant les droits de l’homme » ;
  • « Répression violente des manifestations » ;
  • « Instrumentalisation des menaces pour justifier des mesures sécuritaires » ;
  • « Contournement de la démocratie et du contrôle du pouvoir judiciaire. »

Ça ne vous rappelle rien ? http://rue89.nouvelobs.com/2015/02/01/derive-autoritaire-les-premiers-signes-doivent-alerter-257453


De Sivens à Notre-Dame-des-Landes, plongée au cœur de l’extrémisme vert, ses réseaux et ses méthodes

[ATLANTICO – 29/10/2014]

Atlantico : Selon les dernières informations, Rémi Fraisse, le jeune militant engagé contre le projet de construction du barrage de Sivens, serait mort à cause de l’explosion d’une « grenade offensive » lancée par la gendarmerie. De l’autre côté, que sait-on de l’emploi de substances explosives par les groupes militants altermondialistes ?

Sylvain Boulouque : Les militants se positionnant dans une logique de guérilla urbaine, l’usage de cocktails Molotov est un moyen de repousser les forces de l’ordre. Dans ce genre de combat, les armes à feu ne sont pas utilisées, c’est donc le moyen le plus efficace qu’ils ont trouvé pour lutter contre les représentants de l’Etat.

Alain Bauer : Les environnementalistes et les écologistes radicaux utilisent depuis de nombreuses années des cocktails Molotov et autres outils de même nature. Les grands affrontements comme celui du Larzac s’étaient également soldés par des morts. Les affrontements durs et l’usage d’engins artisanaux sont connus, même si en l’occurrence, il faut encore rester prudent sur les raisons exactes de son décès.

De Notre-Dame-des-Landes en Loire Alantique à Sivens dans le Tarn, les mouvements altermondialistes occupent régulièrement la scène médiatique. Quels sont ces groupes, ainsi que les profils des personnes qui les composent ?

Alain Bauer : Il s’agit de jeunes gens radicalisés qui considèrent qu’une lutte pour l’environnement et contre le capitalisme doit être menée. Les tendances politiques vont du vert au rouge en passant par le noir de l’anarchisme, jusqu’au vert-de-gris plus récemment. Le national-socialisme avait lui aussi des tendances environnementalistes. Comme toujours, les phénomènes sont beaucoup plus complexes que l’idée qu’on s’en fait.

Sylvain Boulouque : Les rassemblements du type de Sivens sont hétéroclites. C’est ce qu’on appelle de manière très large et vague la mouvance altermondialiste, qui existe depuis le début des années 1990, et qui s’appelait avant « antimondialisation ». On l’aurait aujourd’hui appelée gauche anticapitaliste, ou gauche radicale. On retrouve dans cette mouvance des libertaires, des anarchistes, des anciens maoïstes, encore quelques très rares maoïstes, des anciens communistes ou des communistes critiques se rattachant à la tendance de Clémentine Autain au sein du Front de gauche, et bien sûr des écologistes. Parallèlement, on trouve beaucoup de paysans, de ruraux ou de néo-ruraux. Ces derniers sont d’anciens soixante-huitards partis s’installer à la campagne dans les années 1970. Voilà pour le panorama général. (suite…)


Souvenez vous, quand la presse vous parle de « opération anti-terroriste ayant permis l’arrestation de… » que 90% des « complots terroristes » découverts aux USA ces 10 dernières années ont été « suscités » voire fabriqués de toutes pièces par la police… la « Guerre à la terreur » est un juteux marché qui permet de justifier le flicage et la répression contre toutes les formes de dissidence.

[Oumma.com – 03/05/2014]

Quand on peut fabriquer des peurs, qui frappent l’imaginaire, pour mieux les exacerber, pourquoi ne pourrait-on pas créer des terroristes de toutes pièces, histoire de crédibiliser les plus dantesques des scénarios catastrophes ?  A ce petit jeu de la manipulation, foncièrement immoral, qui brise des vies sans état d’âme au nom d’une lutte anti-terroriste qui a bon dos, les Etats-Unis font figure d’experts, même si parfois leur mystification leur explose en pleine face, comme c’est le cas de l’affaire du « terroriste du siècle », une afffaire à faire monter l’adrénaline dans les chaumières…

Derrière le portrait effrayant du « terroriste » patibulaire, qui était sur le point de laisser son empreinte sanglante dans l’Histoire en tant que plus grand criminel de tous les temps, se dissimulait Ahmed Abbassi, un malheureux étudiant tunisien de l’Université de Laval, au Canada, odieusement trahi dans sa confiance et piégé par la sombre machination orchestrée par un agent du FBI.

Au portrait-robot affreusement caricatural se sont ajoutées cent heures de conversations enregistrées, entièrement trafiquées, qui ont achevé de convaincre la police américaine de tenir là l’ennemi public n°1, l’Attila des temps modernes… Pour forcer un peu plus le trait, l’agent du FBI avait réussi à faire passer Ahmed Abbassi, ce coupable idéal, à qui il avait promis de réaliser son rêve américain et obtenu un visa en 2013, pour un dangereux meneur qui aurait «radicalisé» Chiheb Esseghaier, un autre étudiant tunisien, arrêté à Montréal en avril 2013, au motif qu’il aurait planifié le déraillement d’ un train de VIA Rail entre Toronto et New York.

«Ils ont basé leurs affaires sur rien! Mon frère voulait venir s’installer avec sa femme à Québec pour étudier et faire sa vie. Les gens doivent savoir qu’il n’a jamais été impliqué dans quoi que ce soit d’illégal», avait alors dénoncé sa soeur, comme le rapporte le site Kapitalis.  Interpellé le 22 avril, Ahmed Abbassi, s’est retrouvé pris dans une véritable souricière, accusé de terrorisme, de préparation d’actes terroristes, et de vouloir anéantir 100 000 personnes, avant d’être jeté en prison où il était menacé de croupir pendant 50 ans.

Depuis mardi dernier, date de sa comparution devant la Cour Fédérale, cette perspective cauchemardesque semble n’être plus qu’un mauvais souvenir, grâce à la plaidoirie imparable de son avocate Sabrina Shroff, qui a su démonter le mécanisme bien huilé d’un complot ourdi par un agent du FBI, réhabilitant l’honneur d’un homme et le sauvant in extremis de l’enfer.

Pour recouvrer la liberté, Ahmed Abbassi devra cependant plaider coupable mais uniquement pour la falsification d’une déclaration en vue d’obtenir une carte verte et un visa de travail. Un aveu qui le condamnera peut-être à une courte peine de prison, tout au plus six mois, puis il tentera de reprendre le cours normal de son existence, là où il l’avait laissée, avant de voir ce piège terrifiant se refermer sur lui. Le « terroriste du siècle » était un leurre grossier, mais la réalité du drame vécu par Ahmed Abbassi a dépassé la fiction…

http://oumma.com/202149/tunisien-accuse-detre-terroriste-siecle-usa-victime-d


Au début du siècle, la police US fabriquait déjà des vrais attentats à la bombe imputés aux anarchistes, afin de mieux réprimer le mouvement ouvrier. C’est une manipulation courante. Et sous Bush, chaque fois que l’Administration Bush était confrontée à un problème politique, le chef du Homeland Security débarquait à la télé pour nous mettre en garde contre un nouveau projet d’attentat terroriste… En France c’est Sarkozy qui nous a fait le coup du « terrorisme d’ultragauche » avec l’affaire de Tarnac… ou bien Mohammed Merah, collaborateur des services secrets français. Ou encore les attentats de Londres, avec des jeunes suivis à la trace par la police depuis des mois…

… c’est à se demander si les attentats du 11 Septembre… mais non, mais non, on n’ose pas penser des choses aussi « nauséabondes »

Néanmoins… le terrorisme c’est bien pratique quand même, pour détourner l’attention du public des vrais problèmes.

[Tim Carr – IES News Service – 02/05/2012 – Trad. Gregoire Seither]

De nos jours, la principale activité du FBI consiste à démasquer des complots terroristes aux Etats-Unis. Et quand le FBI ne parvient pas à trouver suffisamment de complots pour justifier son existence… et bien le « Bureau » les fabrique ! Pour ensuite parader devant la presse avec ses trophées… … mais même la presse la plus veule finit par se rendre compte de quelque chose.

Ainsi, dans un article publié la semaine dernière, le New York Times ose écrire

Ces dernières années, les Etats-Unis ont été préservés d’un certain nombre d’attentats meurtriers, planifiés par des terroristes sur notre sol et détectés à temps par les agents fédéraux du gouvernement…. c’est du moins ce que l’on a voulu nous faire croire…

http://mobile.nytimes.com/2012/04/29/opinion/sunday/terrorist-plots-helped-along-by-the-fbi.xml 

Ces derniers mois nous avons ainsi eu droit :

  • à un kamikaze, intercepté alors qu’il allait faire sauter le Capitole;
  • à de dangereux individus à Newburgh, dans l’Etat de New York, qui ont été mis hors d’état de nuire alors qu’ils se préparraient à lancer une vague d’attentats à la bombe contre des synagogues;
  • à des radicaux qui projetaient de tirer des missiles sol-air Stinger contre des avions militaires.
  • Plus fantaisiste encore, au Massachusetts, un projet de lancer des maquettes d’avion téléguidés, bourrés d’explosifs, contre le Pentagone et le Capitole a été stoppé à la dernière minute,

Malheureusement, à y regarder de plus près, il apparait que tous ces attentats sont été planifiés et encouragés par le FBI, dont les agents se sont fait passer pour des terroristes et ont fourni là un missile factice, ici de faux explosifs C-4 ou encore une veste-kamikaze désarmée voire des stages de formation à la préparation d’attentats.

Les « vrais-faux » terroristes ainsi recrutés ont naïvement cru participer à un complot djihadiste, jusqu’à ce que la police vienne défoncer leur porte au petit matin et les parader devant les caméras de télévision. »

Le journal britannique The Guardian a récemment publié un article qui souligne cet aspect, se demandant si la grande majorité des « succès » claironné par le FBI dans la lutte anti-terroriste de ces dernières années n’était pas tout simplement des complots fabriqués par le FBI lui-même.

Selon les défenseurs des droits civiques aux Etats-unis, le FBI mène, depuis l’époque Bush et sous consigne directe de l’administration d’alors (notamment le Vice Président et son conseiller Richard Pearle, expert en manipulations) une vaste campagne d’infiltrations dans toute l’Amérique, ciblant prioritairement la communauté musulmane et consistant à attirer les gens dans de faux complots terroristes.

L’analyse des documents qui ont pu être obtenus sous couvert de la loi FOIA (Freedom of Information Act) montre que le FBI pratique ce qu’elle appelle la « pèche au chalut » dans les communautés musulmanes, envoyant des infiltrés fréquenter des mosquées et des centres communautaires pour y tenir un discours islamiste radical et identifier les personnes perméables à ce discours et pouvant être recrutées comme terroristes.

Le FBI fait également feu de tout bois, y compris les informateurs les plus étranges. Ainsi, dans les années 2000, ils ont été contactés par un homme affirmant avoir connu le chef terroriste Ayman al-Zawahiri quand celui-ci vivait dans le nord de la Californie dans les années 1990. L’homme a immédiatement été embauché en tant qu’informateur et s’est vu remettre une forte somme d’argent en échange de ses informations. Il a continué à fournir des informations sur de prétendues « cellules dormantes » islamiques en Californie et en Arizona, déclenchant plusieurs raids sur des mosquées à travers le pays – menés sous l’oeil de caméras opportunément prévenues.

Cet informateur est notamment à l’origine d’une séquence qui fit grand bruit auprès des « Tea-Party » (et qui est régulièrement citée par la droite US). On y voit le FBI fouiller un campement dans le désert d’Arizona, un soi-disant « point de passage » pour les immigrés clandestins passant la frontière depuis le Mexique. Dans ce camp, la caméra nous montre une « tente mosquée » (reconnaissable aux soi-disant inscriptions en Arabe sur la toile) et des « tapis de prière abandonnés », preuve que Al-Qaida infiltre effectivement ses djihadistes via la frontière poreuse avec le Mexique.

Il s’est avéré ensuite que les inscriptions en Arabe étaient en fait des inscriptions en Thai (vu que la tente était constituée de vieux sacs de riz) et que les tapis de prière étaient des tapis de sol de camping standard. Mais le mythe perdure, c’est ce qui compte…

Ensuite, une fois les suspects appropriés identifiés, des agents du FBI montent une fausse opération de complot terroriste, mobilisant les personnes, suggérant l’idée, fournissent les armes et désignant la cible. Quand tout est en place, on appelle la presse et on monte des arrestations spectaculaires suivies de conférences de presse et de procès avec condamnations à de longues peines.

Dans toutes ces affaires » écrit le Guardian, « on ne nous dit jamais combien de vrais terroristes ont été appréhendés » (une fois enlevés du lot les policiers infiltrés)

Pour Anthony Newell, avocat des droits civiques au Chicago Community Project,

La presse « mainstream » a vite fait de hurler au « complotisme » quand on ose parler de ces opérations comme n’étant rien d’autre que des provocations policières… mais il semblerait bien qu’un certain nombre des personnes qui se sont fait pièger de cette manière par le FBI prévoient de contre-attaquer devant les tribunaux en accusant le FBI de les avoir incités à commettre ces actions.

Bien sûr, vrai ou faux, il sera difficile aux plaignants de faire croire qu’ils sont de pauvres victimes innoncentes, étant donné que – jusqu’à ce que la police vienne les cueillir – elles étaient persuadées de préparer un vrai attentat terroriste. Mais si l’intégralité de l’opération terroriste s’avère être en fait un scénario soigneusement orchestré par le FBI, celui-ci fournissant l’argent, les armes, les explosifs et désignant la cible… alors il va être difficile de ne pas se poser des questions.

Et la première de ces questions sera de savoir pourquoi le FBI utilise ce genre de méthodes. On a presque l’impression qu’ils se sentent obligés de « fabriquer » de faux complots terroristes pour – entre autres – justifier leur existence ainsi que leur (très très importants) budgets. »


Par contre les longs mois de prison de Julien Coupat sont bien réels, eux. Le message que la Sarkozye paniquée envoyait aux dissidents était clair: on a les moyens de vous faire chier grave, de vous foutre votre vie en l’air, même sur la base d’accusations fausses… alors tenez vous tranquilles.  Message compris 5/5 quand on voit comment la contestation, en cette période de guerre, de crise et de précarité, est retombée comme un flan.  Ce n’est pas pour rien que le virus « Indignés » a contourné la France, le flic Sarkozy a tout mis en place pour cela.

Vous croyez vraiment que cette plainte contre la machination politico-médiatique fabriquée par Michelle Alliot-Marie, sur une idée d’Alain Bauer et de Claude Guéant va aboutir ? Vous rêvez, on est en France, les juges ne crachent pas dans la gamelle dans laquelle ils mangent.

LE PV EST « BOURRÉ D’INVRAISEMBLANCES »

[Le Monde -11/11/2011]

« Faux et usage de faux en écriture publique » : voilà le motif pour lequel une information judiciaire a été ouverte, cette semaine à Nanterre, sur l’enquête des sabotages de TGV. Cette décision fait suite à la plainte du groupe Tarnac qui accuse la police antiterroriste d’avoir rédigé un procès-verbal mensonger pour lesmettre en cause, selon un de leurs avocats.

Les faits remontent à la nuit du 7 au 8 novembre 2008 : des dégradations sont commises sur une ligne TGV dans la Seine-et-Marne. Trois jours plus tard, dix personnes sont arrêtées. Parmi elles, Julien Coupat et sa compagne Yldune Levy. Ils sont alors mis en examen dans ce dossier, instruit à Paris, notamment pour association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste.

 A l’époque, la ministre de l’intérieur, Michèle Alliot-Marie, les avaient désignés comme « un groupe d’anarcho-autonomes », ce que réfute le groupe de Tarnac. Ils nient les accusations et leurs avocats ont toujours mis en cause la police, estimant que des soupçons de falsification pèsent sur certaines pièces importantes du dossier.

C’est dans ce contexte que l’enquête de police avait fait l’objet d’une vive controverse, une partie de la gauche, tout comme la défense, estimant qu’elle avait été fabriquée de toutes pièces pour accréditer l’idée qu’une menace violente existerait à l’ultragauche.

LE PV EST « BOURRÉ D’INVRAISEMBLANCES »

Selon les avocats du groupe de Tarnac, leur mise en cause repose notamment sur un PV de la sous-direction antiterroriste de la PJ française, faisant état d’une filature de Julien Coupat et Yldune Levy la nuit des faits, PV qui, selon eux, est un faux.

« C’est ce PV qui a permis les arrestations », explique Me Assous. « Or il est bourré d’invraisemblances qui rendent impossibles la présence de Julien Coupat et Yldune Levy à cet endroit-là et à ce moment-là », selon l’avocat qui souligne que le faux commis par un dépositaire de l’autorité publique relève de la cour d’assises. « Les enquêteurs ne cessent de clamer qu’ils avaient des éléments. Or après trois ans, il n’y a rien », affirme l’avocat convaincu que l’enquête de Nanterre conduira à la levée des mises en examen. (suite…)


Voilà qui apporte de l’eau a moulin de toute la communauté des MIHOP-9/11…  La police politique du Tsar en Russie avait déjà théorisé il y a 150 ans l’utilité d’un mouvement terroriste fabriqué afin de pouvoir, avec l’assentiment populaire, surveiller, contrôler et réprimer la dissidence.

Et puis quoi de mieux, pour justifier des budgets « anti-terroristes » pharaoniques, que de pousser les gens à passer à l’acte, afin de les coffrer ensuite à grand renfort de publicité ?  Comme le résume Mother Jones, « on a là des gens qui ne seraient jamais passés à l’acte sans le FBI. Le FBI crée des crimes pour stopper des crimes !« 

[Jean-Marc Manach – Bug Brother – 29/09/2011]

Le FBI, qui vient d’annoncer l’arrestation d’un Américain qui projetait de perpétrer des attentats contre le Pentagone et le Congrès, avec la soutien d’agents infiltrés du FBI, est coutumier de ce genre d’opération de manipulation, et de provocation. Tellement coutumier qu’une bonne partie des attentats préparés, ces dernières années, aux USA, l’ont été avec l’aide et l’assistance du FBI…

Une étude universitaire américaine révélait ainsi récemment que 13 des 33 tentatives d’attentats islamistes recensés aux USA depuis 2001 -soit près de 40%- avaient été « initiées ou facilitées par les autorités » au moyen d’un agent infiltré, ou d’un indicateur retourné.

Les journalistes de Mother Jones, associés au programme de journalisme d’investigation de l’university de Berkeley, en Californie, ont de leur côté passé un an à enquêter sur le sujet, afin de savoir à quoi servent les 15 000 personnes payées par le FBI (contre 2800 en 1980, et 6000 et 1986) afin d’infiltrer, en majorité, les communautés musulmanes aux États-Unis. Le dossier complet, et la longue enquête associée, sont effarants :

  • 49% des personnes arrêtées ont été dénoncées par des informateurs, la majeure partie d’entre-eux étant payés, pour certains jusqu’à 100 000$ par affaire, pour s’infiltrer, et dénoncer.
  • sur les 158 personnes arrêtés dans le cadre d’une opération d’infiltration, 49 avaient conspiré à l’initiative d’un agent provocateur du FBI, et, à l’exception de trois, la majeure partie des véritables projets d’attentats initiés aux USA ont été organisés avec l’appui du FBI.
  • il est si difficile de se défendre lorsque l’on est accusé de terrorisme que la majeure partie des personnes accusées préfère éviter un procès.

On apprend également que, depuis le 11 septembre 2001, le ministère de la Justice américain (DoJ) a poursuivi plus de 500 personnes pour « terrorisme« . En réétudiant 400 de ces affaires, le DoJ a finalement découvert que 60% d’entre-eux ne relevaient pas du terrorisme, mais de violations des lois sur l’immigration ou sur le port d’armes, de « conspiration« , faux témoignages, fraudes ou délinquances financières, vols, évasion fiscales… Le magazine Mother Jones, qui en fait sa « une« , en est pour sa part arrivé à la conclusion que 53% des affaires recensées ne relevaient pas du terrorisme.

Or, vu le poids des charges, la difficulté, et le prix qu’il faut payer, pour parvenir à se défendre de telles accusations, une bonne partie de ces présumés terroristes préfèrent accepter de plaider coupable plutôt que de risquer d’être condamnés encore plus lourdement…

Le DoJ reconnaît que ces charges, qui ne relèvent pas du terrorisme, sont « une méthode très efficace -et parfois la seule méthode- pour identifier et mettre un terme à des projets, ou des soutiens, terroristes« . Certains avaient certes des liens avec des réseaux terroristes, mais nombreux sont aussi ceux qui, SDF, post-ado immatures, ont été suspectés, ou accusés de terrorisme, à tort, à l’image de ces trois Arabes inscrits sur la liste noire des terroristes pour avoir… volé un chargement de corn flakes. Comme le résumait alors leur avocat :

Cette affaire n’a strictement rien à voir avec le terrorisme. A moins que vous ne considériez les corn flakes comme une arme de destruction massive.

Mother Jones évoque également le cas de post-ados immatures à qui un agent infiltré du FBI, qui leur avait promis beaucoup d’argent s’ils faisaient exploser une bombe, a péniblement réussi à arracher, après des mois de travail au corps, une sorte de serment d’allégeance à Al Qaeda : ils refusaient de perpétrer un attentat, cherchant essentiellement à soutirer de l’argent à leur bienfaiteur musulman. Ce dernier est reparti avec les 100 000$ que le FBI lui avait promis, les wanabees paumés inculpés de « terrorisme« …

Comme le résume Mother Jones, « on a là des gens qui ne seraient jamais passés à l’acte sans le FBI. Le FBI crée des crimes pour stopper des crimes !«  A ce stade-là, ce n’est plus de la précognition à la Minority Report, c’est du délire de persécution, sinon un détournement du droit. Une paranoïa sécuritaire qui coûte fort cher : la lutte contre le terrorisme a englouti 3,3 milliards de dollars. Celle contre le crime organisé, qui fait pourtant bien plus de victimes, 2,6.

En France, Claude Guéant vient de fixer la liste des officiers et agents de police judiciaireautorisés à enquêter « sous pseudonyme« , sur Internet. Mais comme le soulignait Loubna Zrari : A peine de nullité, ces actes ne peuvent constituer une incitation à commettre ces infractions. »

jean.marc.manach (sur Facebook & Google+ aussi) @manhack (sur Twitter)
auteur de « La vie privée, un problème de vieux cons ?« 


[L’Express – 22/02/2011]

Selon nos informations, Mark Kennedy, un agent des services britanniques infiltré au coeur des mouvements « alter », a livré des précisions importantes sur les déplacements de Julien Coupat à l’étranger.

Ce fut longtemps le secret le mieux gardé de l' »affaire de Tarnac« : un agent britannique, infiltré au coeur des mouvements altermondialistes et environnementalistes européens, a joué un rôle important dans cette enquête.

De 2002 à 2009, ce policier de 41 ans, Mark Kennedy, a renseigné sa hiérarchie sur les coulisses des milieux « alter ». Au passage, les autorités françaises ont également profité de ses informations. Ainsi, c’est en partie grâce à lui que la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) a pu reconstituer les déplacements à l’étranger de Julien Coupat, considéré par la police comme le chef de file du « groupe de Tarnac ». Dix de ses membres ont été mis en examen dans une procédure pour acte terroriste, après le sabotage, en novembre 2008, d’une ligne de TGV, en Seine-et-Marne. Une accusation qu’ils contestent fermement.

Mais, comme dans les films d’espionnage, l’agent Kennedy, alias Mark Stone, vient de faire défection, passant dans le camp altermondialiste. Il s’apprête même à écrire un livre sur son aventure! Consacrera-t-il un chapitre à Tarnac?

http://www.lexpress.fr/actualite/societe/tarnac-l-infiltre-britannique_964916.html


Un lecteur nous a envoyés ceci, c’est vieux de dix ans mais toujours aussi instructif…`

ALAIN BAUER, DE LA SAIC AU GODF
(Réseau Voltaire 01.10.2000)

En 1993, Alain Bauer a séjourné sept mois au siège de la SAIC à San Diego (Californie). A l’issue de ce stage, il est devenu vice-président pour l’Europe de la SAIC. En 1994, il a créé sa propre société de conseil et de formation en sécurité, AB Associates (http://www.cnit.fr/abassoc), qu’il a domicilié à proximité des locaux de la SAIC-Europe au CNIT-La Défense. Il a alors abandonné ses fonctions de vice-président de la SAIC-Europe pour celles de senior consultant. Au tour de table constitutif du capital d’AB Associates, on trouve la SOCADIF, la société d’investissements de l’ex-journaliste d’extrême droite Patrick Grumelart (qui tenta de racheter Minute en 1985).

Science Application International Corporation (http://www.saic.com) est une firme privée crée à San Diego (Californie) en 1969. Fournisseur d’infrastructures technologiques pour les administrations fédérales américaines, la compagnie s’est rapidement développée jusqu’à atteindre un chiffre d’affaires de 5,5 milliards de dollars et un bénéfice net de 619 millions de dollars, en 1999. Elle emploie 41 000 personnes, dispose de 350 bureaux dans le monde, dont une quarantaine en Europe, souvent situés dans des bases militaires américaines. En 1996, les contrats du gouvernement fédéral représentaient 79 % de son chiffre d’affaires, dont plus de la moitié pour le Pentagone (http://www.redherring.com/mag/digital/science.html).

La SAIC est aujourd’hui considérée comme la  » vitrine des services spéciaux américains  » dont elle sous-traite l’ensemble des besoins industriels. En 1995, la SAIC a absorbé Network Solutions Inc.(http://www.nsol.com/corporate/index.html), la principale société qui gère les noms de domaines sur l’Internet. En 1997, la SAIC a racheté l’opérateur de télécommunications Telcordia (http://www.telcordia.com/). En 2000, lors d’une offre publique d’échange, la SAIC a diminué sa participation dans Network Solutions pour acquérir des parts de VeriSign (http://www.VeriSign.com).

Dans la seule période 1992-1995, la SAIC a engagé 198 anciens colonels et généraux de l’armée des Etats-Unis (http://www.motherjones.com/mother_jones/ND98/heavymetal.html). La SAIC a compté parmi ses administrateurs les anciens secrétaires à la Défense William Perry et Melvin Laird, et les anciens directeurs de la CIA John Deutch (http://www.cia.gov/csi/books/dddcia/deutch.html) et Robert Gates (http://www.cia.gov/csi/books/dddcia/gates.html). Elle compte actuellement comme administrateurs le général Wayne A. Downing (ancien commandant en chef des forces spéciales) (http://www.specialoperations.com/focus/Official/Commanders/downing.html), le général Jasper Welch (ancien coordinateur du National Security Council) (http://www.af.mil/news/biographies/welch_ja.html), et l’amiral Bobby Ray Inman, (ancien directeur de la NSA et ancien directeur adjoint de la CIA) (http://www.cia.gov/csi/books/dddcia/inman.html). (suite…)


Tiens, c’est vrai… on les avait oubliés ceux-là, l’épouvantail de l’hiver précédent, vous vous souvenez, l’Ultragauche, le couteau entre les dents et la bombe dans la poche, qui devait affoler le populo et le faire rentrer dans le rang…

Un fiasco de communication médiatique sur lequel Michèle Alliot-Marie et Alain Bauer (qui est à l’origine de ce montage de basse propagande) se font très, très discrets… et qui a quand même vu un innocent jeté en prison pendant plusieurs mois.

Aujourd’hui, on tape sur les Roms, demain ce sera sur les fonctionnaires feignants ou les parents indignes ou les sauvages des banlieues ou, ou… n’importe quoi pourvu que cela détourne l’attention des médias et des citoyens…

Comme l’écrivait Thomas Pynchon « If They can get you to ask the wrong questions, They don’t need to worry about the answers »– s’ils peuvent t’amener à te poser les questions qui te mènent nulle part, ils n’auront pas besoin de s’inquiéter des réponses que tu pourrais y trouver.

Note de Dov: OK, OK, mais sur la forme, on est quand même en droit de trouver que le style des mecs de Tarnac est chiant et grandiloquent. On retrouve le néo-romantisme révolutionnaire de « L’insurrection qui vient ». C’est du Théâtre, du Pathos à la louche…  la dernière phrase du texte « Seigneurs de ce monde, vous êtes cuits », c’est carrément risible. On dirait une bande de gamins de dix ans qui se racontent des histoires de Zorro dans une cabane sous les arbres…  et comme la flicaille a besoin de méchants d’opérette pour faire monter la mayonnaise sécuritaire, les mecs de Tarnac lui fournissent obligeamment le personnage.

Au secours, Lenine revient !

Au secours, Lenine revient !

[Mediapart – 23/08/2010]

Fin juillet, quelque deux cents personnes se sont réunies dans la commune de Corrèze où des jeunes gens avaient été interpellés, le 11 novembre 2008, lors de l’enquête « antiterroriste » ouverte après le sabotage de lignes TGV. La réunion a eu lieu à la ferme du Goutailloux, à Tarnac, en présence notamment de personnes toujours mises en examen dans ce dossier.
Pendant une semaine, les participants – venus des Etats-Unis, d’Europe et de France – ont cherché à « analyser la situation politique actuelle et élaborer ce que serait une sortie bouleversante de l’ordre présent ». De cette assemblée estivale a émergé un texte, que Mediapart publie aujourd’hui :

Tarnac, été 2010

Il se lève et dit : « La contre-insurrection n’est pas seulement la doctrine d’intervention des armées occidentales en Afghanistan, c’est la nature même de tout gouvernement. La mise en circulation de tel ou tel « élément de langage », l’urbanisme, la distraction organisée, les fables de l’économie, tout provient de la crainte de perdre le contrôle des populations. » Elle lui répond : « Chez nous, le gouvernement a tellement peur, avec la crise, que les gens commencent à s’organiser par eux-mêmes, qu’il contraint les chômeurs à faire des ateliers de réparation gratuite de vélos dans la rue, à récupérer les objets usagés et à patrouiller avec la police. On occupe le terrain préventivement. »

Quelques heures plus tard, une fournée de pain plus loin, un autre : « Moi, ce qui m’étonne, depuis l’automne 2008, c’est qu’une telle crise du capitalisme ait suscité à ce jour, hormis en Grèce, si peu de mouvements. Il y a dix ans il y avait tout un mouvement « antiglobalisation » qui attaquait le système alors que celui-ci se portait plutôt bien, et maintenant que tout donne raison à ce mouvement, il n’y a rien qui se lève, et si peu qui se tente. Que, dans ces moments, chacun se cramponne à sa position sociale menacée est bien compréhensible, mais que militants et activistes restent confortablement installés dans leur rôle social minoritaire, qu’au lieu de s’interroger sur leur soudaine paralysie, ils préfèrent considérer que tout leur donne raison et qu’ils n’ont qu’à continuer à parfaire leur posture radicale sur les sites web spécialisés ou à siroter leur bière à la terrasse des cafés branchés, voilà ce qui est proprement hallucinant. » (suite…)


Quand on attaque le sauvageon, il brûle des voitures et fait grimper les chiffres de la délinquance… c’est pas bon
Quand on attaque l’anarcho-autonome qui plante des fromages de chèvre à Tarnac, il se défend bien sagement devant les tribunaux et tout le monde se fout de vous… pas bon non plus.

Il reste qui alors, comme bouc émissaire qui ne peut se défendre ?

Ben tiens ! Les gitans !!! Tout le monde les déteste, alors c’est du tout bénef !!!

C’est pas nouveau… il y a un an déjà, Matthieu Rigouste décortiquait la stratégie d’Hortefeux, Besson, Sarkozy et consorts.

A noter que l’ouvrage cité, de Carlos Marighela, Manuel du Guerillero Urbain est disponible en PDF dans la Bibliothèque de Libertes & Internets – ou alors directement via le lien suivant : https://www.humyo.com/FSgXWzm/BIBLIOTHEQUE/ACTIVISM/carlos_marighela_manuel_du_guerillero_urbain.pdf?a=excx6v1Ecps

La fabrication de l'ennemi intérieur

La fabrication de l'ennemi intérieur

[Matthieu Rigouste – Article 11 – 10/10/2009]

C’est une très fouillée et méthodique démonstration. En L’Ennemi Intérieur, le chercheur Mathieu Rigouste décrit comment une stratégie militaire totale, cette Doctrine de la guerre révolutionnaire mise en œuvre par la France dans ses guerres coloniales, a progressivement contaminé les champs politique et médiatique, jusqu’à devenir une pratique officieuse de maintien de l’ordre social. Il en reparle ici. Entretien.

Il est tapi. Prêt à bondir. Affairé à saper les bases de la société française, bacille sournois dissimulé en son sein. Il affiche le teint basané, vient d’une autre contrée, affiche des convictions politiques jugées radicales, fréquente la Mosquée, lit des livres pernicieux, porte un jogging et des baskets, est dangereux, vit en communauté, participe aux poussées de violence urbaine, est la cinquième colonne, les germes du désordre, la chienlit, la montée des périls. Il est fellagha, bolchévique, immigré post-colonial, gauchiste, révolutionnaire tiers-mondiste ou anarcho-autonome. Il est…

Il est tout cela à la fois, et puis rien du tout. Il est l’ennemi intérieur, figure qu’il conviendrait de purger, bouc émissaire désigné à la vindicte générale pour légitimer la coercition et rationaliser le contrôle social. Cette création fantasmée du pouvoir s’est vue institutionnaliser par la Doctrine de la guerre révolutionnaire, théorie et pratique de la terreur conçues par l’armée française pendant les guerres coloniales – à commencer par la guerre d’Algérie – , doctrine d’État un temps officielle (de 1953 à 60) avant que d’être désavouée mais de continuer clandestinement à irriguer les mondes militaire, politique et médiatique. Corpus idéologique complet autant que codification des pratiques – de l’emploi de la guerre psychologique à l’usage de la torture en passant par le quadrillage militaro-policier du territoire, les assassinats ciblés et la mobilisation de l’ensemble du corps social – , la Doctrine de la guerre révolutionnaire a profité du contexte de la Guerre Froide pour se répandre partout, plébiscitée par les militaires anglo-saxons dans les années 60, mise en œuvre contre les mouvements de libération et les tentatives d’émancipation dans l’Amérique Latine des années 70 et 80. En France-même, son officielle mise à l’encan par De Gaulle ne l’a pas empêché de continuer à prospérer, idéologie officieuse du maintien de l’ordre sous tous les régimes. De la tuerie du 17 octobre 1961 à la répression post-68 par Marcellin. De la première mise en avant de la « menace migratoire » au plan Vigipirate. De l’agitation de la menace terroriste à la lutte contre l’islamisme. De la guerre dans les quartiers au très récent péril anarcho-autonome.

Tu as compris – sans doute – que je souhaitais te parler de l’excellent livre de Mathieu Rigouste, L’Ennemi Intérieur, la généalogie coloniale et militaire de l’ordre sécuritaire dans la France coloniale

Tu me pardonneras – j’espère – cette introduction un tantinet poussive, tant il n’est pas simple de résumer en quelques lignes un travail remarquablement fouillé et argumenté. Tu mettras – surtout – les éventuelles obscurités de ce préambule sur mon compte, quand l’ouvrage de Mathieu Rigouste est lumineux et cohérent, démonstration magistrale de cette contamination des cercles du pouvoir par la Doctrine de la guerre révolutionnaire. S’appuyant sur le fond d’archives (encore jamais exploité) de l’Institut des Hautes Études de Défense Nationale (IHEDN), une structure « civilo-militaire chargée de promouvoir l’esprit de défense », ainsi que sur des publications de la presse militaire – Défense Nationale, Défense et La Revue de l’IHEDN – , il démontre parfaitement comment cette figure de l’ennemi intérieur, imaginée par les hommes en armes, est récupérée par les champs politique et médiatique. Il fait travail d’historien, de chercheur, et décrit nos mondes passé, présent et à venir, extension généralisée du contrôle et main-basse croissante sur nos vies. Il en parle mieux que moi, surtout .

La publication de ton ouvrage, début 2009, n’aurait pu « mieux » tomber : l’affaire de Tarnac est venue comme une parfaite illustration de ton travail. Dans la logique de création de l’ennemi intérieur, tu penses que les manipulations étatiques de ce genre vont se multiplier ?

En fait, la publication est tombée juste après un nouvel essai de réglage de la fonction bouc-émissaire : sur la figure de « l’anarcho-autonome ». Mais ce mécanisme de la machine à purge continue depuis bientôt vingt ans à fonctionner sur un double réglage : les figures de « l’islamo-terroriste » et du « barbare de cité ». L’affaire de Tarnac ne fait que reformuler et appliquer exceptionnellement, pour l’instant, un type de montage habituellement réservé aux non-blancs pauvres et de manière permanente. Comme la logique sécuritaire, qui tend à reformuler et appliquer en continu à « la population » des méthodes de guerre conçues contre « les populations colonisées ». S’il y a manipulation, il faut le comprendre dans un sens technique, comme un ajustement. Les montages médiatico-politiques sont des utilisations particulières de machines de pouvoir qui fonctionnent en permanence, reliées aux machines économiques et industrielles. Tant qu’une forme de pouvoir est en place, ses machines évoluent, mais elles continuent de fonctionner et de dysfonctionner. (suite…)


C’est une sorte de Eric Zemmour, mais en logiciel…

[Audrey Oeillet – Clubic  –  19/04/2010]

1956, Philip K. Dick écrivait une nouvelle du nom de Minority Report, adaptée au cinéma par Steven Spielberg en 2002. L’auteur y imaginait un moyen de prédire les crimes pour arrêter les coupables avant même qu’ils agissent.

Plus de 50 ans plus tard, la réalité semble bel et bien rattraper la fiction, même si les précogs du roman sont aujourd’hui remplacés par un simple logiciel, qui devrait être utilisé prochainement par le Florida State Department of Juvenile Justice.

Le logiciel, conçu par IBM, réaliserait un suivi des « jeunes délinquants » qui, selon le dossier de l’enfant et une série de variables déterminées à l’avance, pourrait calculer les risques de récidive. Les jeunes identifiés comme « à risques » pourraient ainsi être placés dans des programmes spécifiques pour les aider à sortir de la délinquance.

Selon IBM, ce logiciel, nommé Predictive Analytics, peut donner aux gouvernements du monde entier un « moyen pour créer des communautés plus sûres via l’identification, la prévision, l’intervention et la prévention des activités criminelles ».

Deepak Advani, vice-président du projet, ajoute que le programme « donne au système de justice pénale la possibilité de puiser dans les bases de données riches pour détecter les tendances, faire des projections fiables, et prendre des mesures appropriées en temps réel pour combattre le crime et protéger les citoyens ».

IBM a profité de l’occasion pour annoncer que le Royaume-Uni testait actuellement le même logiciel à l’heure actuelle, mais sur les adultes cette fois : le ministère de la Justice du pays s’en sert en effet pour évaluer la probabilité de récidive des détenus après leur libération.

La fiabilité d’un tel logiciel reste encore à prouver, et il y a fort à parier qu’un tel fichage des données personnelles des citoyens ne se fera pas sans heurt. IBM, de son côté, semble croire fermement à ce projet, puisque la firme a investi 12 milliards de dollars dans son département analyse, qui intègre les travaux sur Predictive Analytics.

http://pro.clubic.com/entreprises/ibm/actualite-335952-ibm-floride-logiciel-prevision-crimes.html


Personne ne ment aussi obstinément qu’un flic, un juge ou un militaire… c’est le sentiment d’impunité et l’esprit de caste de l’appareil judiciaire et d’Etat qui veut cela. Même s’il devait s’avérer un jour que F. Cassez est innocente, la police et la justice continueront à dire le contraire, pour ne pas perdre la face.

En France, nous avons la même chose avec les inculpés de Tarnac ou la bavure du Thanis…

Et quand on connait les méthodes expéditives utilisées par la police mexicaine, le danger est grand en effet qu’une « rixe » opportune entre détenues, ou bien « le geste d’un déséquilibré » règle la question et débarrasse la justice mexicaine de cette prisonnière embarrassante…

[Libération – 21/04/2010]

Soulagée, Florence Cassez? Non, répond depuis sa prison, au téléphone, la jeune femme détenue depuis 2005 pour enlèvements au Mexique. La nuit dernière à Mexico, l’AFP a révélé que le Parquet général de la République du Mexique avait reconnu dès 2007 ce que Florence Cassez dit depuis le départ: la police a menti sur les circonstances de l’arrestation télévisée de la jeune femme. Celle que les journalistes pensaient couvrir en direct n’était pas la vraie.

Au bout du fil, Florence Cassez parle depuis un couloir de sa prison de Tepepan, au Mexique. On perçoit derrière elle les éclats de voix de la prison. Autour de la table à Lille, une vingtaine de journalistes écoutent. C’est Lionel Gougelot, d’Europe 1, qui parle à la jeune femme.

Soulagée? «Je ne sais pas si ça me soulage. Cette décision date de mars 2007. Elle aurait dû être ajoutée à mon dossier en appel (elle a été rejugée en 2009, ndlr). Ça m’énerve plus qu’autre chose. Depuis le début je crie mon innocence. Je suis la seule à avoir dit la vérité depuis le départ. On est en 2010, on se rend compte que cette lettre où ils reconnaissent que ça a été un montage a été cachée. Je trouve ça incroyable qu’il ait fallu attendre pour ça une réponse de Pablo Reinah (le journaliste de Televisa qui a filmé l’arrestation, ndlr) qui voulait se défendre. Je sais bien que le temps va passer, que des mensonges, des nouvelles contradictions vont arriver. Je perds mon temps.»

«Je ne suis pas en train de sauter de joie. J’en suis au stade de dire: «Il en faut combien des preuves comme ça?» J’ai besoin que ça avance. Que ça ne soit pas un mensonge de plus qu’on va essuyer avec le temps.» (suite…)


[Gregor Seither – IES News Service – 29/03/2010 ]

Cela va faire un an depuis que Ian Tomlinson est mort après avoir été attaqué par un officier de police lors des manifestations du G20. Aucun action en justice n’a suivi cette mort, personne n’a été puni pour ce meurtre. Malgré 300 plaintes déposées par des citoyens britanniques vis-à-vis du comportement de la police lors des manifestations du 1er Avril 2009 – et malgré des centaines d’heures d’enregistrements vidéos et de photos, aucun policier n’a encouru ne serais-ce qu’un blâme pour les exactions et la violence aveugle exercée contre des manifestants pacifiques. Les policiers qui ont illégalement enlevé leurs badges avec leur matricule, qui ont matraqué de simples passants dans la rue puis ont menti sur ce qu’ils ont fait, de manière répétée… tous ces agents de la force publique qui ont commis des actes illégaux restent dans l’impunité, et ni la loi, ni leurs supérieurs ne leur demandent des comptes. La police n’a jamais contacté la famille de Ian Tomlinson, ne serais-ce que pour exprimer des condoléances.

Comparez cet état de fait à celui d’un cas dans le Nottinghamshire, en juin 2009. Un policier a causé deux morts et a immédiatement été mis à pied. Ses supérieurs ont contacté tout de suite la commission indépendante d’investigation (Independent Police Complaints Commission) et mené leur propre enquête. Le commissaire principal a déclaré “nous allons tirer les leçons de cette tragédie afin qu’elle ne puisse plus se reproduire. Cela a causé une immense tristesse et un très grand choc.” La presse a publié des photos montrant des officiers de police entrain de faire le salut militaire devant les bouquets de fleurs que des passants éplorés avaient déposé devant le commissariat de police. Personne n’a rien caché, personne n’a diffamé les victimes, personne n’a trafiqué la scène du crime pour masquer son forfait, personne n’a dit que les victimes étaient alcooliques et violentes ou qu’elles l’avaient bien cherché. L’agent de police responsable a été rapidement mis en examen et, malgré le fait que ces deux morts sont dus à une négligence de sa part et non pas à une attaque violente, il a néanmoins été condamné pour avoir provoqué la mort de ces deux victimes.

Il y a une différence significative entre les deux cas: dans le Nottinghamshire, les victimes étaient des chiens. L’officier de police avait laissé deux chiens policiers dans la voiture et les avait oubliés au soleil, tandis qu’il remplissait des papiers. Si on en juge par la réponse de la police vis à vis de ses deux tragédies, la vie de deux chiens est plus précieuse qu’une vie humaine, du moins dans les yeux de la Police .

La semaine dernière, en Grande-Bretagne, la « Association of Chief Police Officers » (ACPO) a publié un manuel de formation pour ses officiers afin de leur apprendre à réagir de manière appropriée lors de manifestations. On peut s’attendre à voir la police se répandre dans les médias pour nous dire que le tabassage et la violence contre les manifestants, c’est de l’histoire ancienne. Jusqu’à la prochaine bavure qui prouvera que ce ne sont que des mots.

L’an dernier déjà, une semaine avant le G20, le Comité Parlementaire sur les Droits Humain avait publié un rapport très sévère sur la manière dont la police britannique gère les manifestations. Le Comité mettait en garde: « Les pouvoirs exceptionnels accordés à la police dans le cadre de la lutte anti-terroriste ne doivent jamais être utilisés contre des manifestants pacifiques » et que « par principe, une manifestation pacifique et légale doit pouvoir se dérouler sans qu’il y ait intervention de l’autorité de l’Etat. » A l’époque la direction de la police avait déclaré avec véhémence qu’ils prenaient les conclusions de ce rapport très au sérieux. Et une semaine plus tard la police de Londres faisait exactement ce que le rapport avait critiqué.

En novembre dernier, l’Inspecteur général de la police (chief inspector of constabulary) avait sévèrement condamné les méthodes employées pour réprimer les manifestations par la police. Il avait rappelé aux policiers que les manifestants ne sont pas des ennemis et qu’ils n’ont pas à être traités comme des insurgés dans une province conquise militairement. Il avait insisté sur le fait que le premier devoir de la police est de faire respecter les Droits humains et donc de faciliter le droit des citoyens à se réunir et de manifester de manière pacifique. Pour l’Inspecteur général, la gestion de manifestations publiques demande, de la part de la force publique, “autre chose que la simple mise en place d’un environnement répressif et une réponse légale virulente.” Six mois plus tard, absolument rien n’a changé..

Début Mars, la justice a relaxé un manifestant accusé d’avoir jeté un bâton en direction des forces de l’ordre lors d’une manifestation devant l’ambassade d’Israël. La police basait son accusation sur une séquence vidéo… et affirmait qu’il n’existait aucune autre séquence permettant de disculper M. Smith, le manifestant. Jake Smith avait pourtant fourni à la Cour des séquences trouvées sur YouTube et qui montraient que ce n’était pas lui qui avait lancé le bâton. Mais la Police refusait de tenir compte de ces séquences, affirmant qu’ils n’avaient aucune autre séquence vidéo prises par leurs caméras et corroborant la défense de Jake Smith. Sous la loi anti-terroriste, M. Smith risquait un an de prison au minimum.

Mais deux jours avant le procès, la police avait été obligée d’avouer qu’elle disposait en fait de SEPT HEURES ET DEMIE de vidéo supplémentaire, filmées lors de la manifestation et que, sur ces vidéos, on voyait clairement qu’un autre homme avait lancé le bâton sur la police avant de s’enfuir. L’unique crime commis par Jake Smith avait été de se rendre à une manifestation et de se faire passer à tabac par la police qui l’avait attrapé au hasard, dans la foule. Il fallait bien lui coller quelque chose sur le dos, histoire de justifier son tabassage. Alors la police avait prétendu qu’il avait lancé le bâton.

Tout comme les victimes civiles en Irak et en Afghanistan sont maquillées en terroristes  — des soldats US ayant encore récemment été vus entrain de placer des armes à côté des corps de civils abattus par erreur ou dans des maisons bombardées sans raison, afin de faire croire qu’il s’agissait d’insurgés — , en Europe des manifestants innocents sont victimes de violences policières et sont systématiquement accusés d’outrage à agent ou de  comportement violent afin de justifier leur arrestation, leur passage à tabac et les empêcher de porter plainte.

L’avocat de Jake Smith a soumis la vidéo présentée par la police anglaise à un expert en vidéo. Celui-ci a clairement démontré que la séquence avait été manipulée, éditée et remontée par la police, pour faire croire à la culpabilité de Jake Smith.

Pour l’ancien juge Peter Lorens,

le « scandale est immense, car c’est la Police de notre pays qui nous ment et qui nous traite comme si nous étions des ennemis. Exactement comme dans l’affaire Tomlinson, la police n’a pas peur de mentir et de trafiquer la vérité, d’envoyer un innocent en prison pendant des années, juste pour ne pas perdre la face et reconnaître qu’ils ses sont trompés de cible. »

Et pour Andrea Tallioci, de la Commission indépendante des juristes sur le droits humains en Europe :

En France, des jeunes vivant de manière alternative (NdL&I: Julien Coupat et ses amis) ont passé six mois en prison, uniquement pour satisfaire les fantasmes sécuritaires de Monsieur Alain Bauer et de Madame Alliot-Marie. Quand la justice a souligné à quel point le dossier Coupart/Tarnac est vide, le ministère de l’intérieur a sorti de nouveaux mensonges…

La police et l’Etat détiennent un pouvoir immense par rapport au simple citoyen. Ils ont le droit de nous envoyer dans un endroit très désagréable, de détruire nos vies quotidiennes, de nous espionner… voire de nous abattre si nous faisons mine de résister. Tout cela au nom de la protection de l’ordre public. Ce pouvoir est immense et nous, en face, nous n’avons quasiment rien. Devant un tribunal, un mensonge de la part d’un policer aura toujours plus de poids que la vérité dite par un simple citoyen. La police ne se comporte plus en protecteur des civils, mais en pouvoir autonome qui nous considère, nous les civils, comme des des ennemis potentiels.

Quand la police patrouille dans les rues, quand elle surveille une manifestation ou une simple fête de voisinage, elle est dans le même état d’esprit que les soldats britanniques qui patrouillent en Iraq ou en Afghanistan. Les citoyens sont les « autres », vaguement menaçants, qu’il faut mater s’ils font mine de ne pas respecter notre autorité. Voilà ce qu’est devenue notre démocratie.

[Source: IES News Service – Lettre Hebdo 3 – Mars 2010]


Le véritable objectif de Tarnac n’était pas de se faire mousser auprès du bon peuple « tremblez braves gens, on va vous défendre contre le vilain anarchiste »… le véritable objectif était d’envoyer un message au mouvement social, aux possibles dissidents de tout poil en ces temps de crise:

<<on peut vous faire chier, on peut vous foutre en l’air vos vies, vous prendre vos enfants, vous jeter en prison longtemps alors que vous n’avez rien fait… et tout cela on peut le faire impunément. Alors réfléchissez-y à deux fois avant d’aller manifester ou formuler une opinion dissidente.>>

A Tarnac et ailleurs, le message à été reçu 5/5. Merci Alain Bauer !

Tarnac : la défense dénonce « un scandale d’Etat »
[Isabelle Mandraud et Caroline Monnot – LE MONDE | 26.11.09]
Changement de ton, changement de stratégie, changement d’avocats. Un an après l’interpellation et la mise en examen de neuf personnes dans l’affaire des sabotages de voies SNCF, leurs conseils ont décidé à leur tour de se muer en accusateurs. Et de cogner fort. « On est au-delà du fiasco judiciaire, on est dans le scandale d’Etat », a lancé, mercredi 25 novembre, Me William Bourdon.Les neuf de Tarnac ont voulu et ont joué un rôle actif dans cette stratégie plus agressive. Les avocats se sont ainsi relayés lors d’une conférence de presse, dans les locaux de l’Assemblée nationale, en présence de plusieurs élus de gauche dont le Vert Noël Mamère et les socialistes François Hollande et André Vallini. « Le gouvernement a pris la responsabilité d’ordonner des enquêtes en incitant les policiers et les juges à se montrer peu scrupuleux afin de donner consistance à quelque chose qui n’existe pas », a affirmé Me Thierry Lévy. « Les policiers ont inventé, c’est le fruit de leur imagination « , a renchéri son confrère Jérémie Assous.

L’accusation n’est pas mince. « On est dans la présomption très sérieuse de falsification de preuves », a asséné Me« opération qui disqualifie et déshonore gravement la démocratie française« . Les avocats qui réclament dans la foulée un « non-lieu rapide », ont adressé coup sur coup deux notes au juge du pôle antiterroriste Thierry Fragnoli. Dans la première, datée du 29 octobre, ils dénoncent des « incohérences » et des « anomalies » Bourdon, en décrivant une contenues, selon eux, dans le procès-verbal D104 établi par la police de lutte antiterrorisme (SDAT). Ce procès-verbal est relatif à la filature du couple Julien Coupat, Yildune Lévy dans la nuit du 7 au 8 novembre 2008 au cours de laquelle a eu lieu un sabotage sur une caténaire de la ligne TGV Est. Dans la seconde note, du 25 novembre, les avocats réclament l’audition, en leur présence, du témoin sous X…, dont ils estiment que les déclarations fondent, pour l’essentiel, l’incrimination terroriste.

Mercredi, à l’Assemblée, ils ont brocardé le juge d’instruction en dénonçant, son « comportement très inhabituel ». « C’est quelqu’un enfermé dans son bunker, qui refuse tout contact physique et tout dialogue », a affirmé Me Lévy.

Le témoin sous X a-t-il été manipulé ?

L’identité de ce témoin a été rendue publique malgré lui, notamment par les médias. Il s’agit de Jean-Hugues Bourgeois, 30 ans, le chevrier du Teilhet (Puy-de-Dôme) aujourd’hui installé en Loire-Atlantique. Cet éleveur bio avait fait irruption dans l’actualité au printemps 2008 après que dix de ses chèvres avaient été tuées et sa grange incendiée. Il affirmait à l’époque être le destinataire de courriers de menaces de mort. Depuis, il a été mis en examen après qu’une expertise graphologique, contestée par son avocat Jean-Louis Borie, l’a désigné comme l’auteur de ces lettres.

Depuis des semaines, son nom avait commencé à circuler comme le probable témoin sous X… dans l’affaire Tarnac. Le 11 novembre, lorsque TF1 l’interroge en caméra cachée, le visage flouté il dit avoir signé un procès-verbal dont il n’a pas maîtrisé le contenu.

La gendarmerie, qui l’a reçu la première à Riom, certifie que ce témoin s’était présenté « spontanément ». C’est « du spontané qui n’en est pas, rétorque son avocat, Me Borie. Jean-Hugues Bourgeois était sous écoute comme victime dans l’affaire du Teilhet, et ses liens avec Tarnac étaient connus. Il était dans une situation de grande fragilité » Sans être un familier de Julien Coupat et des habitués de Tarnac, à l’exception de l’un d’entre eux, il a fréquenté plusieurs rendez-vous altermondialistes, se situant dans la gauche alternative.

Le dossier judiciaire contient une deuxième déposition de l’agriculteur, sous son nom. S’agissait-il, alors, pour la police, de le protéger en le faisant déposer une seconde fois sous son nom ?

La filature du couple Coupat-Lévy a-t-elle été entachée d’irrégularités ?

Les avocats contestent désormais point par point le minutage de la filature du véhicule dans lequel se trouvaient Julien Coupat et Yildune Lévy à partir de 3 h 50, le 8 novembre, nuit du sabotage Ils relèvent que les traces de pneumatiques et de semelles analysées par la gendarmerie sur place ne sont pas celles de leurs clients ; ils s’interrogent sur le fait que les policiers n’ont rien vu du sabotage lui-même, ce qu’ils jugent impossible étant donné la configuration de la voie ferrée à Dhuisy. « Ni les suivis, ni les suiveurs n’étaient présents sur les lieux », avance Me Assous.

La police admet qu’il y a peut-être eu « des erreurs techniques » dans le relevé horaire du procès-verbal de filature et continue d’attester de la présence du couple au kilomètre 45, lieu du sabotage. « Notre bonne foi ne peut pas être mise en cause, s’offusque un responsable. Si on avait voulu tricher, on aurait dit qu’on les avait vus saboter, ce qui n’est pas le cas ».

 

Les dépositions très contradictoires d’un agriculteur, ex-témoin sous X…
[LE MONDE | 26.11.09 ]

En l’espace de deux mois, Jean-Hugues Bourgeois a été entendu à deux reprises par les policiers de la sous-direction de la lutte antiterroriste (SDAT), la première fois en tant que témoin sous X…, la seconde sous son identité. Et les deux versions n’ont rien à voir.

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Cet agriculteur de 30 ans, qui résidait alors dans le Puy-de-Dôme, à environ deux heures de route de Tarnac en Corrèze, se serait présenté spontanément à la gendarmerie de Riom. Son premier témoignage est recueilli le 14 novembre 2008 à 9 heures, selon le procès-verbal (PV) établi par la police, soit trois jours après l’interpellation des neuf personnes mises en examen pour association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste. La veille, le juge des libertés et de la détention a donné son autorisation pour lui accorder le statut protecteur de témoin sous X…, qui devient dans le dossier le « témoin 42 ». Il livre alors ses impressions sur Julien Coupat et un « groupe constitué » autour de lui, mais ne dit pas un mot sur les sabotages des lignes SNCF qui leur sont reprochés

« Fantasme collectif »

A propos de Julien Coupat, dépeint comme le « leader charismatique et l’idéologue (qui) tient l’ensemble des membres sous son charme à la façon d’un gourou de secte », il déclare : « A plusieurs reprises, lors de réunions avant 2007, il exprimait le fait que, même si le moment n’était pas encore venu, il pourrait être un jour envisagé d’avoir à tuer car la vie humaine a une valeur inférieure au combat politique ». Selon ce PV, coté D43, les policiers présentent un « album photos » qu’il commente désignant ici un « responsable de la branche des relations sociales » (Benjamin Rousoux, mis en examen), là un « responsable de la branche armée » (Raphaël M., non mis en examen), tout en ajoutant qu’il « croit que cela relève d’un fantasme collectif « . Tout change le 11 décembre 2008, lors de sa deuxième audition à 14 h 30, cette fois sous son identité, dans les locaux de la police judiciaire de Clermont-Ferrand. Là, il parle de Raphaël M. comme d’un ami et d’une communauté répondant « avant tout à un projet de vie en commun se développant sur des activités agricoles, artisanales, commerciales ». « Je les conseillais notamment pour leur élevage de bêtes et leurs récoltes« , souligne-t-il.

Le témoin explique que son numéro de téléphone portable apparaît sur la facturation détaillée de la ferme de Tarnac, car il souhaitait « leur emprunter leur bouc pour la reproduction de (son) élevage » – bouc qu’il dit avoir été cherché « à la fin août 2008 ». Sur ce PV, il refuse de répondre à une interrogation sur le « projet politique » du groupe, car cela relève des « opinions privées de chacun ». Et à la question « les résidents de Tarnac vous ont-ils jamais fait part de projets violents ? », il répond : « Non, jamais. »

On lui présente à nouveau un album de « 38 individus » : il affirme, cette fois, n’en reconnaître que quatre. A propos de Julien Coupat, Jean-Hugues Bourgeois dit : « J’ai un peu de mal à croire qu’il est celui que les autorités présentent comme un terroriste. »

http://www.lemonde.fr/societe/article/2009/11/26/les-depositions-tres-contradictoires-d-un-agriculteur-ex-temoin-sous-x_1272456_3224.html#ens_id=1272079


Villiers-le-Bel, Tarnac… « Fallait pas nous mettre dans la même prison ! », par Maka Kanté et Benjamin Rosoux
[LE MONDE | 23.11.09 ]
Je suis Maka, j’ai 22 ans, je suis en détention préventive depuis le 23 février 2008. Je suis mis en examen pour « tentative d’homicide volontaire sur agents des forces de l’ordre » depuis le grand baroud policier qui avait suivi les émeutes de novembre 2007 à Villiers-le-Bel. Des centaines de jeunes ont affronté la police suite à la mort de deux adolescents, dans une collision avec un véhicule de police.Je suis Benjamin, j’ai 31 ans, je suis sous contrôle judiciaire, mis en examen pour participation à « une association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste » suite aux opérations de police menées sur tout le territoire, notamment à Tarnac, en réaction aux sabotages simultanés de l’alimentation électrique de plusieurs voies TGV en novembre 2008.

Un Blanc. Un Noir. Cité du Val-d’Oise. Petit village de Corrèze. Parents immigrés africains de première génération. Classe moyenne de province. Diplôme universitaire. Déscolarisation précoce. Nos histoires se croisent au hasard d’une désertion des voies tracées pour nous dans le grand cirque de la reproduction sociale. (suite…)


[Solidarité Inculpés – Juin 2009]

La brochure Mauvaises Intentions 2 a été ré-imprimée à des milliers d’exemplaires. N’hésitez surtout pas à la diffuser largement. On peut vous en envoyer plein, il suffit de le demander!

Cette brochure propose une chronologie des arrestations de Janvier 2008, des lettres des camarades inculpés, ainsi que des analyses sur les tactiques policières et judiciaires, l’ADN, la lutte contre les centres de rétention, le sabotage, puis un retour sur les actions de solidarités. Dans ce dossier se trouvent archivés – de manière exhaustive – les textes, analyses, comptes-rendus d’actions glanés sur les sites d’informations « alternatifs », ainsi que les articles policiers de la « grande presse » se rapportant à l’ »outil antiterroriste » et à la « mouvance anarcho-autonome »…

Le dossier « Mauvaises intentions » a été mis en place en juin 2008 à la suite des premières inculpations sous régime antiterroriste de personnes fichées par la police comme « anarcho-autonomes ». Ce dossier constitue le principal relais rassemblant tous les textes écrits par ou pour ces personnes. En novembre 2008, une autre opération « antiterroriste » ciblant la « mouvance anarcho-autonome » a eu lieu : l’affaire dite de Tarnac. Cette affaire ayant pris énormément de place médiatiquement, nous avons cessé au cours du mois de février de répertorier exhaustivement les articles faisant référence à cette affaire.

Un site internet [http://infokiosques.net/mauvaises_intentions] très régulièrement mis à jour permet de se tenir au courant et une adresse mail [solidaritesinculpes@riseup.net] existe, notamment pour s’inscrire à une mailing-list et recevoir directement les dernières infos.

Pour payer l’impression de cette brochure, les frais de déplacements liés au contrôle judiciaire, et de photocopies (tracts,etc…), nous avons besoin d’argent. Pour cela, vous pouvez envoyer un chèque à l’ordre du C.I.C.P. à l’adresse :   Mauvaises Intentions, 21 ter rue Voltaire, 75011 Paris.

http://infokiosques.net/mauvaises_intentions


[DegenereScience, août 2009]

Devant l’évidence de la catastrophe, il y a ceux qui s’indignent et ceux qui prennent acte, ceux qui dénoncent et ceux qui s’organisent. Nous sommes du côté de ceux qui s’organisent. (Anonyme, Appel « L’insurrection qui vient » –  Comité Invisible)

En pratique, le Contre-Net et la TAZ peuvent être considérés comme des fins en soi – mais, en théorie, ils peuvent aussi être perçus comme des formes de lutte pour une réalité différente.  (Hakim Bey, TAZ : zone d’autonomie temporaire, 1991)

I – La contre-culture hacker

Il n’a jamais été question d’être méchants ou destructeurs, même quand nous combattions les contre-vérités diffusées par les média de masse. Nous formions un ensemble de gens bizarres, qui exploraient un univers nouveau et partageaient leurs découvertes avec qui voulait bien l’entendre. Nous étions dangereux.  (Emmanuel Goldstein, The Best of 2600: A Hacker Oddyssey, 2008)

Oui, je suis un criminel. Mon crime est celui de la curiosité. Mon crime est celui de juger les gens par ce qu’ils pensent et disent, pas selon leur apparence. Mon crime est de vous surpasser, quelque chose que vous ne me pardonnerez jamais. (The Mentor, The Conscience of a Hacker, 1986, paru dans le numéro 7 du magazine électronique Phrack)

Les préjugés sur le mouvement hacker sont si profondément ancrés dans l’inconscient collectif qu’ils se suffisent à eux-mêmes. Le grand public oscille entre d’une part l’image terroriste véhiculée par le complexe médiatico-policier, etd’autre part celle d’un explorateur des frontières du cyber-espace transmise par la mauvaise science-fiction. À tel point que très peu connaissent le sens réel du mot hacker, et moins encore ont une vue globale de ce dont il s’agit. (suite…)


[1001 Livres – 24/07/2009]

Titre : Le coup de Tarnac | Auteur : Marcel Gay | Florent Massot | Parution : 21/03/2009 | 180 pages | 130 x 210 x 17 mms mm | ISBN : 9782916546346 | Prix : 14 €
Marcel Gay, journaliste à L’Est républicain, chargé de la rubrique judiciaire nous plonge dans une contre-enquête sur l’affaire de Tarnac. De quoi nous éclairer notre lanterne. Alarmant !

Nos libertés individuelles seraient-elles en danger ?

Le travail d’investigation du journaliste part d’une question toute simple : est-ce qu’il y a vraiment des terroristes en Corrèze ? D’allure générale, sans lire le livre, cette affaire semble étrange. En effet, au cours du récit, on découvre que les preuves ne tiennent pas et qu’elles ne sont donc pas recevables. Donc en aucun, il ne s’agit de terrorisme. A la fin de cette enquête, on reste sans voix sur le fait qu’il n’y a rien de concret à retenir contre Julien Coupat et les autres. Néanmoins, la vie de ces jeunes a tout de même été entachée.

L’enquête aussi sabotée que les lignes TGV ?

Le doute subsiste.

La piste allemande évoquée plus en détail dans le livre est d’après le journaliste une piste qui n’a pas été exploitée en sa totalité. De nombreux faits concordent. Cette affaire a des relents politique où la communication a pris le dessus sur la vérité. Comme par hasard, cela intervient dans un contexte de crise économique et frapper fort sur des questions de sécurité reste un classique. N’arrivant pas à juguler les problèmes économiques du pays et devant de nombreux mouvements de contestation en France (et aussi en Guadeloupe et en Grèce), craignant peut-être des débordements en France, la politique du gouvernement privilégie la sévérité et l’autorité avec les forces de l’ordre. Ex : opération commando pour interpeler en pleine nuit les 9 de Tarnac. Bref, taper fort pour faire de ces jeunes instruits et n’ayant pas la même vision du monde qu’eux, un exemple symbolique de discipline.

Menace sur la liberté d’expression ?

Certainement.
C’est la plus grande réflexion qui viendra au lecteur lors de sa lecture. De nombreux détails et parfois techniques de l’affaire nous démontrent bien les imperfections du système. Ce dernier imparfait conduit la liberté d’expression à être en danger.
Lisez ce livre par curiosité, vous ne serez pas déçu.

http://www.1001-livres.fr/1047-Le%20coup%20de%20Tarnac


A notre avis, cette loi ne fait que régulariser une pratique courante. Certains d’entre nous ont travaillé en intérim dans les back-office d’un opérateur téléphonique et peuvent témoigner que la police lisait systématiquement les SMS envoyés dans certaines zones « sensibles »… et tout particulièrement lors des émeutes de 2005. En matière de surveillance, cela tombe sous le sens.

Et quand on voit comment la « révolution verte » en Iran a été déclenchée et continue à être alimentée par des SMS, on se dit que le contrôle (et la manipulation) de ce moyen de communication est fondamental pour tout état sécuritaire…

Autre remarque judicieuse de la part de Maher, notre expert financier : vous noterez qu’on légitime la pratique en disant que c’est pour lutter contre les barbares. Mais si on peut le faire à Grigny, on peut aussi le faire à Montreuil pour savoir ce qui se trame à la CGT, ou bien pour fliquer le parti qui est dans l’opposition, ou bien pour surveiller un concurrent économique et lui piquer ses affaires (ou bien l’intoxiquer)… bref, méfiez vous de vos SMS/MMS comme vous vous méfiez de vos mails.

Les SMS seront lus pour détecter les bandes violentes

[Guillaume Champeau – Numerama – 01/07/2009]

Christian Estrosi, député-maire de Nice, présente ce mardi à l’Assemblée Nationale sa proposition de loi « renforçant la lutte contre les violences de groupes et la protection des personnes chargées d’une mission de service public ». Le texte qui s’inscrit dans un ensemble législatif sécuritaire veut lutter davantage contre les « bandes violentes » qui, selon l’ancien ministre, se multiplieraient. Il cite ainsi le ministère de l’intérieur, qui assure que 5 000 personnes, la moitié de mineurs, appartiendraient à l’une des 222 bandes connues en France. Deux chiffres dont le ministère ne dit pas comment ils ont été trouvés.

Le texte crée un délit de participation à une bande ayant l’intention de commettre des violences. L’article 1er du texte dispose ainsi que « le fait de participer, en connaissance de cause, à un groupement, même formé de façon temporaire, qui poursuit le but, caractérisé par un ou plusieurs faits matériels, de commettre des violences volontaires contre les personnes ou des destructions ou dégradations de biens, est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende« .

Interrogé par le Parisien, M. Estrosi précise qu’il « ne s’agit aucunement de réprimer le simple fait d’être en groupe avec une « bande de copains » mais de participer à un groupement qui poursuit le but de commettre des violences ou des destructions ou dégradations de biens« .

Problème : comment faire la différence entre un attroupement de copains venus jouer au baseball aux environs de la promenade des Anglais et une réunion d’individus dangereux venus casser des vitrines ?

Pour M. Estrosi, c’est simple. « Le nouvel arsenal permettra d’agir en amont en détectant les intentions« , dit-il. « C’est assez simple lorsque sont brandies des barres de fer. C’est détectable aussi en surveillant les blogs et les sms envoyés par téléphones portables« . Une proposition qui n’est pas explicitement présente dans le projet de loi, mais qui a été confirmée ce matin par le porte-parole du groupe UMP Jean-François Copé, sur RMC.

Si la surveillance des blogs ne pose pas de problème constitutionnel particulier, puisque les blogs sont par nature publics, ça n’est pas le cas des SMS qui relèvent de la correspondance privée. Leur surveillance ne pourra être réalisée que sous le contrôle du juge, et n’est actuellement permise que dans les cas de suspicions les plus graves.

Mise à jour : les députés ont adopté mardi la proposition de loi de Christian Estrosi renforçant « la lutte contre les violences de groupe« . Les débats ont permis d’en savoir plus sur la surveillance des SMS, qui doit permettre de déceler l’intention « violente » des groupements d’individus.

« L’objectif poursuivi par les participants au groupement sera établi à partir de faits matériels, tels que la possession de barres de fer, le port de cagoules ou la publication de déclarations annonçant la commission d’un délit, notamment sur des blogs – les bandes se défient parfois sur Internet – ou par SMS. Ainsi, en début d’année, à Nice – je l’ai vécu personnellement –, des groupes violents se donnaient rendez-vous par SMS, dont disposaient les SDIG, c’est-à-dire les services de renseignement de la police nationale« , a expliqué Eric Ciotti, le rapporteur UMP de la commission des lois.

Ainsi les services départements d’information générale (SDIG), qui ont parmi leurs attributions issues de la fusion de la DST et des RG la surveillance de la jeunesse, ont la possibilité d’intercepter les SMS envoyés par des individus suspectés. A ce titre, « le SMS est un élément matériel qui sera évalué et apprécié par un magistrat comme constitutif d’un fait matériel prouvant l’intention de commettre un délit individuel« , a précisé M. Ciotti.

http://www.numerama.com/magazine/13235-Les-SMS-seront-lus-pour-detecter-les-bandes-violentes.html


Il faut bien désigner quelques « classes dangereuses » à la vindicte du populo, si on veut lui faire avaler la pilule des budgets sécuritaires… et quoi de mieux pour augmenter l’efficacité de la police que de se fabriquer ses propres criminels ?

[Anaëlle Verzaux – Bakchich – 17/07/2009]

La France a peur. Et la traque des anars ultra ne s’arrête pas à Julien Coupat. Trois tagueurs anti-fascistes ont eux aussi fait les frais d’une justice et d’une police en plein revival du terrorisme d’Action directe.

En 2008, la France a peur. Michèle Alliot-Marie, alors ministre de l’Intérieur, met le paquet sur la menace anarcho-autonome. Avec Julien Coupat et son « gang » de Tarnac en ligne de mire. Et autour, de petites affaires Coupat, passées à peu près inaperçues.

Dans la nuit du 22 au 23 mai 2008, alors que l’enquête préliminaire sur les « terroristes » de Tarnac est entamée, Jean, Emilie et Julien, trois anti-fascistes, taguent le mur de l’Asiem (Association immobilière de l’Ecole militaire), dans le 7e arrondissement de Paris, où le Bloc identitaire a prévu de se réunir. L’inscription : « Identitaires, hors de nos vies ! » De quoi faire frémir de terreur flics, militaires et ministère de l’Intérieur. Et il faut croire que la peur les a gagnés en effet. A cause de ce tag malheureux, nos trois anti-fascistes subissent tout un tintouin généralement réservé aux crimes plus graves.

Pour commencer, perquisition au domicile de chacun. Une perquisition originale, d’après Jean qui, professeur d’histoire géographie, exerce dans un lycée de la banlieue nord parisienne et habite la capitale. L’enseignant raconte :

« Un matin, dix policiers sont venus sonner chez moi. L’un d’eux s’est présenté comme étant des Renseignements Généraux (RG). Devant ma femme, Emmanuelle, et mes deux enfants, les policiers ont un peu fouillé la baraque. Ils m’ont demandé où étaient les tracts et les bombes de peinture. J’ai répondu j’en ai pas ici. Ils ont demandé où étaient les armes. J’en avais pas, des armes ! Ils n’ont pas pris l’ordinateur, pensant que c’était une télévision. Bizarre. Ils m’ont demandé où étaient rangés les livres anars. Ils ne trouvaient pas parce que la plupart de nos livres sont écrits en langue étrangère – ma femme est professeur d’allemand. C’était très clair, ils cherchaient des anarcho-autonomes ».

Les policiers repartent, Jean sous le bras. Comme ses amis Emilie et Julien (tous deux étudiants en histoire), Jean est gardé à vue 24 heures. Sa femme Emmanuelle sera interrogée quelques jours plus tard, durant 39 heures. « Sous pression », Emilie avoue des « trucs » qui, dit-elle, « n’ont rien à voir avec la réalité ». Mais pour les flics, c’est clair, la jeune Emilie est manipulée par Jean l’enseignant, et leader du groupe anarcho-autonome.

Garde à vue dans les locaux d’une unité anti-racolage

Sous pression, Emilie ? Il faut dire que les gardes à vue ne se font pas dans un commissariat ordinaire… Mais dans les locaux d’une unité spéciale choc de la police urbaine de proximité, créée en octobre 2003, dans le cadre des lois Sarkozy sur la sécurité. L’USIT (Unité de soutien et d’investigation territoriale), spécialement conçue pour renforcer la lutte contre la prostitution et le racolage. Et qui, depuis peu, s’occupe de toutes les formes de criminalité en réseau (trafic de métaux, etc.).

Dans le cadre de l’enquête policière qui s’ensuit, le père de Jean et le proviseur adjoint du lycée dans lequel Jean enseigne sont convoqués par les flics de l’USIT. Les conversations téléphoniques des trois terroristes supposés sont surveillées et on relève, sur les lieux du « crime », les empreintes ADN et digitales. Au total, un dossier de 600 pages ! Du lourd…

Il faut dire que le tag tombe au mauvais moment. Quelques mois seulement après le début de l’enquête sur Tarnac et la déclaration, dans les colonnes du Monde, de Michèle Alliot-Marie, encore ministre de l’Intérieur, sur les dangers de l’ultra : « L’affaiblissement à droite comme à gauche des partis politiques qui permettent d’exprimer les frustrations sociales se traduit, l’histoire de France et de ses voisins le montre, par l’apparition de mouvements radicaux et violents » . Une déclaration que ne reniera pas Rachida Dati qui, le 3 juin 2008, adressait une petite note aux procureurs de France, afin d’attirer l’attention sur « la multiplication d’actions violentes (…) susceptibles d’être attribuées à la mouvance anarcho-autonome ».

Le ridicule ne tue pas, mais l’amende peut être salée

En plus de l’enquête menée par l’USIT, le petit groupe de tagueurs est sous le coup d’une enquête judiciaire. A cause de la plainte, déposée par l’Asiem (l’Association immobilière de l’Ecole militaire), pour « dégradation ou détérioration de bien par inscription ou dessin sur le territoire national ».

Le procès, qui s’est tenu mercredi 1er juillet, inspirait bien plus le ridicule que la crainte de voir ressurgir Action Directe. Le ridicule de voir à quel point la vingtaine de jeunes du réseau No Pasaran, venus soutenir leurs amis, ne ressemblent pas aux terroristes de Michèle Alliot-Marie. S’ils luttent « contre le système capitaliste », le « fascisme » et « l’extrême droite » de façon « radicale », c’est toujours « sans violence ». Le ridicule, aussi, de voir le hiatus entre l’épaisseur de l’enquête et le verdict, presque mesquin : 250 euros d’amende par personne.

http://www.bakchich.info/Un-air-de-petit-Tarnac,08232.html


[Gregor Seither – IES News Service – Juin 2009  ]

La semaine dernière, notre collègue Brendon Boshell de  « Making The Web » a fait une démonstration de page espion dans laquelle il récupérait à leur insu l’historique Web des visiteurs de son site. Cet exploit a suscité pas mal de commentaires, plein de gens disant qu’il suffisait d’être équipé de NoScript, pour bloquer cette tentative d’espionnage. Il revient donc cette semaine avec une version qui fonctionne même si vous avez activé NoScript. Si vous n’avez pas été choqué par sa démonstration antérieure, celle-ci devrait vous choquer.

Cliquez simplement sur « Start Scan » et regardez la liste des sites que vous avez visités s’afficher. Et encore, Brendon ne vous montre que le minimum, il pourrait pousser la chose plus loin et vous dire exactement ce que vous êtes allé regarder sur ces sites : autrement dit, si vous aimez les brunes ou les blondes, les petits nichons ou les gros lolos, les petits garçons ou les nymphettes…

La technique est des plus simples — plus simple encore que la version Javascript. Lors de l’accès à la page, une Iframe cachée charge une autre page qui contient un certain nombre de liens. Si un lien est visité, une image de fond (qui n’est pas vraiment une image de fond) est chargée, conformément au CSS. Cette « image de fond » enregistre les informations, les stocke (et, sur la page de Brendon, vous les affiche dans le champ log).

Normalement, ceci devrait vous mettre mal à l’aise : les sites Web que vous visitez au cours de votre journée ne sont pas censés connaître toutes ces informations sur vous. Cette fonction a le potentiel de permettre à quiconque, et particulièrement les publicitaires ou les agences gouvernementales, de vous pister et d’établir un profil à votre insu.

Si vous vous baladez sur les forums des saboteurs de caténaires et qu’ensuite vous allez sur un site gouvernemental, la police risque de venir défoncer votre porte peu de temps après…

http://www.making-the-web.com/misc/sites-you-visit/nojs/


Sous Giscard déjà, le service d’ordre du PC avait coinçé des flics qui se faisaient passer pour des casseurs dans une manif. Le soir, Georges Marchais passait à la télévision et avait exhibé les cartes de police confisquées à ces « manifestants »…

Quand à Rostock, lors des manifs du G8, les flics déguisés en « black block » étaient partout… quand on regarde les photos, on retrouve toujours les mêmes, aux différents points chauds…

Méfiez vous des excités dans les manifs, c’est probablement un « pousse-au-crime » payé par la police. Dotez vous d’un bon service d’ordre, organisez vous… et faites comme vos grand(es) frères/soeurs trotskos dans les années 1970. Un flic en civil on l’entoure gentiment sans qu’il se doute de rien… et on lui balance un grand coup de poing américain dans les dents, ni vu, ni connu.

Ou bien faites comme les anars de Zurich Hambourg. Ils ont des pancartes fléchées avec « Flic en civil » marqué dessus, et quand ils repèrent un agent provocateur, ils l’entourent avec leur pancartes…

Zivis[Le Canard Enchainé, 6 mai 2009]
Fin de manif du 1er mai. Il est un peu plus de 20 heures, place de la Bastille à Paris. A gauche de l’Opéra, un groupe de jeunes punks zone sur les marches. Des gendarmes mobiles ont pour consigne de les déloger, afin d’éviter les embrasements de fin de cortège.

Soudain, une demi-douzaine d’encapuchonnés, baskets aux pieds, crânes rasés et bardés d’autocollants  » Casse-toi pauv’con  » ou  » Rêve générale « , volent au secours de leurs camarades zonards.

Certains ont le visage masqué. Ils invectivent les gendarmes, les provoquent, prennent le reste de la foule à témoin… La tension monte, des projectiles volent. Forcément, ni une ni deux, les bleus embarquent tout ce beau monde, comme pris dans une souricière.

Tout, sauf la demi-douzaine de provocateurs qui réussissent à s’évaporer. Et pour cause : ils sont de la maison poulaga…

Casseurs anticasseurs
Une heure plus tôt, une trentaine de ces « chauffeurs » de manifs sortaient, deux par deux, de fourgons de police stationnés boulevards Richard-Lenoir, comme en témoignent des photographies dont « Le Canard » dispose.

La préfecture de police ne nie pas leur existence. Difficile : de mémoire de manifestants, il y a toujours eu des flics en civil dans les cortèges. Et toujours, également, des  » pousse-au-délit « . Mais, cette fois, ils ont été pistés depuis leur car jusqu’à leurs exploits sur le terrain.

Ces faux manifestants font partie d’une  » compagnie de sécurisation « . Elle a été créée, officiellement en 2005, par Sarko, inventeur du  » provoquer plus pour coffrer plus « , à l’issue des manifs de lycéens opposés au projet de loi Fillon, alors ministre de l’Education. Selon la préfecture, il s’agissait de  » protéger les manifestants  » contre les provocateurs, les voleurs, les casseurs, etc.

Depuis, ladite « compagnie » a fait ses preuves dans toutes sortes de manifs, au point qu’il est question d’en créer d’autres ailleurs en France. Ses membres agissent en civil, sans signe distinctif d’appartenance à la police, cherchant « le flag’ « . Voire en le provoquant, comme ce 1er Mai à Paris, puis en désignant aux  » collègues  » les jeunes à interpeller. « C’est plus efficace pour la procédure pénale « , confie au « Canard » un gradé à la Préfecture.

Heureusement, Sarko veille. Le 21 avril, depuis Nice, il a promis une nouvelle loi pour – entre autres joyeusetés – faire la chasse aux  » cagoulé  » dans les manifs et punir de 3 années de ballon la simple  » appartenance à une bande  » Y compris les bandes de provocateurs.


[Karl Laske – Libération – 29/05/2009]

Perquisitions, confidences de ses proches… La police s’est focalisée sur Julien Coupat. Sans obtenir de preuves.

«Julien, il croit à la révolution. Qu’est-ce que tu veux que je te dise ? Qu’est-ce qu’on peut faire ? On a chacun notre petite croix…» C’est ce que confiait la mère de Julien Coupat à une amie, en août. Ses paroles figurent au dossier d’instruction de l’affaire des sabotages des lignes TGV. Confidence enregistrée et retranscrite par un policier attentif, comme dans le film La vie des autres. L’enquête sur Julien Coupat regorge de ces intrusions. Tout a commencé en avril 2008. Par un soupçon encore formulé au conditionnel. «Il existerait sur le territoire national une structure clandestine anarcho-autonome entretenant des relations conspiratives à l’étranger et projetant de commettre des actions violentes dans le but de troubler gravement l’ordre public», dénonçait la direction centrale du renseignement intérieure (DCRI). Coupat en était «le leader». Les «bases logistiques» étaient à Tarnac, en Corrèze, là où Coupat et ses amis avaient acheté en 2005, avec l’aide de leurs parents, le domaine agricole du Goutailloux. «Il y avait de la remise en état de bâtiments et des terres agricoles qui étaient à l’abandon, explique à la police Benjamin Rosoux, chargé de l’épicerie. A l’été 2008, nous avons fait dessoucher mécaniquement 4 hectares de terres, une ancienne plantation de sapins. Il fallait des petites mains pour dépierrer ces terres avant d’y planter du seigle.»

Le témoin «42». A l’été 2008 justement, la sous-direction antiterroriste était déjà à pied d’œuvre autour de la «base logistique». Des photos sont prises au téléobjectif. Et deux caméras, installées dans les arbres, filment les allées et venues dans les chemins. Des visages s’impriment. Les policiers veulent donner consistance à la «structure clandestine» qu’on leur a dénoncée. Jusqu’au 11 novembre, ils ne trouvent rien, hormis la participation de Coupat à deux manifestations, l’une à Paris, contre le fichier Edvige, l’autre à Vichy, contre le sommet européen sur l’immigration. Mais ils suivent Coupat et son amie Yildune Lévy à proximité d’une voie de TGV, sabotée dans la nuit du 7 au 8 novembre.

Au plus haut niveau du ministère de l’Intérieur, la décision est prise d’opérer en grand. Michèle Alliot-Marie annonce elle-même le raid policier sur le Goutailloux. Mais là encore, aucun élément matériel probant. Pas l’ombre d’une arme, pas même un plan d’action. En garde à vue, Julien Coupat, 34 ans, diplômé d’école de commerce, l’Essec, devenu doctorant en histoire de la pensée, ne lâche que quelques mots : «Je récuse ce type de procédure d’exception tant policière que judiciaire dont l’antiterrorisme est le paravent. C’est dans sa nature même d’avoir déjà répondu aux questions.» Il refuse d’en dire plus.

A côté, Yildune Lévy, 25 ans, ne parle pas beaucoup plus. «Je ne comprends pas ce qui m’est reproché, ni même la qualification terroriste des faits.» Puis elle dit seulement : «Pas mentir, pas semblant.» Elle demande à dormir. Questionnée sur sa relation avec Julien Coupat, elle répond : «Couleur.» Unique élément retrouvé dans l’ordinateur d’Yildune, une recette de fabrication d’explosifs, comme on en trouve sur Internet. Le couple est mis en examen et écroué, avec sept autres jeunes de Tarnac, pour «association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste».

Pour muscler le dossier, déjà fragile, les policiers antiterroristes introduisent un témoin sous X, «42». L’anonyme assure que Julien Coupat, qui a animé la revue Tiqqun,«souhaite le renversement de l’Etat». Il aurait constitué autour de lui un groupe dénommé Comité invisible sous section du parti imaginaire, auteur collectif du livre l’Insurrection qui vient.«Les plus proches de Coupat se réunissent à la ferme de Goutailloux afin d’expérimenter une logique de territoire, c’est-à-dire la pseudo-acquisition de savoir-faire agricoles et artisanaux», assure «42». Le témoin mentionne un autre texte collectif, L’appel, issu de plusieurs réseaux, qui préfigure, selon lui, l’Insurrection. «Au cours de l’été 2007, une réunion de l’ensemble du réseau, 45 personnes environ, a lieu à la ferme. L’Insurrection qui vient est finalisée. A partir de là, le groupe constitué autour de Julien Coupat s’est complètement refermé sur lui-même.» C’est donc le témoin «42» qui oriente l’enquête judiciaire sur le livre. Le groupe des jeunes intellectuels néosituationnistes (lire page 4) de Tiqqun est un peu connu. Dans un entretien à la revue Vacarme, le philosophe Giorgio Agamben, définit Tiqqun comme «une revue extrêmement critique, très politique, qui prend un ton très messianique, mais toujours de manière complètement profane». S’ils nourrissent une pensée antipouvoirs, Coupat et ses amis ne sont pas clandestins. Ni vraiment marginaux. Julien Coupat reçoit chaque mois 1 000 euros d’une société immobilière de son père, qui lui prête appartement et voiture.

«Support idéologique». Reste le livre. L’Insurrection qui vient est en librairie. «Il y est ouvertement fait l’apologie des modes de sabotages propres à finaliser la chute de l’Etat, relèvent les policiers. Sont citées les lignes TGV.» Benjamin Rosoux dit aux policiers que ce livre est «une espèce de portrait de la société actuelle» et que Tiqqun publie des ouvrages de «philosophie critique». Le juge, Thierry Fragnoli, télécharge l’Insurrection sur le site des éditions La Fabrique et le verse au dossier. Aux policiers d’identifier l’auteur. «D’après ce que j’en sais c’est un ouvrage collectif, leur répond Rosoux. Aucun auteur n’a voulu le revendiquer, parce que la pensée, c’est collectif.» Devant le juge, Coupat transforme en alibi l’omniprésence des policiers en filature derrière sa voiture, la nuit des sabotages. «Ce ne serait qu’une suite de malheureux hasards ?» ironise le juge. «C’est une hypothèse qui est battue en brèche par le fait que ces actions ont été revendiquées [en Allemagne, ndlr]», répond Coupat. «Qui est l’auteur principal de l’Insurrection qui vient insiste le juge. «Je ne suis pas l’auteur de ce livre», répond le militant. Le magistrat imagine une concordance de dates entre les épisodes révolutionnaires mentionnés dans le livre avec celle de l’action sur les caténaires. «Construction intellectuelle !» rétorque Coupat. Fragnoli voit dans l’Insurrection«le support idéologique justifiant des actes de sabotage ou de violences pouvant s’assimiler à de l’intimidation».«Il me paraît inenvisageable de parler d’idées dans le cadre d’une procédure antiterroriste», tranche Coupat. «Il n’y a pas d’ »affaire de Tarnac » pas plus que d’ »affaire Coupat », ou d’ »affaire Hazan » [l’éditeur de l’Insurrection]», a-t-il dit au Monde, mardi.

http://www.liberation.fr/societe/0101570045-le-leader-de-tarnac-au-centre-de-l-enquete?xtor=EPR-450206


Alain Bauer a raison ! A la lecture de ce texte excellent, on peut comprendre pourquoi Coupat est en prison. Ce mec est dangereux, chacune de ces idées est mille fois plus « terroriste » qu’un crampon de caténaire. Un esprit pareil, on l’embastille…et on le fait taire.

Ca ne m’étonnerait pas que, sous l’effet des psychotropes qu’on lui fourge en cachette dans sa gamelle, le « gourou de Tarnac » soit retrouvé un jour, pendu par la ceinture de son peignoir, dans sa cellule… le pouvoir  a toujours su identifier les véritables terroristes et les éliminer. On connait cela au moins depuis 1793…

Julien Coupat : « La prolongation de ma détention est une petite vengeance »
[Propos recueillis par Isabelle Mandraud et Caroline Monnot – LE MONDE | 25.05.09]
Voici les réponses aux questions que nous avons posées par écrit à Julien Coupat. Mis en examen le 15 novembre 2008 pour « terrorisme » avec huit autres personnes interpellées à Tarnac (Corrèze) et à Paris, il est soupçonné d’avoir saboté des caténaires SNCF. Il est le dernier à être toujours incarcéré. Pour des raisons de place, Le Monde a coupé une question et sa réponse dans la version imprimée, mais publie l’intégralité de l’entretien sur lemonde.fr. M. Coupat a demandé à ce que certains mots soient en italiques.

Comment vivez-vous votre détention ?

Très bien merci. Tractions, course à pied, lecture.

Pouvez-nous nous rappeler les circonstances de votre arrestation ?

Une bande de jeunes cagoulés et armés jusqu’aux dents s’est introduite chez nous par effraction. Ils nous ont menacés, menottés, et emmenés non sans avoir préalablement tout fracassé. Ils nous ont enlevés à bord de puissants bolides roulant à plus de 170 km/h en moyenne sur les autoroutes. Dans leurs conversations, revenait souvent un certain M. Marion [ancien patron de la police antiterroriste] dont les exploits virils les amusaient beaucoup comme celui consistant à gifler dans la bonne humeur un de ses collègues au beau milieu d’un pot de départ. Ils nous ont séquestrés pendant quatre jours dans une de leurs « prisons du peuple » en nous assommant de questions où l’absurde le disputait à l’obscène.

Celui qui semblait être le cerveau de l’opération s’excusait vaguement de tout ce cirque expliquant que c’était de la faute des « services », là-haut, où s’agitaient toutes sortes de gens qui nous en voulaient beaucoup. A ce jour, mes ravisseurs courent toujours. Certains faits divers récents attesteraient même qu’ils continuent de sévir en toute impunité.

Les sabotages sur les caténaires SNCF en France ont été revendiqués en Allemagne. Qu’en dites-vous?

Au moment de notre arrestation, la police française est déjà en possession du communiqué qui revendique, outre les sabotages qu’elle voudrait nous attribuer, d’autres attaques survenues simultanément en Allemagne. Ce tract présente de nombreux inconvénients : il est posté depuis Hanovre, rédigé en allemand et envoyé à des journaux d’outre-Rhin exclusivement, mais surtout il ne cadre pas avec la fable médiatique sur notre compte, celle du petit noyau de fanatiques portant l’attaque au cœur de l’Etat en accrochant trois bouts de fer sur des caténaires. On aura, dès lors, bien soin de ne pas trop mentionner ce communiqué, ni dans la procédure, ni dans le mensonge public.

Il est vrai que le sabotage des lignes de train y perd beaucoup de son aura de mystère : il s’agissait simplement de protester contre le transport vers l’Allemagne par voie ferroviaire de déchets nucléaires ultraradioactifs et de dénoncer au passage la grande arnaque de « la crise ». Le communiqué se conclut par un très SNCF « nous remercions les voyageurs des trains concernés de leur compréhension ». Quel tact, tout de même, chez ces « terroristes »!

Vous reconnaissez-vous dans les qualifications de « mouvance anarcho-autonome » et d' »ultragauche »?

Laissez-moi reprendre d’un peu haut. Nous vivons actuellement, en France, la fin d’une période de gel historique dont l’acte fondateur fut l’accord passé entre gaullistes et staliniens en 1945 pour désarmer le peuple sous prétexte d' »éviter une guerre civile ». Les termes de ce pacte pourraient se formuler ainsi pour faire vite : tandis que la droite renonçait à ses accents ouvertement fascistes, la gauche abandonnait entre soi toute perspective sérieuse de révolution. L’avantage dont joue et jouit, depuis quatre ans, la clique sarkozyste, est d’avoir pris l’initiative, unilatéralement, de rompre ce pacte en renouant « sans complexe » avec les classiques de la réaction pure – sur les fous, la religion, l’Occident, l’Afrique, le travail, l’histoire de France, ou l’identité nationale.

Face à ce pouvoir en guerre qui ose penser stratégiquement et partager le monde en amis, ennemis et quantités négligeables, la gauche reste tétanisée. Elle est trop lâche, trop compromise, et pour tout dire, trop discréditée pour opposer la moindre résistance à un pouvoir qu’elle n’ose pas, elle, traiter en ennemi et qui lui ravit un à un les plus malins d’entre ses éléments. Quant à l’extrême gauche à-la-Besancenot, quels que soient ses scores électoraux, et même sortie de l’état groupusculaire où elle végète depuis toujours, elle n’a pas de perspective plus désirable à offrir que la grisaille soviétique à peine retouchée sur Photoshop. Son destin est de décevoir.

Dans la sphère de la représentation politique, le pouvoir en place n’a donc rien à craindre, de personne. Et ce ne sont certainement pas les bureaucraties syndicales, plus vendues que jamais, qui vont l’importuner, elles qui depuis deux ans dansent avec le gouvernement un ballet si obscène. Dans ces conditions, la seule force qui soit à même de faire pièce au gang sarkozyste, son seul ennemi réel dans ce pays, c’est la rue, la rue et ses vieux penchants révolutionnaires. Elle seule, en fait, dans les émeutes qui ont suivi le second tour du rituel plébiscitaire de mai 2007, a su se hisser un instant à la hauteur de la situation. Elle seule, aux Antilles ou dans les récentes occupations d’entreprises ou de facs, a su faire entendre une autre parole.

Cette analyse sommaire du théâtre des opérations a dû s’imposer assez tôt puisque les renseignements généraux faisaient paraître dès juin 2007, sous la plume de journalistes aux ordres (et notamment dans Le Monde) les premiers articles dévoilant le terrible péril que feraient peser sur toute vie sociale les « anarcho-autonomes ». On leur prêtait, pour commencer, l’organisation des émeutes spontanées, qui ont, dans tant de villes, salué le « triomphe électoral » du nouveau président.

Avec cette fable des « anarcho-autonomes », on a dessiné le profil de la menace auquel la ministre de l’intérieur s’est docilement employée, d’arrestations ciblées en rafles médiatiques, à donner un peu de chair et quelques visages. Quand on ne parvient plus à contenir ce qui déborde, on peut encore lui assigner une case et l’y incarcérer. Or celle de « casseur » où se croisent désormais pêle-mêle les ouvriers de Clairoix, les gamins de cités, les étudiants bloqueurs et les manifestants des contre-sommets, certes toujours efficace dans la gestion courante de la pacification sociale, permet de criminaliser des actes, non des existences. Et il est bien dans l’intention du nouveau pouvoir de s’attaquer à l’ennemi, en tant que tel, sans attendre qu’il s’exprime. Telle est la vocation des nouvelles catégories de la répression.

Il importe peu, finalement, qu’il ne se trouve personne en France pour se reconnaître « anarcho-autonome » ni que l’ultra-gauche soit un courant politique qui eut son heure de gloire dans les années 1920 et qui n’a, par la suite, jamais produit autre chose que d’inoffensifs volumes de marxologie. Au reste, la récente fortune du terme « ultragauche » qui a permis à certains journalistes pressés de cataloguer sans coup férir les émeutiers grecs de décembre dernier doit beaucoup au fait que nul ne sache ce que fut l’ultragauche, ni même qu’elle ait jamais existé.

A ce point, et en prévision des débordements qui ne peuvent que se systématiser face aux provocations d’une oligarchie mondiale et française aux abois, l’utilité policière de ces catégories ne devrait bientôt plus souffrir de débats. On ne saurait prédire, cependant, lequel d' »anarcho-autonome » ou d' »ultragauche » emportera finalement les faveurs du Spectacle, afin de reléguer dans l’inexplicable une révolte que tout justifie.

La police vous considère comme le chef d’un groupe sur le point de basculer dans le terrorisme. Qu’en pensez-vous?

Une si pathétique allégation ne peut être le fait que d’un régime sur le point de basculer dans le néant.

Que signifie pour vous le mot terrorisme?

Rien ne permet d’expliquer que le département du renseignement et de la sécurité algérien suspecté d’avoir orchestré, au su de la DST, la vague d’attentats de 1995 ne soit pas classé parmi les organisations terroristes internationales. Rien ne permet d’expliquer non plus la soudaine transmutation du « terroriste » en héros à la Libération, en partenaire fréquentable pour les accords d’Evian, en policier irakien ou en « taliban modéré » de nos jours, au gré des derniers revirements de la doctrine stratégique américaine.

Rien, sinon la souveraineté. Est souverain, en ce monde, qui désigne le terroriste. Qui refuse d’avoir part à cette souveraineté se gardera bien de répondre à votre question. Qui en convoitera quelques miettes s’exécutera avec promptitude. Qui n’étouffe pas de mauvaise foi trouvera un peu instructif le cas de ces deux ex – « terroristes » devenus l’un premier ministre d’Israël, l’autre président de l’Autorité palestinienne, et ayant tous deux reçus, pour comble, le Prix Nobel de la paix.

Le flou qui entoure la qualification de « terrorisme », l’impossibilité manifeste de le définir ne tiennent pas à quelque provisoire lacune de la législation française : ils sont au principe de cette chose que l’on peut, elle, très bien définir : l’antiterrorisme dont ils forment plutôt la condition de fonctionnement. L’antiterrorisme est une technique de gouvernement qui plonge ses racines dans le vieil art de la contre-insurrection, de la guerre dite « psychologique », pour rester poli.

L’antiterrorisme, contrairement à ce que voudrait insinuer le terme, n’est pas un moyen de lutter contre le terrorisme, c’est la méthode par quoi l’on produit, positivement, l’ennemi politique en tant que terroriste. Il s’agit, par tout un luxe de provocations, d’infiltrations, de surveillance, d’intimidation et de propagande, par toute une science de la manipulation médiatique, de l' »action psychologique », de la fabrication de preuves et de crimes, par la fusion aussi du policier et du judiciaire, d’anéantir la « menace subversive » en associant, au sein de la population, l’ennemi intérieur, l’ennemi politique à l’affect de la terreur.

L’essentiel, dans la guerre moderne, est cette « bataille des cœurs et des esprits » où tous les coups sont permis. Le procédé élémentaire, ici, est invariable : individuer l’ennemi afin de le couper du peuple et de la raison commune, l’exposer sous les atours du monstre, le diffamer, l’humilier publiquement, inciter les plus vils à l’accabler de leurs crachats, les encourager à la haine. « La loi doit être utilisée comme simplement une autre arme dans l’arsenal du gouvernement et dans ce cas ne représente rien de plus qu’une couverture de propagande pour se débarrasser de membres indésirables du public. Pour la meilleure efficacité, il conviendra que les activités des services judiciaires soient liées à l’effort de guerre de la façon la plus discrète possible », conseillait déjà, en 1971, le brigadier Frank Kitson [ancien général de l’armée britannique, théoricien de la guerre contre-insurrectionelle], qui en savait quelque chose.

Une fois n’est pas coutume, dans notre cas, l’antiterrorisme a fait un four. On n’est pas prêt, en France, à se laisser terroriser par nous. La prolongation de ma détention pour une durée « raisonnable » est une petite vengeance bien compréhensible au vu des moyens mobilisés, et de la profondeur de l’échec; comme est compréhensible l’acharnement un peu mesquin des « services », depuis le 11 novembre, à nous prêter par voie de presse les méfaits les plus fantasques, ou à filocher le moindre de nos camarades. Combien cette logique de représailles a d’emprise sur l’institution policière, et sur le petit cœur des juges, voilà ce qu’auront eu le mérite de révéler, ces derniers temps, les arrestations cadencées des « proches de Julien Coupat ».

Il faut dire que certains jouent, dans cette affaire, un pan entier de leur lamentable carrière, comme Alain Bauer [criminologue], d’autres le lancement de leurs nouveaux services, comme le pauvre M. Squarcini [directeur central du renseignement intérieur], d’autres encore la crédibilité qu’ils n’ont jamais eue et qu’ils n’auront jamais, comme Michèle Alliot-Marie.

Vous êtes issu d’un milieu très aisé qui aurait pu vous orienter dans une autre direction…

« Il y a de la plèbe dans toutes les classes » (Hegel).

Pourquoi Tarnac?

Allez-y, vous comprendrez. Si vous ne comprenez pas, nul ne pourra vous l’expliquer, je le crains.

Vous définissez-vous comme un intellectuel? Un philosophe ?

La philosophie naît comme deuil bavard de la sagesse originaire. Platon entend déjà la parole d’Héraclite comme échappée d’un monde révolu. A l’heure de l’intellectualité diffuse, on ne voit pas ce qui pourrait spécifier « l’intellectuel », sinon l’étendue du fossé qui sépare, chez lui, la faculté de penser de l’aptitude à vivre. Tristes titres, en vérité, que cela. Mais, pour qui, au juste, faudrait-il se définir?

Etes-vous l’auteur du livre L’insurrection qui vient ?

C’est l’aspect le plus formidable de cette procédure : un livre versé intégralement au dossier d’instruction, des interrogatoires où l’on essaie de vous faire dire que vous vivez comme il est écrit dans L’insurrection qui vient, que vous manifestez comme le préconise L’insurrection qui vient, que vous sabotez des lignes de train pour commémorer le coup d’Etat bolchevique d’octobre 1917, puisqu’il est mentionné dans L’insurrection qui vient, un éditeur convoqué par les services antiterroristes.

De mémoire française, il ne s’était pas vu depuis bien longtemps que le pouvoir prenne peur à cause d’un livre. On avait plutôt coutume de considérer que, tant que les gauchistes étaient occupés à écrire, au moins ils ne faisaient pas la révolution. Les temps changent, assurément. Le sérieux historique revient.

Ce qui fonde l’accusation de terrorisme, nous concernant, c’est le soupçon de la coïncidence d’une pensée et d’une vie; ce qui fait l’association de malfaiteurs, c’est le soupçon que cette coïncidence ne serait pas laissée à l’héroïsme individuel, mais serait l’objet d’une attention commune. Négativement, cela signifie que l’on ne suspecte aucun de ceux qui signent de leur nom tant de farouches critiques du système en place de mettre en pratique la moindre de leurs fermes résolutions; l’injure est de taille. Malheureusement, je ne suis pas l’auteur de L’insurrection qui vient – et toute cette affaire devrait plutôt achever de nous convaincre du caractère essentiellement policier de la fonction auteur.

J’en suis, en revanche, un lecteur. Le relisant, pas plus tard que la semaine dernière, j’ai mieux compris la hargne hystérique que l’on met, en haut lieu, à en pourchasser les auteurs présumés. Le scandale de ce livre, c’est que tout ce qui y figure est rigoureusement, catastrophiquement vrai, et ne cesse de s’avérer chaque jour un peu plus. Car ce qui s’avère, sous les dehors d’une « crise économique », d’un « effondrement de la confiance », d’un « rejet massif des classes dirigeantes », c’est bien la fin d’une civilisation, l’implosion d’un paradigme : celui du gouvernement, qui réglait tout en Occident – le rapport des êtres à eux-mêmes non moins que l’ordre politique, la religion ou l’organisation des entreprises. Il y a, à tous les échelons du présent, une gigantesque perte de maîtrise à quoi aucun maraboutage policier n’offrira de remède.

Ce n’est pas en nous transperçant de peines de prison, de surveillance tatillonne, de contrôles judiciaires, et d’interdictions de communiquer au motif que nous serions les auteurs de ce constat lucide, que l’on fera s’évanouir ce qui est constaté. Le propre des vérités est d’échapper, à peine énoncées, à ceux qui les formulent. Gouvernants, il ne vous aura servi de rien de nous assigner en justice, tout au contraire.

Vous lisez « Surveiller et punir » de Michel Foucault. Cette analyse vous paraît-elle encore pertinente?

La prison est bien le sale petit secret de la société française, la clé, et non la marge des rapports sociaux les plus présentables. Ce qui se concentre ici en un tout compact, ce n’est pas un tas de barbares ensauvagés comme on se plaît à le faire croire, mais bien l’ensemble des disciplines qui trament, au-dehors, l’existence dite « normale ». Surveillants, cantine, parties de foot dans la cour, emploi du temps, divisions, camaraderie, baston, laideur des architectures : il faut avoir séjourné en prison pour prendre la pleine mesure de ce que l’école, l’innocente école de la République, contient, par exemple, de carcéral.

Envisagée sous cet angle imprenable, ce n’est pas la prison qui serait un repaire pour les ratés de la société, mais la société présente qui fait l’effet d’une prison ratée. La même organisation de la séparation, la même administration de la misère par le shit, la télé, le sport, et le porno règne partout ailleurs avec certes moins de méthode. Pour finir, ces hauts murs ne dérobent aux regards que cette vérité d’une banalité explosive : ce sont des vies et des âmes en tout point semblables qui se traînent de part et d’autre des barbelés et à cause d’eux.

Si l’on traque avec tant d’avidité les témoignages « de l’intérieur » qui exposeraient enfin les secrets que la prison recèle, c’est pour mieux occulter le secret qu’elle est : celui de votre servitude, à vous qui êtes réputés libres tandis que sa menace pèse invisiblement sur chacun de vos gestes.

Toute l’indignation vertueuse qui entoure la noirceur des geôles françaises et leurs suicides à répétition, toute la grossière contre-propagande de l’administration pénitentiaire qui met en scène pour les caméras des matons dévoués au bien-être du détenu et des directeurs de tôle soucieux du « sens de la peine », bref : tout ce débat sur l’horreur de l’incarcération et la nécessaire humanisation de la détention est vieux comme la prison. Il fait même partie de son efficace, permettant de combiner la terreur qu’elle doit inspirer avec son hypocrite statut de châtiment « civilisé ». Le petit système d’espionnage, d’humiliation et de ravage que l’Etat français dispose plus fanatiquement qu’aucun autre en Europe autour du détenu n’est même pas scandaleux. L’Etat le paie chaque jour au centuple dans ses banlieues, et ce n’est de toute évidence qu’un début : la vengeance est l’hygiène de la plèbe.

Mais la plus remarquable imposture du système judiciaro-pénitentiaire consiste certainement à prétendre qu’il serait là pour punir les criminels quand il ne fait que gérer les illégalismes. N’importe quel patron – et pas seulement celui de Total –, n’importe quel président de conseil général – et pas seulement celui des Hauts-de-Seine–, n’importe quel flic sait ce qu’il faut d’illégalismes pour exercer correctement son métier. Le chaos des lois est tel, de nos jours, que l’on fait bien de ne pas trop chercher à les faire respecter et les stups, eux aussi, font bien de seulement réguler le trafic, et non de le réprimer, ce qui serait socialement et politiquement suicidaire.

Le partage ne passe donc pas, comme le voudrait la fiction judiciaire, entre le légal et l’illégal, entre les innocents et les criminels, mais entre les criminels que l’on juge opportun de poursuivre et ceux qu’on laisse en paix comme le requiert la police générale de la société. La race des innocents est éteinte depuis longtemps, et la peine n’est pas à ce à quoi vous condamne la justice : la peine, c’est la justice elle-même, il n’est donc pas question pour mes camarades et moi de « clamer notre innocence », ainsi que la presse s’est rituellement laissée aller à l’écrire, mais de mettre en déroute l’hasardeuse offensive politique que constitue toute cette infecte procédure. Voilà quelques-unes des conclusions auxquelles l’esprit est porté à relire Surveiller et punir depuis la Santé. On ne saurait trop suggérer, au vu de ce que les Foucaliens font, depuis vingt ans, des travaux de Foucault, de les expédier en pension, quelque temps, par ici.

Comment analysez-vous ce qui vous arrive?

Détrompez-vous : ce qui nous arrive, à mes camarades et à moi, vous arrive aussi bien. C’est d’ailleurs, ici, la première mystification du pouvoir : neuf personnes seraient poursuivies dans le cadre d’une procédure judiciaire « d’association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste », et devraient se sentir particulièrement concernées par cette grave accusation. Mais il n’y a pas d’« affaire de Tarnac » pas plus que d' »affaire Coupat », ou d' »affaire Hazan » [éditeur de L’insurrection qui vient]. Ce qu’il y a, c’est une oligarchie vacillante sous tous rapports, et qui devient féroce comme tout pouvoir devient féroce lorsqu’il se sent réellement menacé. Le Prince n’a plus d’autre soutien que la peur qu’il inspire quand sa vue n’excite plus dans le peuple que la haine et le mépris.

Ce qu’il y a, c’est, devant nous, une bifurcation, à la fois historique et métaphysique: soit nous passons d’un paradigme de gouvernement à un paradigme de l’habiter au prix d’une révolte cruelle mais bouleversante, soit nous laissons s’instaurer, à l’échelle planétaire, ce désastre climatisé où coexistent, sous la férule d’une gestion « décomplexée », une élite impériale de citoyens et des masses plébéiennes tenues en marge de tout. Il y a donc, bel et bien, une guerre, une guerre entre les bénéficiaires de la catastrophe et ceux qui se font de la vie une idée moins squelettique. Il ne s’est jamais vu qu’une classe dominante se suicide de bon cœur.

La révolte a des conditions, elle n’a pas de cause. Combien faut-il de ministères de l’Identité nationale, de licenciements à la mode Continental, de rafles de sans-papiers ou d’opposants politiques, de gamins bousillés par la police dans les banlieues, ou de ministres menaçant de priver de diplôme ceux qui osent encore occuper leur fac, pour décider qu’un tel régime, même installé par un plébiscite aux apparences démocratiques, n’a aucun titre à exister et mérite seulement d’être mis à bas ? C’est une affaire de sensibilité.

La servitude est l’intolérable qui peut être infiniment tolérée. Parce que c’est une affaire de sensibilité et que cette sensibilité-là est immédiatement politique (non en ce qu’elle se demande « pour qui vais-je voter ? », mais « mon existence est-elle compatible avec cela ? »), c’est pour le pouvoir une question d’anesthésie à quoi il répond par l’administration de doses sans cesse plus massives de divertissement, de peur et de bêtise. Et là où l’anesthésie n’opère plus, cet ordre qui a réuni contre lui toutes les raisons de se révolter tente de nous en dissuader par une petite terreur ajustée.

Nous ne sommes, mes camarades et moi, qu’une variable de cet ajustement-là. On nous suspecte comme tant d’autres, comme tant de « jeunes », comme tant de « bandes », de nous désolidariser d’un monde qui s’effondre. Sur ce seul point, on ne ment pas. Heureusement, le ramassis d’escrocs, d’imposteurs, d’industriels, de financiers et de filles, toute cette cour de Mazarin sous neuroleptiques, de Louis Napoléon en version Disney, de Fouché du dimanche qui pour l’heure tient le pays, manque du plus élémentaire sens dialectique. Chaque pas qu’ils font vers le contrôle de tout les rapproche de leur perte. Chaque nouvelle « victoire » dont ils se flattent répand un peu plus vastement le désir de les voir à leur tour vaincus. Chaque manœuvre par quoi ils se figurent conforter leur pouvoir achève de le rendre haïssable. En d’autres termes : la situation est excellente. Ce n’est pas le moment de perdre courage.

http://www.lemonde.fr/web/imprimer_element/0,40-0,50-1197456,0.html


une parfaite allégorie de la réaction policière face aux "gauchistes" français

une parfaite allégorie de la réaction policière face aux "gauchistes" français


Pour les plus anciens d’entre vous, cette fabrication d’une menace afin de justifier son existence à un moment de coupes budgétaires a déjà été brillamment racontée par Vladimir Volkoff dans « Le Retournement« . De l’opération « Couleuvrine » à l’opération « Ultragauche », rien n’a change chez les semelles de crèpe…

Mais il est vrai que Volkoff, ayant fondé l’Institut d’études de la Désinformation, savait de quoi il parlait…

Comment la menace terroriste a été créée de toutes pièces pour répondre aux impératifs politiques d’Alliot-Marie et des ex-RG.

[Rue 89 – Antonin Grégoire | Universitaire | 11/05/2009]

Le but d’un service de renseignement est de détecter et d’avertir des menaces que le politique n’a ni le temps ni l’expertise de percevoir. Problème : si le politique est en pleine parano sur l’ultragauche et qu’on lui vend de l’islamiste, il n’en tient pas compte, réduit les budgets, et, le jour où se produit l’attentat qu’on lui avait prédit et qu’il n’a pas voulu entendre, il vire tout le monde pour donner un exemple en pâture à l’opinion publique. Ce phénomène s’appelle la politisation du renseignement.

Il y a deux écoles :

  • Ecole Kennan. Le renseignement doit être totalement séparé du politique. Les services choisissent eux-mêmes ce qui doit être surveillé et sont donc plus performant mais le politique les écoutera beaucoup moins.
  • Ecole Gates. Assumer à fond la politisation du renseignement : beaucoup plus de confiance, mais les services sont obligés de donner parfois corps aux paranos des politiques. C’est le cas de l’affaire Coupat.

La ministre de l’Intérieur a fait une analyse toute seule ! Sa finesse politique lui a montré que le PCF perdait des électeurs et elle en a donc déduit que l’extrême-gauche allait mathématiquement se renforcer. Analyse auto-confirmée en voyant les manifestations anti-CPE au 20 heures de TF1. La ministre évoque alors une « radicalisation ressentie » ça ne s’invente pas.

Un fond de commerce des RG

La ministre fut un peu aidée dans son ressenti, il est vrai, par les RG dont la mouvance anarcho-autonome est le fond de commerce et qui vont bientôt disparaître, avalés par la DST dans la nouvelle DCRI. La menace ultragauche est donc leur seul moyen de survie dans la nouvelle organisation, et pour la ministre, un gros dossier terroriste lui permettant d’exister politiquement. Pourquoi terroriste ? Parce que c’est bien plus prestigieux politiquement que les chiens dangereux.

Durant l’été 2007, la ministre fait donc inscrire l’ultragauche à coté des autres menaces terroristes (islamistes, Corse, ETA…). Et c’est ainsi que la sous-direction antiterroriste de la nouvelle DCRI se voit chargée de la mission ultragauche.

« L’insurrection qui vient » distribuée à la PJ

Et qu’est-ce qu’on a sur l’ultragauche ? Pas grand-chose… Alain Bauer, le criminologue multi emploi de la ministre, pianote un beau matin sur amazon.com et découvre l’existence d’un livre qui fait peur : « L’insurrection qui vient ». Ni une ni deux, il en commande 40 exemplaires et c’est l’ensemble des pontes de la PJ qui se retrouvent avec le livre sur leurs tables de nuit.

On en vient logiquement à chercher l’auteur… et puis on a déjà une fiche sur Coupat mise à jour la dernière fois que les services US ont transmis une info sur lui. Ils font très peur ces gens. Ils n’utilisent pas de téléphone portable, se méfient du fichage et de la police : ils préparent donc un mauvais coup. Historiquement, les ministères de l’Intérieur ont toujours été aussi paranos sur les anarchistes que les anarchistes l’ont été sur les ministères de l’Intérieur.

Juin 2008, soit un an plus tard, MAM recevra un rapport de 41 page : « Du conflit anti-CPE à la constitution d’un réseau préterroriste international : regards sur l’ultragauche française et européenne ». Cas d’école de politisation : le « regard » commence exactement au CPE, là où s’était arrêté la brillante analyse de la ministre. Et puisque tout le monde a lu et relu le livre présumé de Coupat, le rapport taille une large place au groupe de Tarnac.

Pourquoi ces références quasi constantes du ministère à la RAF, à Action Directe voire à 1917 ? Car il n’y a qu’en replaçant systématiquement l’ultragauche actuelle comme étant aux prémisses d’une nouvelle mouvance terroriste que l’on peut justifier de maintenir cette menace dans la sous-direction antiterroriste de la DCRI.

Et les RG ont tellement bien convaincu la ministre que celle-ci saute sur le dossier des sabotages SNCF et envoie tout ce qu’elle a, caméras embarquées dans le grand style Sarko, arrêter ce groupe « préterroriste ».

La ministre n’a aucune notion d’antiterrorisme

En fait, il est vital que l’arrestation de Coupat suive le même chemin que n’importe quel dossier terroriste. Si Coupat n’était pas présenté au juge antiterroriste, gardé à vue 96 heures, mis sur écoutes etc., les ex-RG reviendraient aussi sec aux chiens écrasés dans le prochain budget.

Peu leur importe l’issue de la procédure en vérité, tant que le dossier suit administrativement la voie antiterroriste. La ministre, elle, est obligée de soutenir ses alliés ex-RG, en réalité son seul pied dans la nouvelle DCRI toute entière dirigée par Bernard Squarcini, sarkozyste pur jus qui envoie tous les dossiers importants au vrai patron.

Mais la ministre n’a aucune notion d’antiterrorisme. On ne fait pas de com » sur le terrorisme anarchiste car tous les groupuscules d’extrême gauche d’Europe vont se mobiliser pour « libérer nos camarades » avec plein de bonnes idées d’action fournies par la médiatisation de l’affaire et les références constantes au terrorisme. Autre problème de taille : ce qui se fantasme sur l’ultragauche ne se surveille plus sur les menaces réelles.

Non contente d’augmenter le risque terroriste en détournant les services, la ministre en crée un autre qui n’existait pas à l’origine. C’est la sécurité à la Sarkozy dirons-nous. Le conseil du jour : faites attention à vous. Pas parce que Sarkozy le dit mais précisément parce qu’il ne le fait pas.

http://www.rue89.com/2009/05/11/coupat-lultragauche-et-la-politisation-du-renseignement


La droite de MAM, de Sarkozy et des RG n’est toujours pas sorti des années 1970, quand on traquait le « bitnique » dans les « communautés », repoussoir facile pour le populo. Rien ne manque, pas même la déléctation avec laquelle ces supers-bourgeois livrent à la vindicte les « fils à papa rentiers »… Raymond Marcellin disait exactement la même chose en parlant de Cohn-Bendit ou des agriculteurs du Larzac…

Et comme ils ne savent pas voir que le monde a changé, comme Alain Bauer a besoin d’une grille de lecture pour renforcer encore notre flicage, comme l’Etat a besoin de l’assentiment de la bourgeoisie pour fourbir ses matraques, en prévision de conflits sociaux liés à la crise, comme la finance à besoin de faire passer la pillule du pillage de l’argent des contribuables pour renflouer leurs jeux de bonneteau… alors on va tenter de nous inventer une diversion en ressuscitant la Fraction Armée Rouge.

Les allemands tentent la même chose de leur côté, en traquant l’insurrection sociale derrière le moindre feu de poubelles..

Deux jeunesses françaises : Les révoltés de Tarnac

[Isabelle Monnin – Le Nouvel Observateur – 11/12/2008]

« Nos libertés sont menacées. Nous vivons dans un Etat policier. » Celle qui parle n’est pas exactement une anarcho-auto- nome. Nous ne sommes pas dans un squat, mais dans la belle bibliothèque de sa maison, face au château de Rueil-Malmaison. Il n’y a pas un bruit, un peu de musique classique peut-être. Son sourire est désolé. Son monde déboussolé.

Pour Jocelyne Coupat, cette année, le 11 novembre a eu des airs de 11-Septembre. Ce matin-là, le GIGN investit en nombre le village de Tarnac, en Corrèze, où Julien, son fils, vit avec des amis. Ils sont suspectés d’avoir saboté les caténaires de trois lignes à grande vitesse le week-end précédent. La ministre de l’Intérieur convoque une conférence de presse : «Ces gens ont voulu s’attaquer à la SNCF, car c’est un symbole de l’Etat.» La France découvre qu’elle avait dans ses campagnes des terroristes d’ultragauche.

Un mois après, l’enquête compte de nombreuses zones d’ombre (voir encadré). Et Jocelyne Coupat n’a toujours pas vu son fils. Alors que trois de leurs camarades ont été libérés, Julien Coupat et Yildune Lévy restent en détention provisoire, sans permis de visite pour l’instant. «On veut en faire des Bonnie and Clyde, c est n importe quoi», s emporte Michel Lévy, le père de la jeune fille.

Coupat, Lévy, les deux familles ne se ressemblent guère. Les pères se sont rencontrés pour la première fois au palais de justice. Ils vivent dans des univers différents, pour ne pas dire opposés. Ils s’agacent parfois, «Michel et sa rhétorique», «Gérard et son pragmatisme», mais sont embarqués dans le même bateau : «Nous sommes les vraies victimes de l’antiterrorisme», résume Michel Lévy.

Lui a eu 20 ans en 1968. Il était enfant du 20e arrondissement, fils de communistes, il est devenu vincennois, de là où la philo, la socio, la psycho refaisaient chaque jour le monde. Quand «Dany» (Cohn-Bendit) fut bouté hors de France, il repassa avec lui la frontière à pied, clandestinement. Le vent de 68 s’est essoufflé; Michel et quelques amis («le réseau, mais faut pas en parler») ont continué. Philosophie, radios libres, production de spectacles, voyages en Afrique, le voilà sexagénaire flâneur, clope et café cognac, refusant la course à l’efficacité, allergique «à la dictature de la vitesse» et admiratif de Yildune, «ma fille aînée, ma favorite, je n’en ai qu’une». Elle a 25 ans. Elle est née avec l’abolition de la peine de mort, a eu 18 ans avec le 11 septembre 2001 et, comme pre mier choix électoral, un duel Le Pen-Chirac. «Le siècle a commencé dans la terreur et la confusion», dit son père. Etudiante en archéologie, «vive et passionnée», selon ses professeurs, Yildune ne se satisfait pas du monde post-11-Septembre. Sans-papiers, CPE, fichier Edvige, mal-logement, elle s’interroge, elle conteste. Elle rencontre Julien Coupat. Il est plus âgé qu’elle, 34 ans. Comme la jeune fille, il aime les livres et les débats. Comme elle, il croit que l’on peut transformer la réalité. A condition de s’en décaler.

Julien Coupat est décrit par tous comme un type brillant. Mais il refuse de mettre son brio au service du «système». Fils unique de deux médecins ayant fait carrière dans l’industrie pharmaceutique, il a bénéficié de la meilleure éducation. «Il était doué et nous avions le culte des études», raconte son père Gérard, fils d’un militaire d’Algérie. Julien fait son lycée dans le privé à Passy-Buzenval puis une prépa à «Ginette». Helléniste, latiniste, il parle six langues. Chaque samedi, une bibliothécaire anime un club de lecture à la maison. La famille voyage, «nous voulions qu’il soit ouvert au monde». Julien grandit, un peu solitaire, toujours le nez dans un bouquin. «Il était le premier partout, il pouvait faire Normale sup comme Polytechnique. Nous avons tranché la poire au milieu» : ce sera une école de commerce, l’Essec, la dernière chose que ses parents lui imposent. Il ne leur a pas encore expliqué qu’il ne supporte pas l’idée même de carrière. Il s’inscrit à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences sociales, décortique Guy Debord, croise Toni Negri et Giorgio Agamben et se lie avec Luc Boltanski. Devenu «post-situ», il forge sa conviction : «Il m’a dit qu’il était profondément communiste», raconte son père. Pas vraiment le genre de la maison qui oscille entre Modem et UMP, mais l’amour parental ne se mesure pas au bulletin de vote. D’ailleurs Julien ne vote pas.

L’écrivain Jean Carrière, avec qui, adolescent, il faisait de longues et âpres randonnées sur le mont Aigoual, disait de Julien qu’il était «un mutant». Un mutant qui veut faire de la recherche, mais refuse de passer l’agrégation pour n’obéir qu’à son intuition. Il crée avec des amis «Tiqqun», revue «du parti imaginaire».

En 2004, il passe à l’application concrète de ses idées et imagine avec des amis le projet du Goutailloux, cette ferme du plateau de Millevaches où ils réinventent une autre façon de vivre ensemble. Chaque décision est prise collectivement. Il y a là des écolos, comme Benjamin Rosoux (également mis en examen pour les sabotages), diplômé de Sciences po et de sociologie rurale. «J’y suis allé plusieurs fois pour les former à la faune et la flore, dit son père, biologiste. Ils vivent le développement durable grandeur nature. Entre la ferme pédagogique, l’épicerie-restaurant et leurs animations culturelles, c’est tout sauf une base arrière d’endoctrinement ! Ce sont juste des gens qui ont de la suite dans les idées.»

Il y a des enfants aussi, qui, comme dans les sociétés africaines, sont sous la responsabilité de tous les adultes. «Ils considèrent que la famille nucléaire traditionnelle n’est pas un modèle en soi, raconte Gérard Coupat. Ma petite-fille a par exemple plusieurs «pères adoptifs» qui veillent sur elle comme sur leurs propres enfants.» Régulièrement, les jeunes de Tarnac organisent des veillées avec les gens du plateau.Ils rendent visite à José, 80 ans, vétéran républicain espagnol à qui ils rêvent de payer un voyage au pays, le premier depuis son exil.

On a beau chercher, reste un mystère. Qui sont vraiment ceux de Tarnac ? Refusent-ils les téléphones portables parce qu’ils se cachent ou parce qu’ils détestent l’idée d’être joignables à tout instant ? Sont-ils des insurgés, enfants paumés d’Action directe, ou des intellos tentés par l’expérience radicale d’une autre vie ? La rupture en tout cas est actée avec la société de consommation et le salariat traditionnel – même si le groupe gère une épicerie et emploie des salariés. Mais pas avec les familles. Chaque semaine ou presque, Julien fait le voyage jusqu’aux allées boisées du parc de Malmaison. Difficile de couper ce cordon si bienveillant. Ses parents, partagés entre l’incompréhension et l’admiration, acceptent ce changement total de programme : «Il aurait pu tout avoir, ?

 » il a choisi la voie la plus difficile, celle d’une vie pauvre en accord avec son idéal. C’est extrêmement respectable», plaide sa mère en réponse à ceux qui ne voient dans son fils qu’un anarcho-rentier à la petite semaine. Car aisé, Julien l’est : ses parents lui ont fait deux donations qu’il a placées dans l’immobilier. Son père a aussi acquis un ancien atelier parisien, pour un projet de journal alternatif, et verse chaque mois 950 euros à Julien, en qualité de gérant de la société immobilière familiale. «Il ne voulait pas de cet argent, mais sa mère a insisté : ça lui garantissait au moins la Sécu», dit avec tendresse celui qui se présente comme «le mécène» de son fils : «Il a une oeuvre à écrire, je trouve normal de le subventionner, approuve Michel Lévy. L’argent est à tout le monde, il l’a mis au service du collectif

Si certains des résidents de Tarnac étaient fils et filles de bonnes familles, d’autres venaient de milieux modestes. «On les présente comme une bande de bourges oisifs qui jouent les activistes, s’emporte le père de Benjamin Rosoux. C’est faux, ils travaillaient dur pour faire tourner l’épicerie dès 5 heures tous les matins !»

Julien est un sac à dos ambulant. Un jour en Corrèze, un jour à Paris, un autre chez ses parents. Et puis la Grèce, l’Italie, l’Allemagne et même les Etats- Unis, le pays du Patriot Act et de la biométrie que Julien et ses amis détestent tant.

C’est parce qu’ils estiment que leur liberté de circulation ne doit pas être entravée par un quelconque fichage que Julien et Yildune franchissent la frontière du Canada à pied, clandestins, en janvier dernier. Leurs sacs passent en voiture, avec un ami canadien.

Contrôle, ouverture des sacs : Julien a oublié une pièce d’identité au milieu de livres et de tracts. Le FBI alerte les services français quand, en mars, une grenade saute devant un centre de recrutement de l’armée à New York. La surveillance débute, jusqu’à la «nuit des caténaires» du 8 novembre.

Quand ils vivaient à Neuilly, la mère de Julien Coupat, représentante des parents d’élèves, croisait souvent Nicolas Sarkozy, alors adjoint à l’éducation. Désormais à Rueil-Malmaison toujours très investie dans les associations locales, elle connaît bien le maire. Il s’appelle Patrick Ollier. On dit que sa compagne, Michèle Alliot- Marie, passe ses nuits ici. L’histoire ne dit pas si elle aussi fait des nuits blanches.

http://hebdo.nouvelobs.com/hebdo/parution/p2301/articles/a390577-les_r%C3%A9volt%C3%A9s_de_tarnac.html


Il flotte sur les ondes, ces jours-ci, comme un parfum d’insurrection. Comme une ombre violente, passée par ici, qui repassera par là. Cette ombre sort d’un livre, un petit livre étrangement poétique, qui a fait frissonner les ministères. Un livre qu’on s’est repassé sous les lambris des palais, en se persuadant qu’il pouvait être le détonateur d’une vague d’attentats « anarcho-autonomes ». Mystérieuse puissance d’un texte. Passé inaperçu lors de sa publication en 2007, « L’insurrection qui vient » est aujourd’hui un best-seller à basse intensité, dont les journaux télévisés ont longuement filmé les pages ouvertes, comme pour y traquer son secret. Car la police soupçonne que derrière son auteur invisible, se dissimule Julien Coupat, aujourd’hui encore incarcéré, soupçonné d’être un des auteurs des sabotages des caténaires de TGV. Ne pouvant inviter son invisible auteur, nous avons invité son éditeur, Eric Hazan, à plonger avec nous D@ns le texte de « l’insurrection qui vient ». Le moins que l’on puisse dire, c’est que Judith Bernard et Eric Naulleau ne l’ont pas ménagé. Les outrances, les fulgurances, le sentimentalisme, les provocations ambiguës à la violence : tout y passe. Le texte, et l’invité, en sortent nus. A la fin de l’émission, il ne reste qu’un mystère : l’identité de l’auteur. Mais cette enquête-là n’est pas de notre ressort. L’émission est ici <http://www.arretsurimages.net/contenu.php?id=1922> . Ses meilleurs moments sont là <http://www.dailymotion.com/user/asi/video/x97cpe_eric-hazan-et-linsurrection-dns-le_news> .


Dans quelle hystérie sécuritaire est tombé le Pouvoir pour réagir ainsi à la moindre blague de potache ? On se croirait dans les anciens pays du bloc soviétique… de quoi ont ils peur ? Est-ce qu’ils croient à leur délire ? Ou bien sont ils tellement terrorisés par les mutations arbitraires et punitives de Sarkozy qu’ils préfèrent tirer au canon sur des moineaux ?

[Fabrice Julien – Le Courrier Picard - 03/05/2009]
Méfiez-vous de votre téléphone portable, il peut vous conduire en prison. C’est en tout cas la mésaventure dont a été victime Stéphane, 29 ans, un habitant d’Abbeville sans histoire. Pour avoir reçu un SMS jugé « tendancieux », ce jeune menuisier a passé 24 heures en garde à vue au motif de « non dénonciation de crime ». Rien de moins. « C’est totalement irréel, s’étonne encore la victime de cette mauvaise blague. Je ne souhaite à personne de vivre ce que j’ai vécu. »

Sa faute ? Ne pas avoir alerté les autorités après avoir reçu sur son téléphone portable le message suivant : « Pour faire dérailler un train, t’as une solution ? » Ce SMS, envoyé par une vague connaissance de travail, a fini sur le bureau du procureur, alerté par l’opérateur de téléphonie mobile. Car l’appareil sur lequel Stéphane a reçu ce SMS était un téléphone prêté par l’opérateur, le sien étant en réparation.

« L’opérateur a le droit de consulter ces messages et le devoir d’alerter les autorités s’il estime qu’un crime ou un délit est susceptible d’être commis », précise le procureur d’Abbeville Éric Fouard.

Ainsi, jeudi 16 avril, Stéphane est invité à se présenter au commissariat d’Abbeville en milieu d’après-midi. « Ils voulaient avoir des précisions sur ce SMS. Je m’y suis rendu sans aucune appréhension, je ne voyais vraiment pas où était le mal. » Mais sitôt arrivé au commissariat, le ton change. « J’entends parler d’affaire criminelle, de terrorisme, et d’une garde à vue qui pourrait durer dix jours, raconte Stéphane. On me demande si je suis capable de choses farfelues comme, par exemple, faire dérailler un train. » Le jeune homme tombe des nues. Il donne le nom de son collègue, auteur du fameux SMS. La police perquisitionne chez ce dernier et le ramène au commissariat. « Je me disais, ils vont faire les vérifications et tout sera terminé. En fait, le cauchemar ne faisait que commencer. »

L’affaire de Tarnac en arrière-plan

Sur instruction du parquet, Stéphane est placé en garde à vue à 16 heures.

« C’était un véritable choc. En deux secondes, j’ai eu l’impression de devenir un vulgaire criminel. Je me retrouve dans une belle cellule jaune qui sent la pisse, j’ai l’impression d’être traité comme un chien. » Au petit matin, les auditions se poursuivent. Les vérifications sont longues et Stéphane ne retrouve la liberté qu’à partir de 16 heures, soit au bout de 24 heures de garde à vue. L’auteur du SMS est également libéré.

Une expérience traumatisante pour le jeune menuisier. Mais une affaire presque banale aux yeux du procureur de la République, qui justifie le placement en garde à vue. « La procédure pénale est la même pour tout le monde, que le risque soit probable ou peu probable », rappelle Éric Fouard, mettant en avant le principe de précaution qui prévaut en matière de terrorisme.

D’autant que depuis l’affaire de Tarnac (Corrèze), et l’arrestation d’un groupe de terroristes présumés soupçonnés d’avoir saboté des caténaires SNCF, les autorités sont particulièrement vigilantes. « Cette actualité récente a certainement joué en sa défaveur, admet le procureur. Je comprends que, de son côté, la garde à vue puisse paraître violente mais, dans ce genre d’affaire, on ne peut prendre aucun risque. »

Ressorti libre, Stéphane ne fera l’objet d’aucune poursuite. Mais il se dit « profondément marqué » par cette affaire. « Je prie le ciel pour qu’aucun train ne déraille dans les semaines qui viennent… »

http://www.courrier-picard.fr/courrier/Actualites/Info-regionale/24-heures-de-garde-a-vue-pour-un-SMS


La « défense des artistes » et des gros sous des majors n’est qu’un prétexte. Le but est bien de pouvoir créer un maillage de surveillance des citoyens afin de pouvoir alimenter le vieux phantasme sécuritaire bourgeois : attraper le dissident avant même qu’il passe à l’acte.

[Marc Resse – PcInpact – 28/04/2009]

Hier en commission des lois, où l’ambiance fut, dit-on de multiples sources, très tendue, le projet Création et Internet a révélé une facette encore méconnue. Celle du filtrage des e-mails. Voire plus en raison du caractère extrêmement vaste des termes employés. dans le texte que doivent voter les parlementaires Une pièce de plus à rajouter à la liste des points noirs de ce fameux projet de loi.

Subrepticement glissée dans le texte au fil des discussions, est apparue la mention de « communication électronique » lors des débats parlementaires. Dans plusieurs endroits du texte qui a été confirmé hier en Commission des lois, on retrouve cette fameuse mention. Exemples :

« Art. L. 331-30. – Après consultation des concepteurs de moyens de sécurisation destinés à prévenir l’utilisation illicite de l’accès à un service de communication au public en ligne ou de communications électroniques, des personnes dont l’activité est d’offrir l’accès à un tel service ainsi que des sociétés régies par le titre II du présent livre et des organismes de défense professionnelle régulièrement constitués, la Haute Autorité rend publiques les spécifications fonctionnelles pertinentes que ces moyens doivent présenter pour être considérés, à ses yeux, comme exonérant valablement de sa responsabilité le titulaire de l’accès au titre de l’article L. 336-3. » (alinéa 110 article 2)

« La suspension s’applique uniquement à l’accès à des services de communication au public en ligne et de communications électroniques. Lorsque le service d’accès est acheté selon des offres commerciales composites incluant d’autres types de services, tels que services de téléphonie ou de télévision, les décisions de suspension ne s’appliquent pas à ces services » (alinéa 104)

« Art. L. 336-3. – La personne titulaire de l’accès à des services de communication au public en ligne ou de communications électroniques a l’obligation de veiller à ce que cet accès ne fasse pas l’objet d’une utilisation à des fins de reproduction, de représentation, de mise à disposition ou de communication au public d’oeuvres ou d’objets protégés par un droit d’auteur ou par un droit voisin sans l’autorisation des titulaires des droits prévus aux livres Ier et II lorsqu’elle est requise » (alinéa 2 article 6)

Comment interpréter ce terme de « communication électronique » d’apparence si anodine ? Pour le faire, on peut se référer à ce schéma qui nous a été transmis par un juriste qualifié, dans l’après-midi.
communication électronique

On découvre ainsi que la « communication électronique » possède deux branches : d’une part la correspondance privée soit les emails, la messagerie instantanée, etc. d’autre part, la communication au public par voix électronique. Celle-ci se subdivise elle-même en deux sous-branches, la communication au public en ligne, mais également la communication au public par voix audiovisuelle, laquelle embrasse depuis la loi sur l’audiovisuelle les services de médias à la demande (SMaD), dont font partie les Youtube, Dailymotion mais également les sites de streaming.

On le voit, utiliser « communication électronique » permet de taper sur bien d’autres secteurs que le monde du P2P et avanttout sur les emails !  Ces questions sont très techniques et il n’est pas certain que les signataires de la pétition SACEM aient été éclairés de ce chapitre. Mais développons et tentons de simplifier. (suite…)


La « No-Fly-List » contient des centaines de milliers de noms et les autorités U.S. s’en servent pour « punir » ceux qui osent se dresser contre elles. 90% des noms sur cette liste sont ceux de militants sociaux, dissidents anti-Bush voire tout simplement de politiques n’étant pas membres du Parti Républicain… le Sénateur Ted Kennedy, par exemple, ou encore la députée US Barbara Boxer. Cela montre bien qu’il s’agit d’une liste politique, de contrôle social et non d’anti-terrorisme. Le terrorisme a toujours été l’excuse pour le pouvoir qui voulait renforcer la mise sous contrôle des populations.. c’était déjà le cas il y 21 siècles, avec les « trompettes de Crassus« 

PASSAGER INDÉSIRABLE : L’HOMME QUI MENAÇAIT LES ETATS-UNIS
[Maurice Lemoine – Le Monde Diplomatique – Mai 2009]
Samedi 18 avril 2009. Dans cinq heures, le vol Air France 438, en provenance de Paris, atterrira à Mexico. Soudain, la voix du commandant de bord annonce que les autorités américaines interdisent à l’appareil le survol de leur territoire – où il n’est nullement prévu qu’il atterrisse. Parmi les voyageurs, figure une personne qui pose problème « pour des motifs de sécurité nationale ». Le Boeing 747 est dérouté. Son nouveau trajet étant beaucoup plus long, l’avion se pose à Fort-de-France pour refaire le plein de carburant.

Après l’escale en Martinique, le copilote aborde discrètement un passager. « Etes-vous M. Hernando Calvo Ospina ? » Recevant une réponse affirmative, il l’entraîne à l’arrière de l’appareil et lui annonce qu’il est le « responsable » du « détournement ». Colombien exilé en France, journaliste, écrivain, collaborateur du Monde diplomatique, Calvo Ospina se rend au Nicaragua pour ce mensuel. Il a publié de nombreux ouvrages (1) et articles dénonçant la politique du président Alvaro Uribe, le paramilitarisme, le rôle des Etats-Unis en Amérique latine. Comme tout journaliste travaillant sérieusement sur la Colombie, il a eu l’occasion d’interviewer des membres de l’état-major des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC). « Ma première réaction, témoigne-t-il, fut d’interroger le co-pilote : “Vous croyez que je suis un terroriste ? ” Il me dit : “Non, et c’est pour cela que je vous préviens.” Il me demanda de ne rien dire à personne, y compris au reste de l’équipage (2). »

Lors de l’arrivée à l’aéroport de Mexico, avec six heures de retard, Calvo Ospina est intercepté, à la demande des autorités américaines, par des fonctionnaires de police mexicains. Ayant en leur possession une douzaine de feuilles sorties d’une base de données, ceux-ci l’interrogent courtoisement, lui expliquant que, depuis le 11-Septembre, les Etats-Unis ont, dans ce domaine, multiplié leurs demandes de « collaboration ».

Le journaliste doit, entre autres choses, préciser s’il est… catholique. « Je répondis que non, mais que je n’étais pas non plus musulman, connaissant la “dimension dangereuse” qu’a pris cette croyance religieuse aux yeux de certaines polices. » S’il sait utiliser des armes ? « Je n’ai même pas fait le service militaire. Mon unique arme c’est l’écriture. » Relâché le dimanche, à deux heures du matin, il pourra repartir sans problème pour Managua.

Ce détournement paranoïaque, en plein ciel, d’un avion de ligne, au prétexte de la présence d’un passager ne présentant aucun danger – avec un coût faramineux pour Air France (carburant, heures supplémentaires de l’équipage et logement à Mexico des nombreux passagers ayant raté leur correspondance) – attire à nouveau l’attention sur l’accord Bruxelles-Washington qui fait obligation aux compagnies aériennes de permettre au Département à la sécurité intérieure américain un accès électronique à leurs données passagers (Passenger Name Records ; PNR). Beaucoup s’imaginent que cette surveillance ne concerne que les vols à destination des Etats-Unis. Il n’en est rien. Les « services » américains s’intéressent aussi, sans qu’ils le sachent, aux voyageurs de tout avion survolant – quand bien même il ne s’y pose pas – eaux territoriales et territoire américains. Big Brother is, plus que jamais, watching you !

(1) Colombie. Derrière le rideau de fumée. Histoire du terrorisme d’Etat, Le Temps des cerises, Pantin, 2008.

(2) Lire le compte-rendu, en espagnol, de Calvo Ospina : « El día en que a Air France se le prohibió sobrevolar Estados Unidos ». Article inédit — mai 2009

http://www.monde-diplomatique.fr/2009/05/LEMOINE/17046


tarnac_ben_laden_luz[Guillaume Dasquié – Charlie Hebdo – 15/04/2009]

En réalité, trois ans avant son interpellation, le 11 novembre 2008, les services de sécurité français suivaient déjà Julien Coupat. Une fiche des Renseignements généraux du 28 octobre 2005, dont nous avons trouvé la trace, demande à son sujet « une mise sous surveillance immédiate» en stipulant « individu proche de la mouvance anarcho-autonome ». Julien Coupat a pris goût à la castagne lors des grandes manifestations antiglobalisation. L’administration l’a dans le colimateur.

Les services de renseignement financier de Tracfin se penchent même sur sa petite communauté d’amis, établie au village de Tarnac, son épicerie, sa ferme. Dans un rapport du 10 novembre 2005, Philippe Defins, l’un des chefs de Tracfin, les soupçonne de se livrer au « blanchiment du produit d’activités de1ictueuses ». Une première paranoïa vite dissipée. Les parents de Julien Coupat s’avèrent à l’origine des mouvements financiers dont profitent ces jeunes fermiers. Gérard et Jocelyne Coupat, deux cadres supérieurs du groupe pharmaceutique Sanofi-Synthelabo, ne rechignent pas à aider leur intello de fils unique, adepte d’une vie communautaire loin des quartiers bobos.

Le dispositif sécuritaire autour du jeune Coupat se relâche, pour peu de temps. Après l’arrivée de Michèle Alliot-Marie au ministère de l’Intérieur, au printemps 2007, on considère que l’ultragauche basculera sous peu dans le terrorisme (NdL&I : c’est surtout Alain Bauer qui est le père de cette manipulation. Faire trembler le bourgeois pour lui fourguer son attirail sécuritaire, il sait y faire le grassouillet d’AB Consultants). Une construction sécuritaire lourde de conséquences.

Les véritables ennuis de Julien Coupat débutent quelques mois plus tard. Les policiers parisiens ont une conviction: Julien Coupat et sa copine Yildune Lévy-Guéant sont impliqués dans l’explosion d’une bombe artisanale de faible intensité, contre un centre de recrutement de l’armée américaine. dans le quartier de Time Square, à New-York, le 6 mars 2008. Aucune information en provenance des États-Unis ne permet de le démontrer. Qu’importe. Moins d’un mois plu tard. cette suspicion sert de prétexte au patron de la sous-direction antiterroriste de la police judiciaire, Frédéric Veaux, pour demander l’ouverture d’une enquête préliminaire, comme le montre son courrier du II avril 2008 au procureur (voir fac-similé).

Lettre de Fréderic Veaux sur Julien Coupat et Yldune Levy

Lettre de Fréderic Veaux sur Julien Coupat et Yldune Levy

Dans sa lettre, Frédéric Veaux établit un lien entre cette explosion et des déplacements entre le Canada et New York effectués bien plus tôt, au mois de janvier, par Julien Coupat et Yildune Lévy-Guéant. Un raisonnement tortueux. Quand l’attentat se produit le 6 mars, provoquant de légers dégâts matériels, les deux Français sont rentrés chez eux depuis plusieurs semaines. N’empêche, la section CI du parquet de Paris, en charge de l’antiterrorisme, ne remet pas en cause le bienfondé de l’hypothèse de départ. Pire, le 2 septembre 2008, le vice-procureur Alexandre Plantevin se réfère à nouveau à l’attentat de Time Square pour motiver, sur cinq pages, une prolongation des écoutes téléphoniques de l’épicerie.

Des vandales, mais pas des terroristes

Et de l’autre côté de l’Atlantique? Qu’en pensent les limiers du FBI, à New York? La semaine dernière, nous sommes entrés en contact avec leur représentant, l’agent Jim Margolan. Selon lui, « il n’existe pas à ce jour de mandat d’arrêt ou de demande officielle visant M. Coupat ou un autre Français» en relation avec l’explosion du 6 mars 2008. D’ailleurs, sur les près de 4 000 pages d’enquête, nous n’avons pas trouvé le moindre échange de données avec l’agence américaine.

Jonathan Dienst, un journaliste new-yorkais de la chaîne WNBC, a suivi les investigations du FBI sur l’affaire de Time Square. Il nous confirme que ses contacts auprès des enquêteurs « avaient dès le début invalidé la piste des deux Français aperçus au mois de janvier 2008 à la frontière américano-canadienne ».

Et au Canada précisément, Kareen Dione, porte-parole des services frontaliers, nous précise qu’une « enquête avait été confiée à la Gendarmerie royale du Canada» sur Julien Coupat, soupçonné d’avoir voyagé entre les deux pays sans disposer des bons visas. Le 13 octobre 2008, les policiers français de l’antiterrorisme remplissent un procès-verbal de deux pages intitulé « Réception de renseignements émanant de la Gendarmerie royale du Canada ». Pour toute pièce maîtresse, leurs homologues de Toronto transmettent un carnet supposé appartenir à Julien Coupat sur lequel ont été notés « des éléments relatant au jour le jour des réunions d’activistes d’extrême gauche s’étant tenues vraisemblablement à New York ».

Aucun commencement de preuve quant à un lien éventuel avec l’attentat du 6 mars. Mais, en ce mois d’octobre 2008, la section antiterroriste du parquet de Paris ne se décourage pas. La piste ferroviaire tombe à pic. À défaut de dynamiteur de Time Square, Julien Coupat passera pour un dérailleur de trains.

Dans la nuit du 7 au 8 novembre, une rame transportant des déchets nucléaires retraités, baptisée Castor, circule de l’usine de retraitement de la Hague, en France, à la ville de Gorleben, en Allemagne. Les détails de l’itinéraire ont été mis en ligne un peu plus tôt sur le site Internet de l’association Sortir du nucléaire. La même nuit, le véhicule de Julien Coupat est identifié par des policiers à proximité d’un point du tracé; une voie TGV qui sera détériorée par l’installation de crochets métalliques.

Le 10 novembre, le bureau d’Interpol de Wiesbaden, en Allemagne, signale qu’un communiqué posté à Hanovre a revendiqué une série d’actions contre ces voies ferrées, perpétrés à l’aide de crochets métalliques, des deux côtés du Rhin, pour perturber le convoi de déchets nucléaires.

Or, selon un rapport des services de sécurité intérieurs de Berlin, le BKA, daté clu 2 décembre 1996, les antinucléaires allemands utilisent depuis au moins 1995 ces mêmes crochets métalliques, qui cassent les caténaires des locomotives, pour provoquer des coupures de courant le long des voies sur lesquelles doivent circuler des déchets nucléaires. Ils ont pu influencer le groupe de Tarnac.

Comme le révèle un procès-verbal, les policiers français ont établi un lien entre une militante antinucléaire allemande, Sandra Gobe!, et Julien Coupat.

Pour autant, selon les experts de la SNCF que nous avons interrogés, ces crochets « interrompent le trafic en occasionnant des dégâts matériels, mais ne peuvent pas provoquer de déraillement ». Du vandalisme, mais pas du terrorisme.

Le 11 novembre 2008, dix membres de la communauté de Tarnac ont été pourtant interpellés et placés en garde à vue pour… « association de malfaiteurs en vue de la préparation d’acte de terrorisme» .

Aujourd’hui, l’incompréhension prévaut. En témoigne ce procès-verbal du 16 février 2009, consignant un énième interrogatoire de Manon Glibert, 26 ans, prof de musique, résidente à ces heures de la ferme de Tarnac, mise en examen elle aussi. Le juge Edmond Brunaud la questionne longuement sur ses lectures, sur les auteurs contestataires qu’elle a lus ces dernières années. En guise de conclusion, le magistrat demande: « Comprenez- vous aujourd’hui ce qu’il vous est reproché. » Et, laconique, Manon de répondre: « Non, je ne comprends toujours pas ce qui m’est reproché. »


Je pense qu’il est grand temps d’agir… François Fillon, il est urgent que tu te souviennes des méthodes de ta jeunesse quand, avec tes francs camarades du GUD, tu allais faire le coup de poing contre les gauchistes. Pas de quartier avec la racaille bolchévique, suivons l’exemple de nos glorieux aînés… Car, tout le monde le sait, la crise n’a pas été provoquée par l’avidité des spéculateurs, non, non… c’est à cause « des agitateurs de tout poil qui tentent de profiter du climat et s’activent en coulisse, dans les milieux de la gauche trotskiste, notamment ».

Décidément, à droite, rien ne change…

Elle pollue les esprits de nos braves ouvriers

Elle pollue les esprits de nos braves ouvriers

Maman ! Y a un trotskyste sous mon lit !

[Comité de Salut Public – 24/04/2009]
Hilarant article dans la Pravda Sarkozyste : « La main de l’extrême-gauche « , rien moins. Où il est dit en substance qu’on est pas omniscients, mais pas loin. Détaillons la chose, c’est croquignolet :

« Qui se cache derrière les meneurs des grèves et les salariés qui séquestrent les patrons ? Agissent-ils seuls, poussés par le désespoir de voir une vie de travail partir en fumée ? Ou sont-ils instrumentalisés pour engendrer le chaos ? Nombre d’observateurs estiment que ces débordements volontairement médiatisés portent la signature de l’extrême gauche. »

(En effet, penser que le prolo puisse prendre de lui-même l’initiative de séquestrer le DRH semble hautement suspicieux pour les auteurs – qui ont quand même dû s’y mettre à trois pour rédiger ce brouet, l’effort intellectuel exigé pour pondre aussi audacieuse hypothèse ayant dû dépasser la capacité moyenne du journaliste figaresque moyen -, partant, ne seraient-ils pas manipulés par d’obscures officines agissant souterrainement dans une opacité inquiétante ? Brr …).

«C’est un secret de polichinelle que de dire que les meneurs de la fronde des Continental à Clairoix sont encartés chez LO », dénonce un dirigeant de la CFDT . «Les militants du NPA sont partout où il y a de la misère et la peur de l’avenir, abonde un autre de la CGT . Ils jouent sur les craintes des gens, comblent un vide politique ou syndical, et soutiennent tous ceux qui sont en lutte. Dès qu’il y a deux grévistes dans une entreprise, ils débarquent.»

Heureusement, de braves et gentils syndicalistes – des gens très raisonnables qui veulent s’asseoir à des tables de négociations pour discuter calmement, pas comme certains n’est-ce pas…- balancent les affreux gauchistes : il y a bel et bien des troskystes , non seulement aux abords des usines, mais pis : certains travaillent même dedans ! Gasp ! L’angoisse monte tout de suite d’un cran, mais on va le voir, le cauchemar ne fait que commencer…

« Un commissaire de police très au fait des questions sociales est formel : «Les salariés qui dégradent leurs usines et qui intimident leur hiérarchie cèdent évidemment à une sorte d’emballement collectif.» Selon lui, «les images de séquestrations de patrons qui tournent en boucle à la télé ont pour effet de banaliser cette pratique». L’un de ses collègues de province ajoute : «Il est difficile d’apporter la preuve irréfutable que des organisations subversives sont à l’origine du durcissement des mouvements engagés. Mais ce qui est certain, c’est que des agitateurs de tout poil tentent de profiter du climat et s’activent en coulisse, dans les milieux de la gauche trotskiste notamment. »

Ce passage pose évidemment toutes sortes de questions, surtout à nous : on est pas encore arrivés à complètement laver le cerveau des ouvriers, et ils sont encore capable de prendre des initiatives par eux-mêmes, c’est ennuyeux. Nos techniques sont pourtant très au point, depuis le temps, mais, peste ! il y a encore du boulot à fournir avant que de disposer de cette armée de zombies obéissants dont nous rêvons. Fort heureusement, notre parfaite absence de scrupules et nos talents de manipulateurs cyniques et amoraux suppléent efficacement à ces lacunes :

« le noyautage des syndicats traditionnels est pourtant déjà une vieille tradition. «Les centrales territoriales sont très infiltrées, assure ainsi un représentant patronal. Il y a de l’entrisme actuellement dans les syndicats d’extrême gauche qui tentent de radicaliser les mouvements.» Ce que confirme un cadre de la CGT . «Ils nous collent sur le terrain dans tous les conflits, reconnaît-il . Ils essayent de peser sur ce qu’on dit et ce qu’on fait. »

Mine de rien, cet extrait nous pose de graves question d’ordre tactiques : il semblerait bel et bien que nous soyons repérés. Ce qui est incompréhensible, nos militants accomplissant un travail de sape de façon parfaitement invisible au sein des syndicats, des erreurs ont dû être commises. Peut-être est-ce parce que ils agissent à visage découvert en ne faisant pas mystère de leur appartenance politique et que tout le monde sait qui ils sont depuis des décennies, ah, oui, c’est peut-être pour ça en effet…

« Il n’y a qu’un seul syndicat où l’extrême gauche n’a pas besoin de faire d’entrisme pour influencer les décisions. Il s’agit de la galaxie des centrales SUD, regroupées sous la bannière Solidaires. Olivier Besancenot n’a-t-il d’ailleurs pas sa carte à SUD-PTT ? »

Ouf, SUD est entièrement sous notre contrôle et c’est heureux. D’ailleurs, c’est OB le chef de SUD, allez, on peut bien le dire maintenant, d’ailleurs c’est le seul et unique Chef de tout, nous on se contente d’obéir aveuglément au Maître. Et c’est très bien comme ça.

Cela dit, on est bien aidés, quand même, puisque figurez vous qu’on « profite des «erreurs de communication» de quelques directions d’usine. Celles de Continental à Clairoix ou de Caterpillar à Grenoble reconnaissent en avoir commis. La direction de Clairoix a ainsi démenti énergiquement pendant plus d’une semaine les rumeurs de fermeture du site. »

(Comme quoi on apprend des choses, en lisant le Figaro : les directions n’ont commis que des «erreurs de communication», quand vous et moi pensions bêtement qu’il s’agissait de questions économiques et politiques, benêts que nous sommes. Comme quoi, on est pas si malins que ça, non plus, hein…)

Bref.
Les troskyss ‘ sont rigoureusement partout.
Ils disposent même « d’agents dormants » (spécialement entraînés dans nos centres de Caracas et Pyongyang ).
Ils sont fourbes.
Ils sont fous.
Ils sont cruels.
Ils sont très intelligents et organisés.
Ils sont des nez crochus et ourdissent des complots pour dominer le monde, d’ailleurs ils…

Ah non, excusez, ça, c’est une autre minorité qu’on accuse de façon récurrente des même travers que nous dans cet article, c’est d’ailleurs frappant, quand on regarde, les arguments sont rigoureusement les mêmes. Cachés, dissimulés, sournois, efficaces, omniprésents mais très discrets…Pareil, c’en est troublant. À moins qu’ils ne s’agisse des même termes toujours employés pour désigner d’avance de commodes coupables, historie de justifier par la suite ce qu’on va leur faire subir, la technique est assez bien rodée de ce point de vue.

N’empêche.

Nous sommes décidément partout.

Ta boulangère ? C’en est une.

L’infirmier qui soigne ta maman malade ? Il est des nôtres.

L’ouvreuse de cinéma ? N’as tu pas vu la lueur de fanatisme quand elle t’a vendu ton billet pour « Coco » ?

Ton collègue dans l’open space ? Regarde discrètement quels sites il consulte, tu pourrais être surpris…

Quant à ton facteur…on s’est compris.

Alors le soir, avant de t’endormir en faisant tes prières au petit 32 Jésus , regarde bien sous ton lit.

Il y a peut-être un trotskyste planqué dessous.

http://comite-de-salut-public.blogspot.com/2009/04/maman-y-encore-un-trotskyste-sous-mon.html


Comment on est passé du « surveiller et punir l’infraction » au « prédire et intercepter » par le biais de l’analyse de toutes les données possibles. On en revient toujours au modèle du Panoptique, phantasme sécuritaire bourgeois contre les déviants…

[François-Bernard Huyghe – 24/04/2009]
Tous tracés ! Tous fichés ! Tous observés ! Tous surveillés!
Tel est le sentiment que nous éprouvons à énumérer les moyens techniques qui servent à rassembler des « données personnelles » sur nous, voire à anticiper nos comportements. Vidéo-surveillance, interceptions de télécommunications, balises, puces RFID, multiples fichiers (dont celui des empreintes génétiques), logiciels intrusifs et plus ou moins espions, mais aussi les traces numériques que laissent nos doubles au cours de nos transactions et de nos navigations sur Internet. Les objets les plus familiers comme une laissez-passer dans le métro ou une caisse de pharmacie semblent en savoir sur nous plus que nous ne le soupçonnions.

Dans la société de l’information qui devait être celle de l’instantanéité, notre passé nous poursuit, tout laisse empreinte, toute information est stockée, documentée, rapprochée et, dans tous les cas, susceptibles de réapparaître, y compris à notre insu ou contre notre gré.

Derrière la question technique (ce que peuvent faire les machines à enregistrer et traiter les données), il y a, bien sûr, un débat politique : quelles libertés individuelles et quel droit à l’intimité – deux notions complémentaires mais différentes – nous laissent les pratiques administratives et commerciales ? Les premières touchent à un pouvoir qui pourrait s’exercer sur nous (savoir certaines choses permettrait de nous menacer pour nous contraindre). Le second à un pouvoir que nous désirions exercer librement : permettre à certains et non à d’autres de savoir des choses sur nous.

La notion d’intimité avec toutes ses gradations – toi je t’autorise à savoir mes maladies, toi, ma sexualité, toi, mes angoisses métaphysiques, toi, mes opinions politiques – est d’ailleurs largement remise en cause par des dispositifs comme les blogs où chacun vient se dévoiler mais où il veut, quand il veut, créant ainsi une intimité « extérieure » (ce qui est à la fois intime et extérieur, « extime » pour le psychanalyste Serge Tisseron).

On voit s’entrecroiser trois logiques : politicio-administrative ( y compris dans sa composante sécuritaire ou policière), économique, mais aussi sociale : réseaux sociaux, présentation publique de soi et de son image, demande incessante d’informations sur son réseau et sur son environnement contribuent à rendre chaque vie de plus en plus « documentée ».

On peut considérer la chose de manière plus historique et dire que trois modèles de surveillance. (suite…)


Du côté de la police, on commence à paniquer, il faut trouver des éléments convaincants pour justifier tout cela… à mon avis il va y avoir une grosse manipulation sous peu, un truc qui va exploser dans la presse, que des zélés scribouillards comme Cornevin du Figaro se chargeront de relayer, et qui leur permettra de (tenter) de dire « Vous voyez, c’étaient des méchants, on a eu raison des les coffrer… »

[David Dufresne – Mediaprt – Jeudi 23 avril 2009]

Le diable aime les détails. Signe des temps, les détails sont numériques. Le 26 janvier, le chef de section d’assistance aux investigations judiciaires du Bureau de la lutte anti-terroriste adresse un mail au juge Thierry Fragnoli, qui commence sérieusement à s’impatienter. Où sont les expertises des crochets saboteurs de lignes de chemin de fer? Ce mail, jamais révélé, Mediapart en a lu une copie. Réponse policière: la gendarmerie fait au plus vite. Son rapport arrivera «vers le vendredi 13 février». Et l’homme d’ajouter, comme dans une parenthèse d’impuissance : vendredi 13, «(jour de chance, il nous en faut). Bien cordialement».

La suite, on la connaît. De la chance, les enquêteurs n’en ont pas eu. Ni ADN, ni empreinte digitale, rien. En ces temps numériques de la preuve scientifique absolue, ça la fiche mal. Surtout quand les relevés d’indices ne se font pas dans les règles de l’art (policier), comme ça semble avoir été le cas sur plusieurs des cinq lieux de sabotages (un en octobre 2008, quatre simultanés en novembre)… Quant à la chance, comme facteur d’enquête, on a connu plus rigoureux.

D’ailleurs, depuis l’offensive des avocats début avril, et les dernières révélations successives (cf. onglet Prolonger et ci-dessous), les langues commencent (un peu) à se délier.

Selon différentes sources proches du dossier, recoupées par Mediapart, l’origine du cafouillage de l’enquête pourrait venir de là. Venir du pataquès autour de l’ADN. Le 8 novembre, au lendemain des dégradations sur les lignes SNCF, c’est ambiance de crise au ministère de l’intérieur. Chacun y va de ses suggestions. La Sous-direction anti-terroriste (SDAT) et la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) ont de forts doutes sur Julien Coupat et son amie, Yildune Lévy. Ils viennent d’être pistés dans la nuit en Seine-et-Marne, à proximité d’un des lieux en question. Trois de leurs amis ont également été contrôlés dans la même nuit, à proximité d’une autre ligne SNCF. Mais ce sont surtout les gendarmes, selon nos informations, qui se montrent les plus affirmatifs. Ils assurent au cabinet de Michèle Alliot-Marie avoir «tout ce qu’il faut» pour confondre les auteurs, aux dires de différents témoignages. Entendre: ils ont les crochets et les empreintes qui vont avec.

La date est d’importance. Moins de deux mois plus tard, c’est la grande fusion police/gendarmerie. La «grande œuvre» de la ministre de l’intérieur. Tarnac, c’est un peu ça: de la fusion avant l’heure, un exercice taille réelle et grandeur nature, entre Paris et la Corrèze, police et pandores. Le mail du 26 janvier en dit long, involontairement, sur le résultat. Confusion, plutôt que fusion.

Le diable affectionne également les cachotteries. De source pénitentiaire, une information est parvenue tout récemment à Mediapart. Des hommes des «services» se seraient dernièrement intéressés de près au parloir de la prison de la Santé. En clair: on les soupçonne d’avoir placé des micros espions dans le lieu même où Julien Coupat se rend à chacune des visites qu’il reçoit; lui, le dernier des neuf mis en examen encore en détention provisoire. Réponse officielle de la police: «La procédure antiterroriste prévoit de pouvoir sonoriser une pièce, sur demande exprès du magistrat. Si tel est le cas, cela devrait apparaître dans le dossier d’instruction, lui-même couvert par le secret d’instruction.»

Traduction: une telle «sonorisation» est possible – mais on ne dira pas si c’est le cas. Ni si ce n’est pas le cas. Ni même, comme cela s’est vu, si les retranscriptions s’arrêtent miraculeusement avant de figurer dans le dossier… Quoi qu’il en soit, à cette date, nulle trace d’écoute indiscrète à la prison de la Santé dans les différents tomes d’instruction, que nous avons pu consulter. Mais tout de même, comme dans bien des affaires judiciaires, sont annexés au moins deux courriers expédiés notamment à Yildune Lévy, du temps où elle était incarcérée. C’est dire que la surveillance ne s’est pas desserrée, après les interpellations.

Au contraire, même. Sur les enquêteurs, la pression est devenue énorme. La faute à la médiatisation, disent-ils – plus qu’aux faits eux-mêmes, finalement mineurs. D’où les confidences, en passant, de plusieurs services de police. «Des éléments sont en train de rentrer.» Des expertises, des auditions, des traductions (liées à la revendication des actes de sabotages par des Allemands, dès le 10 novembre, soit la veille des arrestations de Coupat & co.). Autrement dit: policiers et magistrats se donnent du temps. C’est en effet leur dernière carte. Tant, jusqu’ici, on trouve bien des coïncidences dans le dossier, on trouve bien des écrits, on trouve bien des actions, des filatures, des «interceptions de sécurité», de la comptabilité, près de cinq mille livres dans la «bibliothèque solidaire» du village dont une trentaine saisis, plus ou moins qualifiés de subversifs, mais aucune preuve. Ni matérielle, ni probante. Ni même aucun témoin direct. (suite…)


L’Affaire de Tarnac et le battage médiatique qui l’a accompagné – en partie orchestré par les experts en comm’ du gouvernement et leurs fidèles caisses de résonance dans la presse – n’était qu’une opération d’intoxication visant à faire croire au populo que le gouvernement assure sa sécurité en temps de crise — mais aussi montrer aux éventuels dissidents qu’on avait les moyens de leur taper sur la gueule.

Au moment où des milliers de mécontents sont au chomage technique (ou bien licenciés économiques) et que même des aristos comme Villepin commencent à sentir le fumet révolutionnaire dans l’air, c’est toujours bon de faire des moulinets avec sa matraque, au cas où…

En ce sens, Tarnac est l’équivalent de la rafle de Besson à Calais, le jour où Sarko présente son plan de sécurité… un truc qui n’a aucune efficacité opérationnelle (l’arrestation de Tarnac n’a en rien fait reculer le terrorisme, la rafle de Calais n’a en rien résolu le problème des migrants), mais cela permet de brasser de l’air, faire croire qu’on agit, et ainsi gagner quelques points dans le petit jeu du « je fais semblant de gérer la crise »…

Pendant ce temps là, un jeune innocent, croupit en prison, depuis plus de 6 mois… Un de plus, me direz vous !

[Charlie Enchainé – 16/04/2009]

Surprise dans Charlie Hebdo du 15 avril 2009. Jusqu’à présent, l’hebdomadaire nous avait habitué au dessin, à la satire, au reportage, à la chronique ou encore la critique sociale ; voilà qu’il se lance dans l’investigation. Bandeau d’appel à la une — « Exclusif ! Ultragauche : comment MAM a bidonné le scoop de Tarnac » —, article en pages 2 et 3, fac-similé : un traitement digne d’une révélation du Canard enchaîné — l’ironie du « volatile » en moins. Pour l’occasion, Charlie s’est offert les services d’un spécialiste de l’investigation : le journaliste Guillaume Dasquié.

Julien Coupat, interpellé le 11 novembre 2008, était en fait suivi par les services de sécurité français depuis le 28 octobre 2005 suite à des heurts « lors des grandes manifestations antiglobalisation », comme l’atteste une fiche des Renseignements généraux consultée par le journal. En novembre 2005, Coupat est même soupçonné de blanchiment d’argent ; en réalité, ce sont ses parents qui l’aident financièrement…

La fausse piste new-yorkaise

La pression sur Julien Coupat retombe jusqu’au début de l’année 2008. Les policiers parisiens sont alors convaincus que « Julien Coupat et sa copine Yldune Lévy-Guéant sont impliqués dans l’explosion d’une bombe artisanale de faible intensité contre un centre de recrutement de l’armée américaine dans le quartier de Times Square, à New York, le 6 mars 2008 ». C’est le début des ennuis pour le couple.

À l’appui de nos fins limiers, les deux tourtereaux effectuent « des déplacements entre le Canada et les États-Unis (…) au mois de janvier » 2008. Pourtant, « les deux Français sont rentrés chez eux depuis plusieurs semaines » au moment de l’explosion. Mais les enquêteurs n’en démordent pas et, le 2 septembre 2008, la justice « se réfère à nouveau à l’attentat de Times Square pour motiver (…) une prolongation des écoutes téléphoniques de l’épicerie » de Julien Coupat.

« Il est recherché par le FBI ! »

Dessin de Luz (Charlie Hebdo, 15/04/09)

Julien Coupat et Yldune Lévy-Guéant sont-ils impliqués dans l’affaire de Times Square ? Pour en avoir le cœur net, Guillaume Dasquié a contacté le FBI. « Il n’existe pas à ce jour de mandat d’arrêt ou de demande officielle visant M. Coupat ou un autre Français », affirme l’agence américaine. Mieux : dans les 4000 pages du dossier pénal épluché par Charlie Hebdo, « nous n’avons pas trouvé le moindre trace d’échange de données » entre les services français et américain, écrit le journaliste.

C’est donc sur « la piste ferroviaire » que la section antiterroriste du parquet de Paris va jeter son dévolu. La nuit du 7 au 8 novembre 2008, « le véhicule de Julien Coupat est identifié par des policiers à un point de proximité du tracé » d’un convoi de déchets nucléaires retraités circulant entre la France et l’Allemagne. La « voie de TGV sera détériorée par l’installation de crochets métalliques ». Les charges sont dès lors suffisantes pour embastiller Julien Coupat.

Technique allemande

Problème, « les antinucléaires allemands utilisent depuis au moins 1995 » cette technique de sabotage. Toutefois, selon le procès-verbal, « les policiers français ont établi un lien entre une militante antinucléaire allemande (…) et julien Coupat ». Ce qui laisse supposer que les activistes allemands auraient pu « influencer le groupe de Tarnac ». Mais d’après des experts de la SNCF, consultés par Charlie Hebdo, la pose de crochets métalliques interrompent le trafic sans pour autant faire dérailler les trains. Conclusion de Guillaume Dasquié : il s’agirait, en tout état de cause, « de vandalisme, mais pas de terrorisme ».

Or, les dix membres de la communauté de Tarnac, dont Julien Coupat, toujours détenu à ce jour, ont justement été arrêtés pour « association de malfaiteurs en vue de la préparation d’acte de terrorisme ». L’enquête publiée dans Charlie Hebdo alimente la pile de contre-enquêtes qui montrent que cette accusation paraît loin d’être fondée. Mais, comme l’explique Michèle Alliot-Marie, « ce ne sont pas les journaux qui rendent la justice dans notre pays ».

P.-S.

Quelques mots sur Guillaume Dasquié. Le journaliste Guillaume Dasquié a lui-même connu les joies de l’antiterrorisme. Pour avoir publié dans Le Monde en avril 2007 des extraits d’un rapport classé confidentiel-défense, il fut prestement interrogé par la DST en décembre de la même année, comme nous le mentionnions dans « L’affaire Guillaume Dasquié ». Retrouver Guillaume Dasquié dans Charlie Hebdo plus d’un an après cet épisode constitue, comme nous l’écrivions au début de l’article, une certaine surprise. On ne sait pas, en revanche, si cette collaboration entre le journaliste d’investigation et l’hebdomadaire satirique est amenée à durer.

http://charlieenchaine.free.fr/?Charlie-Hebdo-decortique-l-arnaque


[Dissent – 05/02/2009]

Les 3 et 4 avril 2009 les représentants des pays membres de L’OTAN se réuniront se sont réunis de nouveau pour fêter certes leurs 60 ans de domination, mais surtout afin de mettre au point leur nouveau plan de « défense des libertés » et selon les termes de leurs généraux : « Une grande stratégie pour un monde incertain »…

L’OTAN ce n’est pas seulement une organisation militaro-impérialiste chargée de faire régner la terreur parmi celles et ceux qui oseraient s’opposer à la domination americano-atlantiste. Ce n’est pas seulement une organisation qui depuis 1999 intervient à l’extérieur des frontières des pays membres pour des raisons soit disant défensives (« Out-of-Area ») ainsi que dans des conflits où aucun pays membre n’est touché (« Out-of-Defence »), apportant la paix et la démocratie à travers le canon d’un fusil et le viseur d’un bombardier.

L’OTAN ce n’est pas seulement des frappes chirurgicales et des dommages collatéraux. Ce n’est pas seulement des massacres de civils comme à Nawabad en Afghanistan ou l’utilisation d’armes interdites par les Conventions de Genève en ex-Yougoslavie (bombes à uranium appauvri et à fragmentation).

L’OTAN ce n’est pas seulement une organisation qui sous couvert d’opérations humanitaires ou de guerre contre le terrorisme, tente d’imposer ses valeurs au prix de destructions et de souffrances qui favorisent l’émergence de résistances et d’ ennemis qu’elle prétend combattre par la suite.

L’OTAN aujourd’hui c’est avant tout une organisation politique qui au nom de la « sécurité collective globale » se sert de la guerre et de sa puissance militaire pour défendre et imposer les intérêts (privés) de quelques riches et puissants (occidentaux) au sein de leur mondialisation capitaliste !

PDF 4 pages :  http://www.libertes-internets.net/archives/docs/OTANDissent.pdf


SORTIE DE LA BROCHURE « MAUVAISES INTENTIONS #2 » : OUTIL « ANTITERRORISTE »
– « MOUVANCE ANARCHO-AUTONOME » – LUTTES & RÉVOLTES

La brochure est disponible au format pdf pour sortie imprimante sur :

Cliquer pour accéder à mauvaises_intentions_2.pdf

Il y est également possible de télécharger la brochure au format pdf imprimeur, pour celles et ceux qui souhaiterait la faire imprimer pour la proposer plus largement : http://infokiosques.net/IMG/pdf/mauvaises_intentions_2_imprimeur.pdf

En espérant que cette brochure « Mauvaises Intentions n° 2 » suscitera intérêt & rage, discussions & actions de solidarité, désirs de changements radicaux et envies d’en découdre…

Il est possible d’écrire à solidaritesinculpes@riseup.net pour toute remarque, commande, etc…

Et, il y a toujours plus d’infos sur http://infokiosques.net/mauvaises_intentions

Enfin, pour le soutien financier, vous pouvez envoyer des chèques à l’ordre du CICP à l’adresse Mauvaises intentions, 21, ter rue Voltaire 75011 PARIS

« Comment parler de cette répression qui nous touche dans nos façons de lutter, parce qu’elle vise des modes d’organisation et des pratiques dans lesquels nous nous reconnaissons ? Comment ne pas se considérer comme des martyrs ni comme des victimes ?

On peut tenter de faire d’une situation de répression un moment de lutte, sur lequel nous devrions être capables de trouver des prises. Choisir le discours que nous voulons porter, défendre des pratiques de lutte inscrites dans leur contexte social.

On a choisi de parler de ces arrestations, avec la certitude qu’elles s’inscrivent dans une réalité politique plus vaste, qu’elles sont liées à la question du système dans lequel on est, à son contrôle, à ses taules…

Parce que d’une répression “spécifique” surgissent des questions plus larges qui touchent tout un chacun, l’aspect défensif de l’anti-répression doit s’allier à d’autres batailles. Quand plusieurs personnes se retrouvent en prison, accusées de l’incendie du centre de rétention de Vincennes, cela devrait logiquement entraîner une solidarité au moins de la part de tous ceux qui participent à la lutte contre les centres de rétention et aux côtés des sans-papiers.

Il y a un enjeu, au sein même de cette lutte, à être solidaire des inculpés et à se battre pour leur libération. » [Extraits de l’introduction]

Recueil de textes publics – janvier 2009

SOMMAIRE

Retour sur les différentes arrestations et procédures

Lettres de l’intérieur
>• Antiterrorisme : lettre d’Isa et Farid, les 2 de Vierzon.
>• Vues du délire antiterroriste, par Farid.
>• Pourquoi je me suis fait la malle – Lettre ouverte n°1 de Bruno.
>• Lettre d’Isa depuis la prison de Lille-Séquedin (mai 2008).
>• Lettre de Damien en prison à Villepinte.
>• Lettre de Juan depuis la prison de Rouen (octobre 2008).
>• Récit d’un mouvement à la maison d’arrêt des femmes de Rouen (juillet
2008), par Isa.

Luttes & Révoltes
>• Briser les prismes de l’État.
>• Temps de chien.
>• Anarcho-autonome.
>ADN
>• Existe-t-il un gène de flic ?
>• Affiche “Crachez ici c’est pour nos fichiers”.
>• Expertise génétique, laboratoires & tribunaux.
>PRISONS POUR ÉTRANGERS
>• Affiche “Rassemblement contre la machine à expulser à La Chapelle”.
>• Comme une prison qui brûle.
>• Affiche “Beau comme des centres de rétention qui flambent”.
>• Quand Vincennes a brûlé.
>• Liberté pour les inculpés de feu Vincennes !
>• L’État isole, renforçons les liens !
>SABOTAGES
>• Sur les sabotages de voies de chemin de fer.
>• Du sabotage considéré comme un des beaux arts.
>• La Caténaire qui cachait la forêt.
>• Antiterrorisme : la dépanneuse raconte ! ]
>• Un pavé dans les rouages.

Tactiques policières & judiciaires
>• « Tactiques d’interrogatoires policiers ».
>• Directive de la Direction des Affaires Criminelles et des Grâces
(ministère de la Justice).
>• Le « cadeau » de la juge antiterroriste.

Solidarité
>• Quelques réactions sur les comités de soutien de novembre.
>• Qu’est-ce que la solidarité ?
>• Chronologie des actions de solidarité [avril-décembre 2008].


Note aux frangins de la NLA en Hollande – si l’envie vous prenait d’aller péter la gueule à ce petit connard de geek qui fabrique le prochain outil de flicage dans son garage en disant « les technologies me passionnent, c’est tout », je ne pense pas qu’on vous jetterait la pierre.Après tout, le mec qui a développé l’usage du Zyklon B était probablement « passionné de chimie, c’est tout »…

C’est vrai quoi, c’est fun les nouvelles technologies, hein ? Tant qu’on ne s’appelle pas Julien Coupat, ou que l’on n’est pas un militant altermondialiste… ou encore un dissident chinois. Car le petit projet de flicage « fun » de Alex Van Es ne devrait pas rester très longtemps cantonné au registre du repérage des copains dans la rue….

Dans 20 ans, ne pas avoir de téléphone Bluetooth sera impossible (ils seront livrés avec la fonction de traçage d’officle) ou alors ce sera suspect (comme on a déjà déclaré suspects les Neuf de Tarnac parce qu’ils n’avaient pas de téléphone portable).

Et nous vivrons alors dans une société entièrement pistée par GSM, RFID, vidéosurveillance…  ou chacune de nos activités, chacun de nos comportements seront analysés par les experts en marketing… mais aussi par les policiers et par les manipulateurs.

Et alors les bien-pensants s’écrieront  « mais comment avons nous pu laisser faire un truc pareil »

Le remarque de Alex Van Es sur le fait de repérer les téléphones portables des politiques et de voir si on les retrouve dans les quartiers « chauds » de la capitale en dit long sur sa mentalité de petit flic…

Enquête  : Alex is watching you
[Yves Eudes – LE MONDE – 29.11.08]
Un informaticien néerlandais a créé un système de pistage des appareils équipés de Bluetooth, téléphones, ordinateurs et GPS. D’autres passionnés l’ont aidé à créer un miniréseau d’espionnage amateur.

Alex Van Es, un homme grand et massif âgé de 35 ans, vit avec sa compagne dans un joli pavillon de banlieue à Apeldoorn, aux Pays-Bas. Le jour, Alex est informaticien dans une administration. Le soir et le week-end, il s’amuse à fabriquer un système automatisé capable de détecter tous les appareils dotés d’un émetteur Bluetooth, puis de traiter les informations recueillies et de les publier sur son site Web personnel, Bluetoothtracking.org : « Pourquoi je fais ça ? Les technologies de pointe me passionnent, surtout leurs usages inédits. Il n’y a pas à chercher plus loin. »

Partout en Europe, les téléphones mobiles récents sont équipés d’un émetteur-récepteur Bluetooth, pour faire fonctionner une oreillette sans fil ou échanger des photos et des fichiers avec des amis. De même, les nouveaux ordinateurs portables et les GPS de voiture utilisent le Bluetooth pour leurs connexions sans fil de proximité. Or, une fois que cette fonction a été activée, la puce Bluetooth diffuse en continu deux informations : son « adresse » (un matricule d’identification unique) et le nom de l’appareil dans lequel elle est intégrée.

En outre, de nombreux utilisateurs personnalisent leur appareil en entrant un prénom, un surnom familier ou amusant, ou encore le nom de leur entreprise ou de leur chanteur préféré -, autant d’informations permettant de les identifier, par déduction ou par recoupements. En se promenant un soir de novembre sur le site d’Alex Van Es, on découvre par exemple qu’à 17 h 42 le téléphone mobile Nokia modèle 6310-I, matricule 00.60.57.xx.xx.xx, se trouvait à Apeldoorn, au coin de la rue Hoofd et de la rue Deventer.

Ces derniers mois, ce même Nokia a été repéré par Alex Van Es 237 fois à Apeldoorn, entre 7 heures et 22 heures, mais jamais plus tard. Ce jour-là, le site a permis de suivre les déplacements de 558 appareils Bluetooth. Pour chacun d’entre eux, une page Web a été créée en temps réel, avec une carte Google interactive, un tableau récapitulatif, et un graphique ventilant les localisations par tranches horaires. L’ensemble est mis à jour toutes les dix minutes. (suite…)


Il faut libérer Julien C. – Dedans dehors ça change tout
[Bruno Maillé – Causeur.fr – 14/04/2009]
L’affaire des sabotages de la SNCF sort de sa phase d’oubli médiatique. Le 17 mars dernier, les huit co-inculpés toujours maintenus sous surveillance judiciaire ont publié dans Le Monde une tribune annonçant que le silence de Bartleby serait désormais leur réponse à l’acharnement politique déployé contre eux et dissimulé sous la mascarade judiciaire.

Puis, le 25 mars, Le Monde affirmait en “une” avoir pris connaissance des pièces du dossier de l’instruction et constaté qu’il était résolument vide, conformément aux affirmations de la Défense depuis le début de l’affaire. Le quotidien reproduisait en outre un échange admirable. “Le juge : “Pensez-vous que le combat politique puisse parfois avoir une valeur supérieure à la vie humaine et justifier l’atteinte de celle-ci ?” Julien C. :Je pense que c’est une erreur métaphysique de croire qu’une justification puisse avoir le même poids qu’une vie d’homme.” » Julien C. ne saurait être plus clair concernant ses dispositions éthiques. Ses amis et lui se tiennent assurément à peu près aussi loin des passions tristes des Brigades Rouges que de celles d’Alain Bauer.

Le 2 avril, enfin, les avocats des neuf personnes mises en examen pour “association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste” ont tenu une conférence de presse à la Ligue des droits de l’Homme. Ils ont demandé la requalification du dossier en droit commun. Ils ont pointé le caractère prémédité de cette opération politico-judiciaire. Six mois avant l’interpellation de novembre, le 13 juin 2008, le ministère de la Justice avait en effet demandé aux tribunaux dans une circulaire de se dessaisir de tout dossier lié à “la mouvance anarcho-autonome” au profit du parquet antiterroriste de Paris. Ils ont dénoncé le caractère inacceptable et arbitraire de la détention de Julien C., qui dure depuis bientôt cinq mois, en l’absence de la moindre preuve matérielle. Selon Me Terrel, “le gouvernement fait la chasse à des gens qui vivent différemment”. Les avocats se sont enfin étonnés que la piste allemande ait été négligée, un groupe allemand ayant revendiqué les sabotages de caténaires dans l’indifférence complète des enquêteurs.

J’évoquerai maintenant les textes qui, selon la police, émaneraient de Julien C. et de ses amis et qui ont été utilisés comme des éléments à charge dans cette affaire. S’ils en sont véritablement les “auteurs”, je les en félicite chaleureusement. Car Tiqqun I (qui contient les remarquables Théorie du Bloom et Théorie de la Jeune-Fille), Tiqqun II et l’Appel sont des écrits d’une profondeur, d’une intelligence, d’une densité, d’une beauté très peu communes. Je suis heureux de partager avec Jérôme Leroy l’admiration de ces grands textes encore méconnus – qui ont pourtant d’ores et déjà donné lieu à des traductions italiennes, espagnoles et allemandes. Mais je diverge avec lui sur un point, sur lequel je ne puis donner entièrement tort à mon ami Marc Cohen : je n’aime pas du tout L’insurrection qui vient.

À chaque fois que j’ai tenté de convaincre des amis réactionnaires du caractère décisif de ces ouvrages, je me suis presque toujours heurté au même réflexe de défense. Ils tiennent absolument à fuir ces écrits, à ne pas en éprouver la puissance de pensée et de vérité, en les repoussant dans le bercail familier de la bêtise romantico-gauchiste. C’est un non-sens absolu. Il se trouve que ces écrits très singuliers mènent une guerre sur deux fronts : à la fois contre la bêtise réactionnaire et contre la bêtise progressiste. Etant sujet à l’une comme à l’autre, je ne pouvais que les aimer. Non seulement ces textes ne sont pas “de gauche”, mais ils s’attaquent incessamment et avec une réjouissante cruauté à à peu près toutes les formes de la bêtise de gauche.

Je me contenterai de citer quelques extraits de l’Appel afin que chacun puisse vérifier par lui-même cette évidence :

“Périodiquement, la gauche est en déroute. Cela nous amuse mais ne nous suffit pas. Sa déroute, nous la voulons définitive. Sans remède. Que plus jamais le spectre d’une opposition conciliable ne vienne planer dans l’esprit de ceux qui se savent inadéquats au fonctionnement capitaliste. La gauche (…) fait partie intégrante des dispositifs de neutralisation propres à la société libérale. Plus s’avère l’implosion du social, plus la gauche invoque “la société civile.” Plus la police exerce impunément son arbitraire, plus elle se déclare pacifiste. Plus l’État s’affranchit des dernières formalités juridiques, plus elle devient citoyenne.”

Ou encore :

“Tout se passe comme si les gauchistes accumulaient les raisons de se révolter de la même façon que le manager accumule les moyens de dominer. De la même façon c’est-à-dire avec la même jouissance.”

Ou encore :

“C’est à force de voir l’ennemi comme un sujet qui nous fait face – au lieu de l’éprouver comme un rapport qui nous tient – que l’on s’enferme dans la lutte contre l’enfermement. Que l’on reproduit sous prétexte d’”alternative” le pire des rapports dominants. Que l’on se met à vendre la lutte contre la marchandise. Que naissent les autorités de la lutte anti-autoritaire, le féminisme à grosses couilles et les ratonnades antifascistes.”

La valeur de ces textes tient ensuite à leur dimension métaphysique. “Par communisme, nous entendons une certaine discipline de l’attention.” Naturellement, chacun est libre de s’esclaffer bruyamment en affirmant que les questions métaphysiques, comme l’acné, disparaissent une fois passé le seuil de l’adolescence. Pour ma part, j’ai cependant beaucoup de mal à prendre au sérieux l’hypothèse selon laquelle Benoît XVI, Martin Heidegger et Milan Kundera seraient des adolescents attardés.

Chacun est libre de cultiver obstinément l’illusion selon laquelle la question des fins dernières, la question du sens de sa propre vie, ne se poserait pas en ce qui le concerne. La neutralité métaphysique, la neutralité éthique – prétendre n’aspirer à rien et n’être attaché à aucune valeur – ne sera jamais autre chose qu’un fantasme absurde ou un mensonge à soi-même. Qui refuse de répondre avec des paroles à la question du sens de son existence y répond de toute manière limpidement par sa vie même. Notre époque n’est pas métaphysiquement neutre, elle a bel et bien ses réponses. Ses deux principales hypothèses métaphysiques pourraient être grossièrement résumées par ces propositions : 1) Toute existence humaine est un pur non-sens ; 2) La vie bonne consiste en la maximisation des trois seuls Biens véritables : le fric, la baise et la peoplelitude.

Dans sa lettre ouverte <http://www.causeur.fr/cher-julien-coupat,2224>  adressée à Julien C., Cyril Bennasar fait semblant de partager cette métaphysique de pacotille et d’y voir la quintessence de la lucidité et de la maturité. Il fait sans doute preuve d’une générosité mal placée en prêtant hasardeusement à Julien C. cette métaphysique au dessous du seuil de pauvreté.

C’est la grande naïveté de notre époque, comme le remarquait René Girard, que de croire que seulement tout ce qui est bas est réel. La posture provocatrice de Cyril Bennasar ne manque pas d’humour, mais elle manque sans doute de vérité. Il faut vous avouer, cher Cyril, que ni vous ni Julien C. ne me semblez très crédibles en tant qu’aspirants forcenés au souverain Bien du fric, de la baise et de la peoplelitude. Votre choix du noble métier de menuisier et celui de Julien C. de vivre dans une ferme ne sont vraiment pas les chemins les plus droits, ni ceux que le bon sens recommande en priorité, pour atteindre les buts que vous évoquez.

Vous seul et les gauchistes désignez en outre Julien C. comme un “martyr de l’Etat policier sarkozyste”. Ecoutez ses amis, dans leur tribune dans Le Monde : “Pas de héros, pas de martyr.”

Enfin, il est inexact que, fidèle à la sagesse de Bruce Lee, vous ne vous attaquiez qu’au bois. Yvan Colonna et Julien C., je vous l’assure, ne sont pas un mélèze et un pin parasol – même s’ils ont en effet en commun avec eux de ne pas pouvoir, de leur cellule, “rendre les coups.” Dans ces conditions, vos attaques me semblent en vérité manquer un peu de panache.

Je citerai pour finir quelques phrases de l’Appel qui n’ont curieusement intéressé aucun journaliste. Pourtant, elles ne ressemblent pas exactement à un éloge de l’activisme saboteur. Elles seraient plutôt son contraire : “L’activiste se mobilise contre la catastrophe. Mais ne fait que la prolonger. Sa hâte vient consommer le peu de monde qui reste. La réponse activiste à l’urgence demeure elle-même à l’intérieur du régime de l’urgence, sans espoir d’en sortir ou de l’interrompre.”

http://www.causeur.fr/il-faut-liberer-julien-c,2235


[ Serge Quadruppani | Rue 89 | 08/04/2009 ]

Conseiller ès « ultra-gauche » de Michèle Alliot-Marie, Alain Bauer peut se vanter d’avoir contribué à faire arrêter Julien Coupat, et à le faire maintenir en détention malgré un dossier d’accusation plus que léger. Mais, après avoir vu le journal de France 2 lundi soir, il me semble qu’on doit se poser la question : qui arrêtera Alain Bauer ?

Certes, à la différence de cet idéologue sécuritaire, je ne souhaite pas qu’on prive quiconque de liberté – ni de celle d’aller et venir, ni de celle de penser et de s’exprimer.

Mais, quand on voit le « dossier » proposé par la chaîne du service public, qui mélange allègrement des images de Strasbourg, de l’affaire dite de Tarnac, les propos sommaires (mais lui a-t-on laissé le temps d’en tenir d’autres ? ) d’un individu présenté par la télé comme un autonome et… la ronde des obstinés (on voudrait insinuer que les enseignants-chercheurs sont infiltrés par de dangereux individus violents qu’on ne s’y prendrait pas autrement), quand on voit cet étrange ragoût auquel Alain Bauer vient apporter une pincée de théorie, on se demande : comment arrêter ça ?

Un parfait réprésentant de l’« industrie de la peur »

Certes, le personnage est intéressant. Ancien de l’Unef-Id tendance rocardienne, influent franc-maçon il a été administrateur de la Mnef et grand maître du Grand Orient de France. Après un stage au début des années 90 dans une société très liée à la CIA, il enseigne ou a enseigné aussi bien à Paris-I qu’au centre national de formation judiciaire de la gendarmerie et à l’académie de police criminelle de Chine (un haut lieu démocratique, comme chacun sait).

Coauteur de nombreux ouvrages avec Xavier Raufer (Christian de Bongain, ancien d’Ordre nouveau), ami de dirigeants socialistes (Dray, Valls, Huchon, Cambadélis), qu’il a aidés de sa « science » dans le virage sécuritaire du Parti socialiste, il est maintenant dirigeant d’une société, AB Sécurité, de dimensions mondiales. Un parfait représentant de ce que Mike Davis appelle l’« industrie de la peur ».

Sur la fantasmatique « ultra-gauche anarcho-autonome », « l’expert » médiatiquement consacré transpose simplement la leçon apprise outre-Atlantique : de même que, dans le catéchisme néoconservateur, ceux qui cassent des vitres ouvrent la voie à, et sont potentiellement des dealers-tueurs, celui qui commence par contester la loi en ne s’en prenant qu’aux biens doit être traité comme le terroriste qu’il risquerait de devenir.

Une transposition du concept de « guerre préventive »

Faisant fi d’abyssales différences dans les positions politiques comme dans les contextes historiques, Bauer affirme en effet, dans l’émission citée, après des images montrant le livre « L’Insurrection qui vient » et Julien Coupat, que les « prémisses sont les mêmes » que celles d’Action directe et des Brigades rouges.

Dans un simple mémoire de maîtrise, un tel postulat téléologique mériterait à tous coups un refus de validation, mais on sait que l’enracinement de Bauer dans le sarkozisme est si solide qu’on a créé spécialement pour lui une chaire au Cnam, malgré ses titres universitaires vivement constestés.

En réalité, l’individu importe peu. Des gens à carrière, qui savent se placer dans l’air du temps, on n’a eu que trop l’occasion de les voir à l’œuvre, de Kouchner à Tapie et de Val à Dati. Ce qui importe, c’est de quoi Bauer est le nom : une transposition sur le plan intérieur de ce concept de « guerre préventive » qui a si bien réussi à Bush, c’est-à-dire une politique tendant à criminaliser toute dissidence sociale, une politique au nom de laquelle « les mauvaises lectures », des « mœurs dissolues » et la participation à des manifestations occupent des dizaines et des dizaines de pages dans le dossier des Tarnacois.

Une politique au nom de laquelle les policiers se sentent toujours plus tout permis (voir les si nombreux témoignages rapportés sur ce site et ailleurs). Une politique menaçant gravement ce qu’AB Sécurité, par un renversement orwellien, prétend respecter : les libertés publiques. C’est cette politique-là qu’il s’agit d’arrêter.

http://www.rue89.com/2009/04/08/y-a-t-il-quelquun-pour-arreter-alain-bauer


Paru dans l’excellente et intelligente revue « Multitudes », (http://multitudes.samizdat.net/) ce long texte de Jean-Claude Paye est une lecture fondamentale pour comprendre ce qui se passe. Cela rappelle les propos tenus par Karl Rove au journaliste Ron Suskind, en octobre 2004, après le blitz médiatique pour nous faire accepter la guerre en Irak et la réelection de GW Bush  :

<<Vous les journalistes faites partie ce que nous appelons la communauté des gens ancrés dans la réalité (reality-based community)… vous pensez que les solutions émergent de votre analyse judicieuse de la réalité discernable.

Mais vous oubliez que nous sommes désormais un empire, et que quand nous agissons, nous créons notre propre réalité. Et pendant que vous êtes encore entrain de tenter d’analyser cette nouvelle réalité que nous avons crée, nous sommes déjà passés à une autre réalité, que nous avons également crée… et ainsi de suite. La réalité n’a plus de sens pour nous, c’est nous qui la fabriquons. L’opinion ne voit que ce que nous lui laissons voir.>>

[Jean-Claude Paye – Multitudes/Eurozine – Avril 2009]

La mise en scène de l’arrestation et de l’inculpation des  » autonomes de Tarnac  » est un phénomène qui révèle non seulement un bouleversement de l’ordre juridique, mais aussi une mutation plus profonde, celle de l’ordre symbolique de la société. Le renversement du rôle de la loi est lui-même le phénomène d’une  » père-version  » de la Loi symbolique.

Les procédures mises en place représentent un des aspects les plus significatifs de la tendance imprimée par la  » lutte contre le terrorisme « , à savoir qu’un individu est désigné comme terroriste, non pas parce qu’il a commis des actes déterminés, mais simplement parce qu’il est nommé comme tel. Cela est le point d’aboutissement d’une tendance qui se déploie depuis une dizaine d’années.

Le processus de subjectivation du droit aboutit ainsi à un renversement du rôle de la loi. Cette dernière n’est plus un cran d’arrêt à l’arbitraire, mais une forme vide consacrant la concentration des pouvoirs aux mains de l’exécutif. En l’absence d’un imaginaire organisateur, d’une conscience politique unifiée, le pouvoir a la possibilité de créer un nouveau réel, une virtualité qui ne supprime pas, mais qui supplante les faits.

La faiblesse du mouvement social, la faillite de la fonction symbolique explique l’absence de frein à la toute-puissance de l’État qui se montre en tant qu’image englobante, en tant que figure maternelle. À un ordre social névrotique qui se révèle contradictoire, se substitue une structure psychotique, un ordre qui supprime tout conflit, toute possibilité de confrontation subjective.

La distinction entre intérieur et extérieur disparaît. La fusion entre droit de la guerre et droit pénal est pleinement inscrite dans une loi américaine de 2006, qui permet au pouvoir exécutif américain de désigner comme ennemis ses propres citoyens.

L’affaire des  » autonomes  » de Tarnac s’inscrit dans cette modernité de la guerre des gouvernements contre leurs propres populations. À part quelques rituels dans l’expression verbale du pouvoir, cela n’a pas grand-chose à voir avec la vieille notion d’ennemi intérieur et la stigmatisation traditionnelle des opposants politiques. Ici, on ne s’attaque pas à une idéologie déterminée, à une forme de conscience, mais simplement au corps, à des comportements, au refus de s’abandonner à la machine de mort. Il ne s’agit donc pas de démanteler une avant-garde, mais de montrer que le refus de faire de l’argent, d’éviter les dispositifs de contrôle ou la volonté de refaire du lien social constituent une forme d’infraction, la plus grave qui existe dans notre société, un acte terroriste. Cela concerne tout un chacun et non seulement une minorité. (suite…)


Mise à jour du 10/04/09 : Nous avons appelé des copains ayant des flics dans leur famille (ça arrive dans les meilleures familles) et ils ne confirment pas l’information.

Sarkzoy ne fait qu’appliquer à la lettre la stratégie de « Fear, Uncertainty, Doubt » élaborée en 2001  par l’équipe néo-con autour de Dick Cheney et Richard Perle pour faire accepter à la population les guerres impériales, les privations de liberté et la répression de toute dissidence. Faire peur au populo, c’est encore le meilleur moyen de le faire taire et rentrer dans le rang…

RAPPEL DES RESERVISTES DE LA POLICE NATIONALE AVANT LE 30 JUIN 2009 !!!

[Révélations4 – 27/03/2009]
Tous les policiers à la retraîte, de moins de 60 ans, ont reçu l’ordre de se faire recenser avant le 20 mars 2009 et de réintégrer leurs postes avant le 20 juin 2009. Comme par-hasard, cet échéancier coïncide entre le G-20 et la réintégration de la France au sein du commandement de l’otan.

Au même moment, « le monde diplomatique » publie un article au titre symptomatique : « Comment les armées se préparent au combat urbain« . L’auteur, Philippe Leymarie évoque « les manoeuvres de l’armée française dans des villes françaises, notamment Sedan ou Fréjus, en 2008, dans le cadre de la préparation de la Force de réaction rapide de l’Otan pour « sécuriser » et évacuer des populations , face à une menace de groupes paramilitaires ou terroristes« .

A titre informatif, la France dans le cadre de sa réintégration au sein du commandement de l’otan, récupère 2 centres de commandement majeurs dont celui basé à Lisbonne qui se trouve justement être celui de la force de réaction rapide de l’alliance atlantique !

L’article 5 de la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure ainsi que l’article 9 du décrêt n° 2003-1395 du 31 décembre 2003 ont fixé les modalités de la mise en oeuvre de la réserve civile de la police nationale , les réservistes, dans le cadre de leurs obligations statutaires de disponibilité, ne peuvent faire l’objet d’un rappel au service qu’en cas de menaces ou de troubles graves à l’ordre public. Il s’agit donc d’une mesure exceptionnelle prise après arrêté  ministériel !

Bref, en rapprochant ces informations, il est clair que les autorités publiques savent à coup sûr qu’un évènement se produira d’ici à quelques mois, justifiant l’usage de la force.  Cette force devra être employée contre les populations civiles, car selon nicolas Sarkozy, cf. extrait de son discours du 16 janvier 2009 à l’Elysée : «  les forces au service du changement sont considérablement plus fortes  que les conservatismes et les immobilismes…on ira ensemble vers ce nouvel ordre mondial. Et personne, je dis bien personne, ne pourra s’y opposer« .

Voici donc ci dessous la confirmation de cette information qui m’a directement été transmise par le ministère de l’Intérieur français en date du 24 mars 2009. (si tel est votre désir, je peux vous transmettre cette réponse officielle par courriel).

Bonjour,

En application des textes réglementaires, un plan de rappel de la réserve statutaire de la police nationale a été défini dans la perspective de répondre aux rappels individuels ou collectifs du ministre chargé de l’intérieur en cas de menace ou de troubles graves à l’ordre public. Il prévoit notamment que les services d’emploi prennent contact avec les réservistes statutaires afin que chacun d’entre eux connaisse son poste d’affectation. Pour le 30 juin, l’ensemble des réservistes statutaires devront être affectés de manière opérationnelle.

Cordialement.

Mission nationale pour la réserve civile (MINATREC)
Cellule de communication
Place Beauvau – 75800 Paris Cedex 08

http://revelations4.blogs.fr/index.html


[Article 11 – 04/04/2009]

Un exploit. Pendant le sommet de l’Otan, les forces de l’ordre auront réussi ce tour de force d’être à la fois trop répressive et pas assez. Alors que leur brutalité a pu s’exprimer sans fard hier, elles sont aussi soupçonnées d’avoir laissé – un moment – la bride sur le cou aux radicaux, afin que les dégâts nuisent au message des « anti ». Pis : comme pour compenser, les CRS interpellent aujourd’hui en masse les derniers résidents du camp.

Contre-sommet : répression en pagaille

Bizarre bizarre. A lire les déclarations de la ministre de l’Intérieur, Michèle Alliot-Marie, le contre-sommet de l’OTAN aurait été intelligemment géré par les forces de l’ordre. A tel point que ce sont 300 manifestants très méchants, pris la main dans le cocktail molotov, qui auraient été capturés lors du contre-sommet.

« Les manifestants les plus violents étaient environ 2 000. Nous les suivions depuis trois jours, nous les avons empêchés de commettre un certain nombre d’exactions, ils ont harcelé les policiers (…). Il y a eu 300 interpellations auxquelles on a procédé.« 

Droite dans ses bottes, la fliquette-en-chef s’est donc enorgueillie de la bonne marche de l’institution répressive pendant cette semaine agitée. Ce à quoi nous nous permettons d’apporter quelques « légers » bémols.

Répression désordonnée

Les déclaration de MAM ont un objectif évident : il s’agit, pour le pouvoir en place, de fanfaronner quant à son action répressive. De montrer que le contre-sommet a été efficacement géré par la police française qui a su arrêter toutes les personnes se livrant à des actes légalement répréhensibles. En clair, pas question d’avouer que ce grand merdier est en grande partie de leur responsabilité. Alors, forcément, il faut du chiffre, des arrestations par centaines.
Pourtant, selon la Legal Team, l’organisation gérant les démêlées légales des manifestants avec la police, 31 personnes sont actuellement en garde à vue suite à la manifestation d’hier, dont huit passeront en comparution immédiate lundi matin. C’est peu au regard des rodomontades d’Alliot-Marie.

Surtout, il semble bien que les autorités aient décidé de faire grimper ce chiffre : le camp des militants anti-OTAN, situé à plusieurs kilomètres du centre de Strasbourg, est actuellement en état de siège. Les policiers laissent sortir les manifestants au compte-goutte, procédant à des fouilles plus que poussées et à des arrestations en pagaille, au jugé. Nadia, représentante de la Legal Team vient ainsi d’être embarquée par les forces de l’ordre et incarcérée sous nos yeux. Les manifestants arrêtés ne le sont pas sur le fait, mais totalement arbitrairement, après-coup, pour délit de « gueule de black-block ».

Scène représentative de cette gestion policière bordélique, la confrontation entre les représentants de la Legal Team et les policiers cet après-midi, devant l’hôtel de Police de Strasbourg. Interrogés par les représentants juridiques des « anti » sur la situation de leurs camarades interpellés, les représentants de la police se sont refusés à toute déclaration, l’omerta étant la règle et les gardés à vue ne pouvant bénéficier d’aucune visite. Comble du ridicule, trois militantes allemandes armées d’un chiffon sur lequel était inscrit « Solidarité avec les prisonniers » se le sont vus confisquer par des CRS parfaitement bovins (voir photos en fin d’article). Leur chef a d’abord affirmé : « nous allons vous le rendre », avant de le cacher à l’intérieur de son poing fermé pour ne plus le laisser apparaître. Aux protestations des jeunes filles, un pandore a répliqué (en anglais), élégant : « Toi, si tu veux te plaindre, on est en France, t’as qu’à parler français. » A nos propres remarques il rétorqua que le périmètre était zone sensible et qu’il avait ordre d’agir ainsi. Une micro-pantalonnade qui en dit long sur la répression actuellement en cours.

Pour Alain Charlemoine, principal représentant de la Legal Team [1], les inculpés vont évidemment servir de boucs-émissaires. La seule option, explique t-il, est le « recours à la solidarité internationale » face à « des autorités qui veulent avant tout faire étalage d’une répression efficace ». « Ils veulent faire du chiffre, c’est la vitrine de la répression », approuve Jean-Yves, militant de la CNT mandaté par le camp des « anti » pour prendre des nouvelles.

Retour sur les événements de samedi : des forces de l’ordre dépassées qui répliquent à coups de pierres

Nicolas Sarkozy l’a claironné, on ne saurait assez sévèrement punir les casseurs de samedi. Si on le prend au mot, certaines têtes casquées devraient tomber. Non pas en raison des nombreuses rumeurs faisant des CRS les incendiaires de l’hôtel Ibis – ce ne sont là que rumeurs… – , mais parce qu’il est probable que le quartier dévasté a été volontairement laissé aux mains des fractions les plus radicales des manifestants, ainsi que le soulignent de nombreux médias. Pendant environ une demi-heure, il n’y a pas eu plus d’une centaine de personnes pour participer à la mise à sac d’une pharmacie, de l’hôtel Ibis, d’un distributeur de billets et de l’antenne de l’office du tourisme. Et la police – dont les hélicos tournaient sans discontinuer au-dessus des manifestants – brillait massivement par son absence. En clair : en tenant compte des forces en présence, il est plus qu’étrange que les policiers n’aient pas réagi avant. Avec cette impression tenace que tout était planifié : politiquement, rien ne discrédite plus le rassemblement anti-OTAN que l’incendie de l’hôtel Ibis, érigé en grande victime médiatique.

Par ailleurs, le reste de la manifestation a été l’occasion de multiples provocations policières. Voire d’agressions caractérisées, et pas forcément contre les éléments violents du cortège. De très nombreux témoignages (dont certains de journalistes présents) soulignent ainsi qu’en plusieurs occasions, les CRS ont bombardé de pierres les manifestants [2]. De quoi faire passer le goût de manifester à des anti qui, eux, ne sont pas protégés par une cuirasse à toute épruve…
Autre sympathique attention des forces de l’ordre, ces multiples tirs de grenades lacrymos ou de flashballs à hauteur de visage [3]). La volonté de faire le plus de mal possible est ici évidente. Une vidéo mise en ligne par les Dernières Nouvelles d’Alsace est assez explicite. La remarque sibylline proférée – « « Mets-en une dans la tronche… ouais, mets leur dans la gueule » » – par un flic à son collègue muni d’un flashball (voir la vidéo ci-dessous à 2 ’04) ne manquera pas de ravir les tenants de la force brute.

http://www.dailymotion.com/video/x8vnfb_la-recit-de-la-manifestation_news

On pourrait multiplier les exemples de ce genre. Pointer la légèreté de policiers qui arrosent de gaz lacrymo, voire de violentes grenades assourdissantes, les organisations pacifistes (majoritaires) prises en tenaille à la fin de la manifestation. Souligner que la plupart des violences sont nées de provocations policières. Rappeler l’absurdité d’une manif de cette envergure cantonnée aux zones industrielles, ce qui a pour le moins attisé la fureur des manifestants, qu’ils soient radicaux ou pas. Les exemples sont légion.

En résumé, les fanfaronnades de MAM ne devraient tromper personne : le contre-sommet a bien été l’occasion d’une jolie preuve d’inefficacité et de brutalité des forces de l’ordre.


En direct de la « Zone Autonome » du Neuhof, on peut vous certifier que pour l’instant il n’y a aucune trace de l’aréopage de barbares rouges et noirs appelés par Cornevin (vous vous souvenez, celui qui avait fabriqué la menace ultragauche lors de l’affaire de Tarnac, créateur de la légendaire ‘épicerie tapie dans l’ombre’) pour faire peur au bourgeois.

Tout l’attirail est là, il ne manque que Action Directe ou la RAF, ou encore Ben Laden… on résuscite même les « black blocks », création policière à Gènes et Rostock. 90% des soi-disant Black-Block dans les cortèges compacts à Rostock ont été identifiés comme étant en fait des ‘V-Mann’ – flics infiltrés. Et quand on analyse les vidéos, on voit que ce sont généralement les flics infiltrés qui sont les premiers à lancer des projectiles et guider le mouvement…

Intéressant par contre la partie sur la « guerre des images » à laquelle va se livrer le Ministère de l’Intérieur. C’est vrai qu’aux Etats-unis les « dashboard cams » dans les voitures de police ont permis de faire la lumière sur pas mal de dérapages policiers. Mais dans le cas présent, cela permettra surtout d’alimenter les médias en images de vilains casseurs « de la mouvance anarcho-autonome »…

Vous noterez d’ailleurs que la boucle est enfin bouclée chez Alliot-Marie et que les manifestants sont désormais des « adversaires » qui ont pris les armes « contre l’autorité de l’Etat ». Face à cette menace contre l’ordre et la propriété privée, il importe de défendre « la légitimité » de la répression. La France est toujours en 1870, on n’en sort pas… quand la crise hante le pays, le Parti de l’Ordre nous ressort toujours l’anarchiste au couteau entre les dents…

[Christophe Cornevin – le fabricant d’épouvantails – Le Figaro – 30/04/2009]

Cinq à six mille «casseurs» attendus

«Tout le monde est concentré sur le sommet, dont la vitrine médiatique risque d’aimanter des manifestants violents venus de l’Europe entière», confie-t-on au ministère de l’Intérieur. Les manifestants allemands et français pourraient voir leurs divisions décuplées par l’arrivage de militants des PCEr-Grapo espagnols, de la lutte révolutionnaire (EA) grecque, de la Federazione dei comunisti anarchici d’Italie, de Zabalaza Anarchist Communist Front d‘Afrique du Sud, de l’Union communiste libertaire du Canada ou encore du North-Eastern Federation of Anarchist Communists des États-Unis. Parmi eux, 5 000 à 6 000 «casseurs» devraient converger vers Strasbourg, selon la police. Proche de l’ultra-gauche et des anarcho-autonomes, ils auraient prévu de se fondre aux coordinations anti-Otan. Officiellement répertoriées, elles organisent déjà un dantesque contre-sommet entre le 1er et le 5 avril.

Surfant sur l’anti-impérialisme, l’antimilitarisme, le retrait des troupes en Afghanistan, l’antiglobalisation, voire la lutte contre le réchauffement climatique, ce front contestataire s’installera dans un «village autogéré». S’étendant sur une dizaine d’hectares à l’extrémité sud de la ville, sur les terrains d’une ferme éducative au Neuhof, il devrait abriter 10 000 protestataires . «Dans un premier temps, ils pensaient camper de part et d’autre du fleuve , affirme une source renseignée. Mais, lorsque les autorités allemandes ont voulu faire payer leur emplacement plusieurs milliers d’euros, ils se sont repliés sur la rive gauche française. »

Pour haranguer et mobiliser la foule contestataire, Internet bruisse de messages évocateurs. Brocardant la «phobie sécuritaire» de l’Otan, des libertaires trouvent soudain des accents gaulliens avec le pastiche «Strasbourg outragée, Strasbourg brisée, Strasbourg martyrisée, mais…». Strasbourg y est réduit à un «territoire occupé» et le sommet à une grand-messe atlantiste juste célébrée pour «préparer les futures guerres pour le contrôle des ressources de la planète». Comme l’ONU, le FMI, le G8, le G20, l’OMC, l’Otan est assimilée à un «instrument du capitalisme pour renforcer l’exploitation des travailleuses, des travailleurs et des peuples». Réchauffée mais toujours efficace, la dialectique pourrait fédérer jusqu’à 70 000 participants lors d’une manifestation unitaire prévue samedi 4 avril.

Face à cette assemblée en rouge et noir qui n’aura rien du jamboree, la Direction centrale de la sécurité intérieure (DCRI) tend ses «grandes oreilles» depuis des semaines. Et le ministère de l’Intérieur prévoit l’un des plus imposants dispositifs jamais imaginés. Selon nos informations, pas moins de 85 escadrons de gendarmerie mobile et Compagnies républicaines de sécurité seront mobilisés pour former un « cataplasme bleu» sur Strasbourg et ses environs. Il faut remonter au soixantième anniversaire du Débarquement et à la protection des plages normandes en 2004 pour voir un tel branle-bas de combat. Otan oblige, une armada de 10 000 hommes quadrillera donc le siège du Parlement européen, sécurisera les sites classés Seveso ou encore les gazoducs traversant le secteur, tandis que les vedettes de la gendarmerie fluviale sillonneront le Rhin, embarquant sonars et plongeurs pour déjouer la moindre menace subaquatique.

Redoutable effet de loupe médiatique

Dans le même temps, unités en scaphandres nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques resteront en réserve et une flotte de curieux blindés équipés de treuils et de chasse-neige ronronneront à proximité pour dégager d’éventuels obstacles. Enfin, quelque 500 gardes du corps français issus du Service de protection des hautes personnalités et des CRS veilleront sur les cortèges et les sites d’hébergements de treize délégations, dont celle de la France, bien sûr, mais aussi des États-Unis.

En alerte maximale, les Allemands, qui ont prévu de déployer pour leur part 15 000 hommes, dont leurs experts de la Bundeskriminalamt (BKA), prendront en charge l’autre moitié des officiels. En cas de coup dur, militaires d’élite du GIGN et homologues policiers du Raid ont fait le voyage. «Nous ne sommes jamais à l’abri d’une prise d’otages ou d’un détournement aérien», souffle un officier sous le couvert de l’anonymat. Le chef des services de renseignement intérieurs allemands Heinz Fromm, président de l’Office fédéral pour la protection de la constitution, craint pour sa part un «potentiel activiste de quelque 3 000 personnes».

«La forte mobilisation de l’ultra-gauche et des anarcho-autonomes, en France comme en Allemagne, nous fait craindre des modes d’expression violents, comme lors de la réunion du G8 à Gênes en 2001», grince un policier de haut rang. Dès juin dernier, un rapport «confidentiel défense» des services de renseignement français affirmait que ces militants «intégrant les “black blocs” de toutes les grandes contestations altermondialistes européennes» ont décidé de mettre en place une «force organisée transnationale de subversion destinée à commettre des actions violentes dans les prochains mois ». «Strasbourg 2009 pourrait être ce lieu de rendez-vous», craint un autre policier de haut rang.

Persuadés que «les plus déterminés déclencheront des émeutes pour ensuite filmer ce qu’ils présenteront comme de la répression policière», les stratèges de la Place Beauvau ont imaginé une parade : embarquer des caméras dans chaque unité d’intervention afin de filmer leur propre version des incidents. Pour les livrer à la presse, s’il le faut. «Nos adversaires ont pris l’habitude de se servir de la communication comme d’une arme contre l’autorité de l’État, confie-t-on dans l’entourage de Michèle Alliot-Marie. Nous emploierons les mêmes méthodes pour défendre la légitimité de notre action…»

Outre de nouveaux «éléments violents», se protégeant de plus en plus avec des équipements de hockey sur glace, les spécialistes du maintien de l’ordre ont vu émerger depuis dix ans une nouvelle génération de manifestants. Altermondialistes, pacifistes et écologistes, ils s’illustrent lors de sommets internationaux par de très audacieux happenings visant à paralyser des cérémonies. «Très entraînés, déroulant des trésors d’ingéniosité, ces militants non-violents s’entravent à des poids lourds, s’enchaînent à des tubulures d’acier dans des arbres, s’accrochent aux lampadaires ou sur des grues parfois hautes de 60 mètres , constate le lieutenant-colonel Francis Mézières, responsable de la division ordre public au Centre national d’entraînement des forces de gendarmerie de Saint-Astier. Plusieurs heures sont parfois nécessaires avant de libérer les gens contre leur gré…» — NdL&I : hé Claire, on parle de toi 🙂

Une cellule de huit instructeurs gendarmes experts en la matière a été projetée sur les bords du Rhin début avril avec des disqueuses thermiques et des tronçonneuses. Ces manifestants de l’extrême se verront proposer casque antibruit et lunettes de protection lors de leur désincarcération. Là encore, les scènes seront toutes filmées. Plus que jamais, le moindre incident au sommet de Strasbourg, où 2 500 journalistes sont attendus, connaîtra un redoutable effet de loupe médiatique. Garant de la paix dans le monde, le rendez-vous de l’Otan sera le théâtre d’une originale guerre des images.


C’est un type dangereux cet « Arsène »… il vivrait pas dans une ferme du côté de Tarnac, ce mec là ? Je suis sûr que la police va venir voir s’il planque pas des crampons dans sa cheminée…

L’Autre Réseau tire le rideau

[Le Monolecte – Agnès Maillard le mardi 17 mars 2009]Nous avions été nombreux à nous réjouir de l’arrivée d’un nouveau portail d’information au côté du bon vieux Rezo des copains. Nous avions apprécié les sélections du taulier et nous nous étions habitués assez rapidement à compter sur lui pour nous dénicher de la bonne info bien pertinente de derrière les fagots.
Puis, le 6 mars dernier, c’est le mur et l’incompréhension. Pour tous ceux qui avaient leur rond de serviette à l’Autre Réseau, je transmets ce message de l’aubergiste.

Merci de prendre de mes nouvelles, et mes excuses pour cette réponse tardive, mais il se trouve que depuis le jour où j’ai fermé L’Autre Réseau pour cause de désertion, j’ai aussi résilié dans la foulée mon abonnement à Internet, fais un petit voyage loin de tout et je n’ai pas consulté mes mails jusqu’à aujourd’hui.

Alors je vais essayer de répondre à votre question : qu’est-ce qui se passe ? Cela fait maintenant 12 ans que je suis connecté sur Internet quotidiennement, et si vous connaissez mon identité, vous savez sans doute que j’ai essayé, dans la mesure de mes moyens, de soutenir Rezo depuis le jour de son ouverture. L’aventure de L’Autre Réseau aura été fulgurante : aux 10 années de Rezo, je n’ai à opposer que 8 petits mois. Mais ce que j’ai compris de choses pendant ces 8 mois !

En faisant tourner L’Autre Réseau, je me suis rendu compte, jour après jour, de la difficulté de tenir cette position : on veut soutenir, par exemple, les Indigènes, et l’on soutient du même coup certaines formes de positions identitaires, on veut soutenir les luttes des femmes, et l’on soutient la haine des hommes, on veut soutenir la lutte contre les discriminations, et l’on soutient le retour des discriminations dans leur forme la plus sordide (regardez par exemple la mention « non-mixte » dans le chapeau de cet article : http://lmsi.net/spip.php?article826 ) on veut soutenir la lutte contre l’homophobie, et c’est la haine des hétéros que l’on soutient, on veut publier tout ce qui sort dans les luttes syndicales, on espère la grève générale, et c’est encore les cadres syndicaux bien planqués qui font le bénéfice de notre militantisme anonyme, généreux et bénévole. On veut soutenir la cause palestienne, et l’on soutient du même coup la religion, celle-là même à propos de laquelle Sade écrivait : On évalue à 50 millions le nombre de morts des guerres de religions. En est-il seulement une qui vaille le sang d’un oiseau ?.

Bref, cette immersion de quelques mois dans le web militant m’aura convaincu qu’il faut absolument chercher d’autres moyens d’agir, d’autres moyens de militer. Pendant un certain temps, je m’étais fais une raison, en me disant : Eh bien soit ! publions tout, chacun reconnaîtra ce qui le concerne !. Et là encore, ce fut une erreur : une telle position ne fait que valider la victoire totale du communautarisme, la victoire du chacun-pour-soi, qui est la vraie victoire du libéralisme, et qui est la vraie raison de la victoire d’un Sarkozy. J’avais naïvement, lorsque ce dernier a été élu, pensé comme beaucoup, que c’était une victoire « pétainiste », « poujadiste », etc. Certes, il y a du vrai là-dedans. Mais cela n’est que la partie visible de l’iceberg, et elle n’est pas si déterminante que ça. Au contraire, je crois que la victoire de Sarkozy, la victoire des néo-libéraux, c’est la victoire du chacun-son-combat, du chacun-pour-soi, la victoire du « non-mixte » : et je ne voulais pas aider cette extrême-droite, ces identitaires-là, même si elle prenait chez nous la cosmétique de l’extrême gauche.

Et puis, il y a encore une chose : même lorsque je faisais (rarement) un bilan positif de mon action sur le web, je réalisais à quel point, toute cette histoire de web, de révolution internet, etc. de réseau présenté comme une fenêtre sur le monde, m’apparaissait maintenant comme un leurre, une arnaque de grande ampleur, un immense mur (c’est pourquoi j’ai choisi l’image d’un mur de briques pour fermer L’Autre Réseau : pour dire, regardez, ce que vous avez en face de vous, toute la journée, cet écran, ce n’est pas un outil de libération, c’est un mur, un mur qui bloque toute communication sensible). Je ne pense pas qu’on puisse « résister » sous le regard inquisiteur de Big Brother, je ne pense plus que l’on arrivera à quelque chose, en s’exprimant 10 fois plus mais pour être espionné 1000 fois plus.

Alors, j’ai eu cette impulsion, j’ai lâché, j’ai résilié mon abonnement, filé mon ordinateur à une amie qui en avait besoin, décidé que je ne me connecterai accessoirement depuis des cyber-cafés ou chez des amis et dans tous les cas très rarement (comme c’est le cas ce matin). Et que je voulais passer à autre chose. Tout autre chose.

Il y a dix ans, j’étais musicien, j’écrivais, je jouais de la musique tous les jours avec mes amis, jusqu’au bout de la nuit. Peu de temps avant de « déserter », j’avais installé sur mon ordi un petit plug-in qui donne une moyenne de mon temps quotidien passé en ligne. Résultat (hors-boulot, et je bosse 35 h/semaine) : 300 minutes par jour ! Je n’en reviens même pas : où ai-je pris tout ce temps ? Mais c’est assez clair : je l’ai pris sur mon temps de lecture, sur mon temps de promenade, sur mon temps d’écriture, de musique, sur le temps que je passais avec mes amis et même sur mon temps d’ennui. Bref : le message dit tout : maintenant, c’est fini tout ça pour moi.

(…) J’espère que vous ne serez pas un jour piégé dans les contradictions dont je n’ai pas su sortir, ou peut-être je vous souhaite à vous aussi d’en sortir ? je ne sais pas. En tout cas cela me ferait très plaisir un jour de vous rencontrer. Mais, de grâce, dans la vraie vie, par sur ce *$§=#^% de web.

Arsène


Près de mille pièces ont déjà été cotées, mais aucune preuve matérielle ni aveux, malgré une surveillance très ancienne du groupe…. parce que le but de l’opération Tarnac n’était pas d’intercepter un groupe terroriste mais de faire un coup médiatique et de réveiller un épouvantail bien pratique à un moment où la contestation sociale s’amplifie.

L’état sécuritaire a toujours besoin d’une menace pour effrayer le bourgeois, faire rentrer dans le rang le populo et criminaliser la contestation.

Ce que contient le dossier d’instruction de l’affaire Tarnac

[ Isabelle Mandraud –  LE MONDE | 25.03.09 ]
L’ensemble atteint déjà la hauteur de sept à huit Bottin. Le dossier de l’affaire Tarnac, que Le Monde a pu consulter, près de mille pièces et procès-verbaux numérotés, peut être scindé en deux. D’un côté, sept mois de filatures, d’écoutes, dans le cadre d’une enquête préliminaire ouverte le 16 avril 2008; de l’autre, quatre mois d’instruction, toujours en cours depuis la mise en examen, le 15 novembre 2008, de neuf personnes accusées de terrorisme et pour certaines, de sabotage contre des lignes SNCF en octobre et en novembre 2008.

Bertrand Deveaux, 22 ans, Elsa Hauck, 24 ans, Aria Thomas, 27 ans, Mathieu Burnel, 27 ans, puis Gabrielle Hallez, 30 ans, Manon Glibert, 25 ans, Benjamin Rosoux, 30 ans, et Yildune Lévy, 25 ans, ont tous, depuis, recouvré la liberté sous contrôle judiciaire. Seul, Julien Coupat, 34 ans, considéré comme le chef, reste incarcéré.

Le dossier a beau être dense, il ne contient ni preuves matérielles ni aveux, et un seul témoignage à charge, sous X, recueilli le 14 novembre. Les rares confidences lâchées lors des gardes à vue ont été corrigées depuis. « Ils [les policiers] ont tout fait pour me faire dire que Julien Coupat était un être abject, manipulateur« , affirme le 22janvier Aria Thomas à Yves Jannier, l’un des trois juges instructeurs du pôle antiterroriste. « Pour que les choses soient claires, poursuit-elle, je n’ai jamais pensé, ni cru ou eu le sentiment que Benjamin Rosoux ou Julien Coupat soient prêts à commettre des actes de violence. » Suit cet échange, le 13février, entre le juge Thierry Fragnoli et Julien Coupat, dépeint par le témoin sous X comme un «gourou quasi sectaire», enclin à la violence politique.

« UNE ESPÈCE DE CHARLES MANSON DE LA POLITIQUE »

– Le juge: « Pensez-vous que le combat politique puisse parfois avoir une valeur supérieure à la vie humaine et justifier l’atteinte de celle-ci?
– Julien Coupat: « Ça fait partie (…) du caractère délirant de la déposition du témoin 42 [sous X] tendant à me faire passer pour une espèce de Charles Manson de la politique (…) Je pense que c’est une erreur métaphysique de croire qu’une justification puisse avoir le même poids qu’une vie d’homme. »
Il arrive parfois que le juge tâte le terrain à ses dépens. – « J’imagine que votre ami Coupat et vous-même, de par vos formations et vos goûts, vous vous intéressez à l’histoire (…) des grands mouvements révolutionnaires. Est-ce le cas? », demande-t-il le 8 janvier à Yildune Lévy, la compagne de Julien Coupat.
– « Pour ce qui me concerne, je m’intéresse plus à la préhistoire« , rétorque l’étudiante en archéologie. (NdL&I : Bravo Yldune, ça c’est envoyé !)

Séparément, le couple Lévy-Coupat livre une même version pour justifier, au terme de multiples détours, leur présence, dans la nuit du 7 au 8 novembre 2008, à proximité d’une des lignes SNCF endommagées. Elle: « On a fait l’amour dans la voiture comme plein de jeunes. » Lui: « On s’est enfoncés dans la campagne pour voir si nous étions suivis et nous n’avons eu aucun répit, puisque, où que nous allions, 30 secondes après s’être arrêtés, même dans les endroits les plus reculés, il y avait des voitures qui surgissaient. » (suite…)


[Jean-Pierre Garnier – Le Monde Diplomatique – Janvier 2009]
Les anarchistes – Appellations peu contrôlées

Pendant longtemps, les termes « anarchiste » et « libertaire » ont été indissociables aux yeux des militants, qui les revendiquaient pour définir leur positionnement dans le champ politique, ou, plus exactement, en dehors et en rupture avec lui dès lors qu’il était confondu avec la scène politicienne. Il en allait de même pour ceux qui les combattaient ou les réprouvaient : outre les gardiens officiels de l’ordre bourgeois, les membres des autres partis, de gauche ou de droite, les journalistes de toutes obédiences et l’« opinion publique » formatée par les uns et les autres s’accordaient à mettre anarchistes et libertaires dans le même sac.

De nos jours, cette association de mots n’a rien perdu de sa pertinence pour les intéressés, même s’ils tiennent à préciser, comme ils l’ont toujours fait, en quoi et pourquoi ces dénominations ne sont pas pour autant synonymes. L’anarchisme, rappellent-ils, a pour dynamique et horizon l’auto-émancipation collective des travailleurs vis-à-vis des pouvoirs qui les oppriment et les exploitent, laquelle implique l’auto-libération des individus — c’est le versant libertaire — à l’égard des institutions, des normes et des croyances qui les aliènent. Mais le distinguo ainsi opéré entre les deux notions n’en fait que mieux ressortir la complémentarité sémantique et politique. C’est pourquoi l’hebdomadaire français de la Fédération anarchiste a gardé son intitulé : Le Monde libertaire.

En revanche, à l’extérieur des cercles restreints pour qui l’existence de l’Etat demeure plus que jamais attentatoire aux libertés qu’il est censé garantir, il semble que, depuis quelque temps déjà, le couplage anarchiste-libertaire n’aille plus de soi. Mieux encore : à lire ou à entendre ce qui s’écrit et se dit communément sur le sujet, on aurait affaire à une alliance de mots saugrenue. Il est devenu courant, parmi les politiciens, les intellectuels à gages ou dans la presse de marché, d’opposer de manière dichotomique anarchiste et libertaire. D’un côté, l’anarchisme tend maintenant à remplacer, « lutte contre le terrorisme » aidant, le communisme défunt — ou plutôt ce qu’on tenait pour tel — comme figure du Mal aux côtés de l’intégrisme islamiste ; de l’autre, l’épithète « libertaire » en est venue à constituer un label culturel et médiatique très prisé par toutes sortes de rebelles de confort pour enrober d’un vernis anticonformiste leur adhésion à l’ordre établi (1). (suite…)


[Socio13 – Danièle Bleitrach – 31/01/2009]

Il est important aujourd’hui face à la crise de l’impérialisme qui déferle sur nous de donner à nos luttes un horizon à la mesure du combat anti-impérialiste. Nous l’avons vu lors de la grève et des manifestations du 29 en France, il s’agissait d’un mouvement politique au sens plein du terme. La colère était non seulement dirigée contre le gouvernement de Sarkozy, celui du capital, de ses banquiers et des profiteurs, mais contre le système capitaliste lui-même. Et à ce titre il était irrecupérable par les politiciens de tout poil, contraint au contraire à se rallier à cette montée de la colère populaire. Nous avons bien vu comment la propagande médiatique qui tente d’empêcher ce mouvement fonctionne: premièrement elle tente de lui attribuer la crise du capitalisme, tout va si mal et des “nantis” mettent du désordre. Deuxiémement, elle recommence le coup du referendum sur la Constitution, il n’y a qu’en France qu’on voit ça et pour cela il faut laisser croire que la grève serait un sport national, cacher les révoltes dans le monde. Enfin tout est organisé pour nous laisser croire qu’il n’y aucune relation entre ces luttes et le mouvement de révolte contre ce qui se passe à Gaza, les luttes pour la paix. Il y a des traits communs à toutes ces tactiques, la division, l’isolement, par l’ignorance du contexte réel dans lesquels toutr cela prend du sens, et ce sens ne peut être qu’anti-impérialiste et anti-capitaliste.

Comprendre en quoi les guerres, les massacres font partie de la crise de l’emploi et des difficultés croissantes de la vie quotidienne (suite…)


Si vous voulez comprendre ce qui se passe dans les têtes d’Alliot-Marie, de Sarkozy ou de Royal… ou encore démonter les filets tendus par Alain Bauer, Xavier Raufer et ses disciples néo-cons…

[Robert Altemeyer est professeur de psychologie à l’Université du Manitoba, spécialisé en recherche sur l’autoritarisme – Trad. Gregor Seither]

Ouvrage complet téléchargeable au format PDF – avec un codicile sur les élections US de 2008
http://home.cc.umanitoba.ca/~altemey/

OK, de quoi parle ce livre ? Il parle de ce qui est arrivé au gouvernement des Etats-unis ces dernières années. Il parle des décisions désastreuses prises par ce gouvernement. Il parle de la corruption qui s’est emparée du Congrès. Il vous explique comment les valeurs traditionnelles du camp conservateur ont été pratiquement éradiquées par l’autoritarisme. Il vous montre comment la “Droite religieuse” a noué des alliances avec des leaders autoritaristes et amoraux pour imposer leurs projet anti-démocratiques à notre pays.

Vous êtes peut-être entrain de vous dire “Encore un de ces beaux-parleurs gauchistes qui nous vend sa propagande.” Ou peut-être que vous vous dites, “Et alors ? Cela fait des années qu’on sait cela.” Pourquoi un conservateur, un modéré ou un libéral devrait-il se donner la peine de lire ce livre ? Pourquoi un sympathisant du Parti Républicain, Démocrate ou autre Indépendant devrait-il cliquer sur le lien « Introduction » sur cette page ?

Si vous cliquez ce lien, si vous lisez ce livre, vous embarquerez dans un voyage d’études à travers un certain nombre d’études scientifiques sur la question, des travaux de recherche que j’ai mené sur les personnalités autoritaristes. Ces études ont un lien direct avec tous les points mentionnés dans le premier paragraphe. En conséquence, si vous avez commencé la lecture de cet article en vous disant « Quel ramassis de conneries », je vous invite à aller jeter un coup d’oeil aux données scientifiques collectées.

Prenez par exemple la déclaration suivante : “A partir du moment ou le Gouvernement et les autorités ont condamné les éléments dangereux au sein de notre société, le devoir moral de tout citoyen est d’aider à éradiquer la pourriture qui corrompt notre société de l’intérieur. » On dirait un truc tout droit sorti des discours d’Hitler, non ? A votre avis, combien d’hommes politiques contemporains aux Etats-unis ont déclaré être en accord avec cette phrase ? Combien de législateurs, de gauche comme de droite, l’ont reprise dans leur discours ? Et vous voulez savoir ce qu’ils ont en commun ?

Et que penseriez vous d’un gouvernement qui mettrait en place un programme de persécution de partis politiques d’opposition, de minorités ou de journalistes dissidents en les jetant en prison, en les torturant et assassinant même. Personne ne pourrait être d’accord avec cela, non ? Et bien détrompez vous, ils sont nombreux, parmi les leaders de notre pays, à approuver un tel programme.

Et surtout n’allez pas croire que ceci ne vous concerne pas, personnellement. Posez vous cette question : si un pouvoir autoritaire et mauvais décidait de vous tuer, juste comme ça, même si vous n’avez rien fait de mal; combien de temps lui faudrait il  avant de trouver un candidat qui accepterait de vous tirer dessus, sans savoir pourquoi, juste parce que l’autorité lui a dit de le faire ? Quel type de personne est le plus susceptible d’obéir à un tel ordre ? Quel type de représentant de l’autorité est le plus susceptible de donner un tel ordre, si cela va dans le sens de ses intentions ? Regardez les résultats des expériences qui ont été menées sur la soumission à l’autorité(…)

Les recherches qui ont été menées permettent de mieux comprendre ce qui se passe dans la tête du « Parti de l’Ordre ». Les études montrent à quel point ils sont agressifs, mais pourquoi sont ils si hostiles ? Les expériences montrent que la plupart d’entre eux est imperméable au raisonnement factuel ou à l’énoncé de faits n’entrant pas dans leur vision du monde, mais pourquoi sont ils si dogmatiques ?. Oui, toutes les enquêtes menées montrent que la Droite religieuse est peuplée de personnages opportunistes et hypocrites, à tous les niveaux, mais comme expliquer cela ? Et comment expliquer la capacité de cette frange de la population à ne pas voir l’hypocrisie de ses leaders ? Les ténors peuvent raconter ce qu’ils veulent, avancer n’importe quelle excuse faiblarde quand ils se font attraper, voire mentir carrément pour cacher leurs méfaits… et malgré cela la foule les suit. Pourquoi ? Et que se passe t’il quand les « suiveurs » de l’autoritarisme rencontrent les leaders autoritaires et qu’ils se mettent en branle ?

Je pense que vous trouverez que ce livre “permet de mieux comprendre beaucoup de choses.” A travers des données et une méthode d’analyse scientifiques, il permet d’interconnecter et rendre cohérentes beaucoup d’impressions éparses sur les ennemis de la liberté et de l’égalité.

Vous ne me croyez pas ? Cliquez sur le lien, le livre est gratuit.

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